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71e Mostra de Venise : un millésime extraordinaire pour la France

Quatre films en lice pour le Lion d'or, deux autres présentés dans une catégorie parallèle et un président du jury : la Mostra de Venise déroule cette année le tapis rouge à la France. Un pays avec lequel elle a toujours entretenu des liens d'amitié mais aussi de rivalité, raconte son directeur Alberto Barbera.
Article rédigé par franceinfo - franceinfo Culture (avec AFP)
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Mostra de Venise : Charlotte Gainsbourg et Chiara Mastroianni se rendent, le 30 août, à la projection de "Trois coeurs" de Benoît Jacquot dans lequel elles jouent.
 (GABRIEL BOUYS / AFP)
La 71e édition de la Mostra, qui s'est ouverte mercredi, fait la part belle à la France avec quatre films sur les vingt en lice pour le Lion d'or. Une forte représentation à laquelle s'ajoute la présence d'un Français à la tête du jury, le compositeur de musiques de films, Alexandre Desplat ("Le  Discours d'un roi", "Philomena"), premier président depuis la création du festival en 1932 à n'être ni réalisateur, ni acteur.

Alberto Barbera : "Casser les codes" des festivals

"C'est d'abord un choix d'amitié et de compétence" explique Alberto Barbera, 63 ans, qui dirige le plus ancien des festivals de cinéma depuis 2011 (il l'avait déjà dirigé entre 1998 et 2002). "Nous nous étions côtoyés comme membres du jury du festival de Cannes, en 2010, et j'ai pu me rendre compte de sa passion, de sa grande connaissance du cinéma et aussi de son charisme, une qualité importante pour diriger un jury", poursuit-il. Le directeur général explique aussi qu'en désignant Alexandre Desplat il a voulu "casser les codes" et rappeler que "le cinéma est un art collectif": "Que seraient les films d'Alfred Hitchcock sans les musiques de Bernard Herrmann ou ceux de Martin Scorsese sans les montages de Thelma Schoonmaker?", relève-t-il.

Quatre films français en compétition et deux en catégorie spéciale 
Xavier Beauvois et l'équipe du film "La rançon de la gloire". De gauche à droite : Arthur Beauvois, Eugène Chaplin, Michel Legrand, Xavier Beauvois, Séli Gmach, et Nadine Labaki.
 (TIZIANA FABI / AFP)
Concernant la sélection des films, "c'est un millésime extraordinaire", explique Alberto Barbera. "J'ai été impressionné par le nombre de films français de qualité que j'ai vus lors des sélections. J'aurais aimé en inviter plus et c'est à contre-coeur que j'ai dû renoncer", ajoute-t-il. Il y a d'abord eu le film de Benoît Jacquot, "Trois coeurs", présenté le 30 août, "C'est le premier film que j'ai fait venir cette année. Je l'ai vu très tôt pendant la sélection, dès le mois d'avril, et il m'a beaucoup plu", Benoît Jacquot est un habitué de la cité lacustre puisqu'il y est déjà venu à trois reprises en compétition officielle, sans jamais décrocher toutefois la récompense suprême (en 1997 avec "Le septième ciel", en 1999 avec  "Pas de scandale" et en 2006 avec "L'Intouchable"). Autres films en compétition : "La rançon de la gloire" de Xavier Beauvois, "Le dernier coup de marteau" d'Alexis Laporte et "Loin des hommes" de David Oelhoffen.
Réda Kateb et Viggo Mortensen dans "Loin des hommes" de David Oelhoffen présenté à Venise.
 (Pathé Distribution)
Deux autres films français sont présentés dans la catégorie "Orizzonti", dédiée aux nouvelles tendances : celui Quentin Dupieux, "Réalité", ainsi que celui du tandem Delépine/Kervern, "Near death experience" avec l'écrivain Michel Houellebecq.

Histoire : "Mostra" de Venise versus "Festival de Cannes"

Concernant les liens qui unissent la Mostra à la France, Alberto Barbera rappelle qu'ils ont traversé le XXe siècle et ses soubresauts. "Les années trente ont été conflictuelles avec la création du festival de Cannes en réaction à l'emprise mussolinienne et fasciste exercée sur le festival de Venise". C'est en effet pour contrer une Mostra discréditée pour avoir récompensé en 1938, contre l'avis du jury, le film "Les Dieux du stade" soutenu par Hitler, que sera créé un an plus tard le festival de Cannes. La première édition aura toutefois lieu en 1946. Mais les rapports cinématographiques entre la France et l'Italie s'adouciront pour laisser place à une étroite collaboration importante jusqu'aux années 1970. Mais la collaboration n'empêche pas la rivalité. "Les festivals de Cannes et de Venise entretiennent un rapport de concurrence", admet Alberto Barbera, la Croisette ayant largement distancé le Lido.

"Le grand bouleversement de 1968 a fait perdre beaucoup de terrain à la Mostra, devenue alors une simple rétrospective, sans compétition - jusqu'à 1980  -, alors que Cannes s'est redressé dès l'année suivante", explique-t-il. Mais la Mostra a aussi souffert d'un cruel manque de moyens pour moderniser ses infrastructures qui datent de l'époque du "Duce". Résultat : des salles rénovées au compte-goutte, des constructions  provisoires, et surtout un projet phare de nouveau Palais du cinéma qui, six ans après la pose de la première pierre, n'a toujours pas été exécuté...

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