"Il a dit des choses horribles", témoigne l'Italienne à l'origine de l'enregistrement audio qui accable Harvey Weinstein
Ambra Battilana a accordé un entretien au journal "La Repubblica", où elle revient sur les attouchements sexuels dont elle dit avoir été victime en mars 2015. Les révélations en chaîne sur le comportement du producteur sont une "bonne chose", juge-t-elle, même après tout ce temps".
"Cette affaire me rend justice. Plus personne ne pourra dire que je me fais des films." Dans un entretien exclusif accordé à La Repubblica (en italien), l'Italienne Ambra Battilana a accepté de revenir sur les attouchements sexuels dont elle dit avoir été victime, en mars 2015, quand elle s'est rendue dans le bureau de Harvey Weinstein, situé à Tribeca, dans le quartier de Manhattan à New York (Etats-Unis). Cette jeune femme de 24 ans est au centre des accusations contre le producteur, pour avoir enregistré une conversation où le producteur explique se livrer régulièrement à des attouchements.
"Je me suis construit une carapace"
Ambra Battilana a rencontré Harvey Weinstein sur le tapis rouge du Radio City Music Hall de New York. Le producteur l'a alors invitée le lendemain pour lui proposer un travail. "La beauté te fait croire que tu as quelque chose en plus, explique la jeune femme. Les gens sont gentils, ils t'invitent dans de beaux endroits, te font des cadeaux. Cela me semblait normal, mais plus maintenant. Je me suis construit une carapace."
Lors du rendez-vous, le mannequin accuse Harvey Weinstein de lui avoir touché la poitrine, en lui demandant s'il s'agissait d'une vraie, avant de tenter de glisser la main sous sa jupe. "Il a dit des choses horribles, raconte Ambra Battilana. Je ne me suis pas laissée toucher facilement et ce n'est pas par fausse pudeur. Mon père me frappait moi et ma mère. Quand un homme tend les mains vers moi, je recule instinctivement, même quand je suis amoureuse."
"Liée par un accord"
L'Italienne prend alors la fuite et se rend à la Special Victims Division, l'unité chargée des enquêtes liées aux crimes sexuels. Les enquêteurs la persuadent alors de rencontrer le producteur une nouvelle fois, mais avec un enregistreur dans la poche. Au bar du Tribeca Grand Hotel, elle fait face à un homme insistant, lequel reconnaît implicitement lui avoir touché sa poitrine et qui déclare "être habitué à ce genre de choses". La jeune femme refuse de monter dans la chambre et réitère ses refus à plusieurs reprises. "Je ne veux pas, s'il te plaît, je ne fais pas ces choses-là", entend-on dans l'enregistrement dévoilé par le New Yorker.
Harvey Weinstein aurait offert une indemnité financière à l'Italienne, selon des proches du dossier cités par le New York Times (en anglais). Mais Ambra Battilana n'aborde pas ces questions dans les colonnes de La Repubblica. En début d'entretien, elle explique être "liée par un accord" qui lui interdit de livrer les détails de l'affaire, sans en dire davantage. Elle explique également que son avocat lui a conseillé de se montrer "prudente".
"Les restaurants me fermaient la porte au nez"
Ambra Battilana, en revanche, dit avoir souffert de l'affaire. "Même les restaurants [du quartier new-yorkais] de Soho, fréquentés par le monde de la mode, me fermaient la porte au visage, à moi l'indésirable." Avec les révélations en chaîne contre le producteur, elle se dit aujourd'hui soulagée. "C'est une bonne chose que les femmes le dénoncent, même après tout ce temps. Ce qui est arrivé a mis mes rêves à rude épreuve. Maintenant, j'espère seulement les rattraper."
En 2010, l'ancienne Miss Piémont avait également témoigné en justice contre des associés de Silvio Berlusconi, accusés d'avoir fourni des femmes à l'ancien président du Conseil italien, dans le cadre d'orgies sexuelles organisées dans la villa d'Arcore, près de Milan (Italie). Elle estime que cette affaire lui a valu d'être traitée de menteuse, ce qui explique son choix de rejoindre les Etats-Unis. C'est là qu'elle a changé de nom : "Ambra Battilana est devenue Ambra Gutierrez."
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.