Visions mordantes ou poétiques à la 13e biennale d'art contemporain de Lyon
Depuis sa création en 1991, cette biennale définit un thème pour trois éditions successives: après "Transmission", qui a achevé le cycle débuté
en 2009, "La vie moderne" ouvre une nouvelle trilogie à travers des oeuvres qui interrogent notre "relation entre passé et présent" et "nous invitent à repenser notre rapport au temps", explique le directeur artistique Thierry Raspail.
"L'Enigme", du Chinois Liu Wei, accueille le visiteur, perdu dans ce labyrinthe, sur le site de la Sucrière, où se tient la principale des quatre expositions. Deux autres investissent le musée des Confluences et le musée d'art contemporain (MAC), tandis que les sculptures d'Anish Kapoor seront exposées au Couvent de la Tourette, édifié par Le Corbusier à Eveux (Rhône).
Reportage: Sylvie Adam, Isabelle Gonzales, Christophe Foulon, Olivier Bodson
"Si l'on n'est pas perdu, on ne peut pas faire de découvertes", assure à l'AFP le commissaire de l'exposition, l'Américain Ralph Rugoff, directeur de la Hayward Gallery de Londres, reconnaissant être lui-même "perplexe" face à une oeuvre d'un artiste qu'il ne connaît pas. Etranges murs en mousse jaune, parois tendues de toile militaire chinoise, armatures d'acier et globes volumineux tels des planètes énigmatiques: Liu Wei livre une métaphore des mégalopoles inhumaines. "Il cherche, pose les questions mais ne connaît pas les réponses", note M. Rugoff.
Immigration, identité nationale, société de consommation, disparités entre riches et pauvres, crise grecque sont autant de sujets ayant inspiré des artistes comme Kader Attia, avec "Réparation traditionnelle, blessure immatérielle"; Camille Blatrix et son "distributeur de billets parlant de la tristesse du monde". Ou encore le Néo-Zélandais Simon Denny et son inventaire de voitures et objets de luxe saisis en 2012 après l'interpellation de l'escroc Kim Dotcom.
'Musée de la Triche'
De loin, on dirait une cabane en carton pour sans-abri. Ce "monument dédié à la crise grecque" est en fait un marbre précieux sculpté dans le moindre détail par l'artiste grec Andreas Lolis pour dénoncer "le matérialisme" et le "vide de l'existence humaine". "Cette exposition permet d'affronter les problèmes avec imagination. Je souhaite que le visiteur se sente +énergisé+ en sortant et développe une façon différente de penser aux choses", souligne Ralph Rugoff.Balles de golf ou gants de boxe truqués, raquette de tennis à double cordage, baskets à ressorts... Dans son "musée de la Triche", Julien Prévieux expose théâtralement ces inventions qui ont permis à certains athlètes de contourner les réglements:
"C'est l'aspect corrosif de notre société compétitive", souligne le commissaire.
Ponctuellement, l'attention du visiteur est troublée par des rythmes aléatoires de batterie, déclenchés par une pluie de noyaux de cerise sur les peaux tendues de l'instrument: dans cette installation, l'artiste Céleste Boursier-Mougenot utilise comme détecteur "l'aura électromagnétique des portables des visiteurs" à leur passage. "Je ne dénonce rien! Je fais une proposition, c'est un message de liberté", dit-il.
Influence du matérialisme occidental? Au Mac, autre lieu d'exposition, l'artiste chinois He Xiangyu expose en vitrine une étrange sculpture composée de résidus informes de 27.000 litres de... Coca-Cola, longuement bouillis. "L'icône transformée de notre modernité réduite à l'état de déchets", note Thierry Raspail.
Considéré comme l'un des plus grands sculpteurs contemporains, Anish Kapoor exposera lui au Couvent de la Tourette édifié dans les années 50 par Le Corbusier, dont c'est le 50e anniversaire de la mort. Des oeuvres récentes "évoquant la chair et les entrailles" ainsi qu'un "grand miroir d'aluminium circulaire d'une pureté donnant une idée de perfection", selon le frère Marc Chauveau, commissaire de l'exposition.
Inaugurée hier soir soir par la ministre de la Culture Fleur Pellerin, la Biennale se tient jusqu'au 3 janvier. La dernière édition avait attiré plus de 200.000 visiteurs.
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