Cannes 2016 : les Palmes d'or inattendues de l'histoire du festival
A deux jours de la cérémonie de clôture du Festival de Cannes, les trois quarts des films en compétition officielle ont été projetés. Déjà certains réalisateurs se placent en haut du panier pour la Palme d'or. Mais ce que Cannes nous a appris à travers les années, c'est que le jury peut nous réserver des surprises. Culturebox vous dresse la liste des films surprise, couronnés de la Palme d'or.
L'un des plus grands classiques du cinéma italien n'a pas toujours été considéré comme tel. Lors de sa présentation pour le 13e Festival de Cannes, en 1960, le film déçoit et agace. Cette critique de la presse, de la vie mondaine et de la société du spectacle est insupportable pour les spectateurs, surtout en plein festival. Frederico Fellini peut compter sur le soutien du président du festival, Georges Simenon, qui arrive à convaincre les membres du jury. Résultat, le film reçoit la Palme d'or, à la plus grande surprise de la profession. Elle apparait logique aujourd'hui.
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Viridiana de Luis Bunuel, en 1961
Le sulfureux film du réalisateur espagnol, où une jeune femme est agressée sexuellement par son oncle avant qu'elle n'entre dans un couvent, a bien failli ne pas être récompensé. La copie du film arrive le dernier jour sur la croisette, alors que les prix ont déjà été distribués, mais les jurés décident quand même de le voir. Bouleversés, le jury, présidé par Jean Giono, se réunit une dernière fois et s'accorde pour donner au film la Palme d'or. Luis Bunuel partagera la victoire avec Henri Colpi, qui avait été choisi initialement pour la récompense ultime, avec "Une aussi longue absence".
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Ces messieurs dames de Pietro Germi, en 1966
Ce n'est pas tant que la comédie italienne sur la bonne société bourgeoise a été mal reçue lors de sa présentation à la 19e édition du Festival de Cannes, au contraire elle a été très appréciée. La surprise vient du fait qu'elle est ex aequo avec "Un homme et une femme" de Claude Lelouch. L'histoire d'amour entre Jean-Louis Trintignant et Anouk Aimée charme toute la croisette. Les critiques auraient préféré que Claude Lelouche soit le seul à recevoir la Palme d'or.
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Padre padrone de Paolo et Vittorio Taviani,en 1977
Le drame italien sur les rapports conflictuels entre un père et son fils dans la Sardaigne profonde des années 40 a bouleversé Cannes. Mais "Une journée particulière" d'Ettore Scola avait une meilleure cote quant à l'obtention de la Palme d'or. Même le président du festival, Robert Favre Le Bret, et celui du jury, Roberto Rossellini, ne cachaient pas leur soutien à ce film. Mais c'était sans compter la volonté des femmes présentes dans le jury à faire bloc aux pressions de leurs présidents. Elles tiennent bon et c'est au final le film des frères Taviani qui remporte la mise.
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Sous le soleil de Satan de Maurice Pialat, en 1987
C'est l'une des remises de prix les plus controversées de l'histoire de Cannes. Le film avec Gérard Depardieu et Sandrine Bonnaire choque les critiques. Ces dernières pensaient voir l'Allemand Wim Wenders récupérer la récompense ultime pour "Les Ailes du désir", mais le président du jury, Yves Montand, appelle Maurice Pialat. Ce dernier monte sur scène sous les sifflets et réplique : "Et si vous ne m'aimez pas, je peux vous dire que je ne vous aime pas non plus".
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Sexe, mensonge et vidéo de Steven Soderbergh, en 1989
L'histoire de Graham Dalton qui filme des femmes raconter dans leur moindre détail leurs expériences intimes, en a choqué plus d'un sur la croisette. Mais le jury, présidé par Wim Wenders, lui est époustouflé par le talent de ce jeune cinéaste et décide de le récompenser, ainsi que son acteur, James Spader, qui reçoit le Prix d'interprétation masculine.
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Fahrenheit 9/11 de Michael Moore, en 2004
Le président du jury, Quentin Tarantino, en étonne plus d'un lorsqu'il annonce le grand gagnant de cette 57e édition. Le documentariste est vivement critiqué dans sa manière de se mettre en scène et de mener ses enquêtes, on lui reproche un manque d'objectivité. Le documentaire anti-George W. Bush sur les attentats du 11 septembre sort quand même vainqueur. Quentin Tarantino le répète encore, le choix du jury n'a jamais été politique. "Ce qui a compté, c'est l'esthétique, l'humour et l'esprit satirique du film", déclare-t-il en conférence de presse après la cérémonie de clôture.
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Elephant de Gus Van Sant, en 2003
Cette 56e édition du Festival de Cannes a été considérée par beaucoup comme étant médiocre. Mais les critiques étaient d'accord pour placer le film de Lars von Trier "Dogville", avec Nicole Kidman, au-dessus du lot. Il aurait alors été normal de le voir recevoir la Palme d'or. Mais voilà Patrice Chéreau, président du jury, préfère le film de l'Américain Gus Van Sant, retraçant le massacre du lycée américain de Columbine. Il ira même jusqu'à enfreindre la règle d'un prix-un film (mis en place après la surabondance de prix pour "Barton Fink" des frères Coen) en donnant la Palme d'or et le Prix de la mise en scène à "Elephant".
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Rosetta de Luc et Jean-Pierre Dardenne, en 2005
Ca devait être le triomphe de Pedro Almodóvar avec son film "Tout sur ma mère". Mais le président du jury, David Cronenberg, choisit le drame des frères Dardenne avec Emilie Dequenne, qui sera aussi récompensée du Prix d'interprétation féminine. Les festivaliers se plaignent d'un palmarès trop élitiste et trop déprimant. David Cronenberg leur répond dans le quotidien Libération : "Un film qui critique certains aspects de la nature humaine ou de la société n'est pas pessimiste dans la mesure où le cinéaste trouve l'énergie et le désir d'apporter un commentaire".
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Winter's sleep de Nuri Bilge Ceylan, en 2014
Le match pour ce 67e Festival de Cannes se jouait entre "Deux jours, une nuit" des frères Dardenne et "Mommy" de Xavier Dolan. Les deux films avaient bouleversé les spectateurs lors des projections. Mais Jane Campion et ses jurés ont boudé les frères belges et ont récompensé le jeune talent québécois du Prix du jury, à égalité avec Jean-Luc Godard pour "Adieu au langage". Il ne restait alors que le long huis clos du turc Nuri Bilge Ceylan, "Winter Sleep", pour recevoir le Palme d'or, à la grande surprise du réalisateur.
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