Cannes 2015 : "Green Room", un effroyable film de guerre en vase clos
4 / 5 ★★★★☆
« Green room », c’est l’expression utilisée parmi les musiciens américains pour désigner la pièce où ils attendent avant de monter sur scène. Et c’est l’endroit où prend place la plus grande partie du film qui lui doit son titre. Après avoir rempli un contrat dans une miteuse salle de spectacle gérée par un groupuscule de militants pour la suprématie blanche, l’un des membres d’une formation punk voit ce qu’il ne devrait pas voir : le corps d’une jeune fille assassinée par l’un des nazis.
C’est alors que commence leur cauchemar. Enfermés dans la « green room », ils comprennent que sans se battre, ls n’en sortiront pas vivants. S’en suit une véritable guerre entre les nazis froids et organisés et ces quelques jeunes rebelles qui n’ont d’expérience du combat que le souvenir d’une partie de paint-ball.
Violent et brutal
Jeremy Saulnier n’est pas l’homme que l’on attend. Il est d’abord new-yorkais, comme son nom ne l’indique pas. Et son apparence de jeune homme bien propre sur lui jure avec la brutalité de son film. Il ne faut pourtant pas s’y tromper, même s’il affirme n’avoir jamais été violent, il revendique deux passions qui se retrouvent dans « Green Room », le cinéma, bien sûr mais aussi le mouvement punk auquel il participa en chantant dans un groupe. A ce double titre, il mûrissait depuis dix ans le projet qui devait aboutir au film projeté dans le cadre de la Quinzaine des Réalisateurs. Interrogé sur le sens qu’il donne à son film, il répond qu’il aimerait que les spectateurs ressortent de la salle en ayant l’impression d’avoir survécu à une épreuve. Interrogé sur ses fans, il confesse que certains de ses amis sur les réseaux sociaux lui font un peu peur.
Film de siège
« Green room » restera sans doute comme l’un des meilleurs « films de siège » et l’on pense immédiatement à « Une nuit en enfer »(Robert Rodriguez 1996) où les monstres et démons seraient remplacés par des hommes dévoyés par une idéologie perverse. Le film s’inscrit dans une lignée où « La nuit des morts-vivants » (George Romero 1960), « Les Chiens de paille » (Sam Peckinpah 1971) ou encore « Assaut sur le central 13 » (John Carpenter 1976) font office de référence. Mais Saulnier va plus loin que chacun d’entre eux dans l’expression de la violence. Il n’épargne rien au spectateur : ni le ventre qui s’ouvre au fil d’un cutter, ni les gargouillis sanguinolents d’une gorge déchiquetée par les crocs d’un pittbull, ni les ravages immédiats d’une balle de gros calibre tirée en pleine figure.
Trash
Les morceaux de musique punk accompagnent les scènes les plus trash et illustrent bien la panique dans laquelle se débattent les jeunes musiciens. La mise en scène est forcément rapide et efficace, et les images filmées à l’épaule. Ce film n’est à l’évidence pas pour tous les publics mais il a parfaitement sa place dans une Quinzaine des Réalisateurs qui explore avec curiosité les voies de la création cinématographique mondiale. C’est le type de film qu’on adore ou qu’on déteste. Ce n’est même plus un avis, c’est un sentiment qui vient des tripes.
Green Room
Film américain de Jeremy Saulnier
1h34
Avec Anton Yelchin, Imogen Poots, Patrick Stewart, Alia Shawkat, Joe Cole, Callum Turner
Synopsis : Après avoir assisté à un acte de violence horrible, un jeune groupe de punk rock se retrouve piégé dans un lieu isolé. Pour survivre, ils vont devoir lutter contre une bande de skinheads bien décidés à éliminer tous les témoins
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