"Résistants oubliés", la BD qui met les combattants nord-africains en lumière
"Turcos" : c'est le nom que les Russes crièrent lors de la guerre de Crimée en prenant les Nord-Africains de l'armée française pour des Ottomans. C'est aussi le titre de la première bande dessinée de Kamel Mouellef qui rappelait l'histoire des Nord-Africains dans les guerres de l'armée française au XIXe siècle, à l'époque de l'Empire de Napoléon III, et au XXe siècle.
Si ce sujet est si cher à l'auteur, c'est parce qu'il est en lien avec sa propre histoire, ou plutôt celle de son arrière-grand-père, un tirailleur algérien mort au front en 1918.
Un devoir de mémoire
C'est après être parti à la recherche de la tombe de son aïeul, retrouvée dans un cimetière militaire, que Kamel Mouellef a décidé d'honorer la mémoire de ces oubliés de l'histoire. Son projet de BD est né en 2008, lors du match de foot France-Algérie au cours duquel La Marseillaise a été sifflée. "Je me suis dit que si ces jeunes savaient les sacrifices qu'ont fait leurs ancêtres pour défendre la France, ils auraient bien plus de respect. Alors j'ai voulu faire une BD, accessible à tous, pour transmettre cette histoire commune et contribuer à la cohésion sociale des Français, quelle que soit leur origine".
Un sujet tabou
Après "Turcos", préfacé par Yasmina Khadra, Kamel Mouellef a décidé cette fois d'évoquer le rôle des combattants étrangers, et notamment nord-africains, dans la Résistance française. Il faut croire que le sujet est toujours tabou car aucune maison d'édition ne souhaitait publier "Résistants oubliés". Seule la maison Glénat, à Grenoble, a accepté. "Il y a selon moi une volonté d'étouffement, une réécriture de l'histoire", dénonce l'auteur, président de l'association "Déni de mémoire".Des soldats aux oubliettes
Les destins qu'il retrace dans son nouvel ouvrage sont tirés de faits réels sur les tirailleurs algériens, marocains, sénégalais, tunisiens ou encore malgaches, déserteurs ou évadés de camps de prisonniers, qui ont gagné les rangs des FFI durant la Seconde Guerre mondiale pour aider la Résistance contre l'occupation allemande.Comme Rachid Bouchareb dans son film "Indigènes", sorti en 2006, Kamel Mouellef souhaite exhumer des oubliettes tous ces soldats qui ont participé aux combats de la Libération et qui ont pourtant laissé peu de place dans l'histoire officielle. Quasiment absents des manuels scolaires, ils furent 40.000 à être tués durant la guerre de 1939-1945.
A la lecture des BD de Kamel Mouellef, on pense à Léopold Sédar Senghor qui écrivait dans "Hosties noires" en 1948 : "On fleurit les tombes, on réchauffe le Soldat Inconnu. Vous, mes frères obscurs, personne ne vous nomme".
"Résistants oubliés" de Kamel Mouellef, Olivier Jouvray et Baptiste Payen
Editions Glénat
64 pages, 14,95 euros.
A lire également :
"Paroles d'indigènes : les soldats oubliés de la Seconde Guerre mondiale", de Isabelle Bournier et Marc Pottier
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