Cet article date de plus de six ans.

Rammellzee exposé à New York : du street art aux guerriers futuristes

Dix ans après sa mort, une première rétrospective de Rammellzee, à l'espace Red Bull Arts New York, se penche sur l'œuvre de cette figure du New York des années 1980 (à voir jusqu'au 26 août). Objectif : révéler au grand public cette légende du street art, rappeur, compositeur, graffeur, peintre, plasticien et théoricien cosmique, qui fut aussi un proche de Jean-Michel Basquiat.
Article rédigé par franceinfo - franceinfo Culture (avec AFP)
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
L'exposition de Rammellzee au Red Bull Arts New York (3 mai 2018)
 (Hector Retamal / AFP)

A l'heure où le street art se fraie un chemin jusque dans le salon de monsieur tout le monde, où un tableau de Jean-Michel Basquiat vaut plus de 100 millions de dollars, Rammellzee, qui fut pourtant un personnage incontournable du New York bouillonnant des années 1980 et une figure culte du street art, manque à l'appel. Avec cette rétrospective de l'artiste décédé en 2010, l'espace Red Bull Arts New York veut le faire connaître aux Américains.
 
"Rammellzee est peut-être le plus grand street artist dont vous n'ayez jamais entendu parler", suggérait la maison d'enchères Sotheby's l'an passé, à l'occasion d'une vente à New York, sur celui dont le nom d'origine s'est perdu dans la légende.
 
Comme beaucoup d'aspirants artistes de son époque, l'adolescent de Far Rockaway, au fin fond du Queens, s'est fait la main à la fin des années 1970 avec une bombe sur des rames de métro.

Dans les galeries dès le début des années 1980

Mais bien vite, les lettres disparaissent au profit de figures abstraites, des compositions qui trouvent leur place dans des galeries dès le début des années 1980, voire au prestigieux musée Boijmans Van Beuningen de Rotterdam dès 1983.
 
Avec son look indéfinissable, des blazers aux manches découpées aux multiples paires de lunettes à montures blanches superposées, le jeune métis fascine le monde de l'art contemporain et du hip-hop.
 
Il rappe, et Basquiat produit son titre "Beat Bop" et en signe la pochette. Le titre sera samplé par les Beastie Boys et Cypress Hill. Rammellzee tourne et apparaît furtivement dans le film culte "Stranger Than Paradise" de Jim Jarmusch.
La rétrospective de Rammellzee au Red Bull Arts New York (3 mai 2018)
 (Hector Retamal / AFP)


L'invention d'un monde de "gothique futuriste"

Mais alors qu'il pourrait se laisser porter par la vague qui emmène déjà Basquiat jusqu'aux sommets, Rammellzee tourne le dos au milieu de l'art et mute : il invente le concept de gothique futuriste et crée sa propre mythologie, basé sur un traité formel.
 
Il se retire dans son studio de Tribeca, baptisé Battlestation, où il matérialise cet univers en fabriquant les "Letter Racers", des lettres géantes montées sur des skateboards, qui symbolisent la possibilité de libérer le langage et d'en faire un outil d'émancipation.
 
Il y a aussi les "Garbage Gods", des figurines créées, comme les "Letter Racers", avec des matériaux de récupération, avec d'un côté les "Recyclers" (recycleurs), et de l'autre les "Trashers" (ceux qui jettent).
 
A partir des années 1990, Rammellzee apparaît souvent en public déguisé en guerrier futuriste, mi-samouraï, mi-Dark Vador.

Loin du marché de l'art

Jusqu'à sa mort en 2010 d'une maladie cardiaque, à 49 ans, il restera ainsi dans ce monde imaginaire, loin des contingences du marché de l'art ou des tendances du moment.
 
"Notre plus grand défi, c'était de trouver un moyen d'appréhender cet artiste aux multiples facettes, ce personnage, ce mythe et de raconter une histoire qui traduise ses intentions", explique Max Wolf, conservateur de l'espace Red Bull Arts New York, qui accueille jusqu'au 26 août cette rétrospective ouverte depuis le 4 mai.
 
Les pièces proviennent pour moitié environ de collections privées et pour le reste de la famille de Rammellzee.
 
"Les Etats-Unis connaissent mal ce travail, qui a rejoint des collections en Europe et n'a plus été vu ensuite", souligne Max Wolf. "Donc c'était important de ramener tout ça pour le présenter ici."
 
"Il avait un but", poursuit le conservateur de cette grande galerie de Chelsea, "il voulait accomplir une somme de travaux pour achever cet ensemble de gothique futuriste. Il l'a terminée et s'en est allé".

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.