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Jordanie : le street art pour égayer les rues d'Amman

Leur nombre ne dépasse pas la dizaine, mais cette poignée de graffeurs travaille d'arrache-pied pour redonner vie à des murs sombres à Amman et contourner les tabous d'une société conservatrice pour que leur art ait sa place en Jordanie.
Article rédigé par franceinfo - franceinfo Culture (avec AFP)
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La street artiste Suha Sultan à Amman (16 décembre 2017)
 (Khalil Mazraawi / AFP)

Depuis leur apparition il y a une dizaine d'années, les graffitis se sont multipliés dans le centre de la ville, mais surtout à Jabal Amman et Jabal al Lweibdeh, deux des plus vieux quartiers de la capitale jordanienne, habités en grande partie par des étrangers.
 
Des dessins d'animaux, de fleurs, de plantes ou de visages humains sont ainsi progressivement apparus sur les murs de ces quartiers, leurs longs escaliers en pierre et leurs trottoirs.
 
Amman, qui compte quelque quatre millions d'âmes, a été bâtie sur sept collines qui ont donné leur nom à ses principaux quartiers.

Une rue d'Amman, relookée par les street artistes
 (Khalil Mazraawi / AFP)

Egayer la ville

"Notre ville est belle mais elle a encore besoin d'être égayée, colorée", assure Suhaib Attar, le plus connu des graffeurs.
 
Dans un parking automobile à Jabal Amman, l'artiste de 25 ans, un seau de peinture à la main, oeuvre à "transformer ces grands murs de béton sombres en une sorte de tableau expressif plein de vie".
 
Signe toutefois que cet art peine à s'imposer comme moyen de libre expression en Jordanie, Suhaib Attar rappelle qu'il préfère ne pas évoquer dans ses graffitis des sujets politiques ou religieux.
 
"J'évite ce genre de thème pouvant choquer certaines personnes qui ne comprennent pas encore cet art", ajoute l'étudiant coiffé de dreadlocks.
Suhaib Attar, étudiant et street artiste, à Amman, Jordanie (16 décembre 2017)
 (Khalil Mazraawi / AFP)


Des autorisations difficiles à obtenir

Son avis est partagé par Suha Sultan, 20 ans, étudiante à la faculté des Arts. Elle se rappelle d'un jour où elle a été vivement interpellée par des passants alors qu'elle s'adonnait à sa passion du street art avec des amis.
 
"Je dessinais un grand portrait d'un homme d'une tribu lorsque ils m'ont sermonnée parce que j'étais sur une échelle au milieu d'hommes et m'ont interrogée sèchement sur le sens de mon graffiti", raconte la jeune fille aux yeux verts qui confie qu'elle adore dessiner depuis son plus jeune âge.
 
Pour elle, Amman est remplie de murs sans âme auxquels on doit insuffler de la vie. "Mais ce n'est pas simple car pour faire des graffitis on a besoin d'autorisations préalables de la municipalité ou du propriétaire de l'immeuble, on essuie le plus souvent un refus et la société nous accepte peu", explique-t-elle.
Peinture murale au coin d'une rue d'Amman, Jordanie
 (Khalil Mazraawi / AFP)

Des "lignes rouges" à ne pas franchir dans une société traditionaliste

Wissam Chadid, un graffeur de 42 ans, considère même qu'il existe des "lignes rouges" à connaître dans une société traditionaliste où la création artistique est généralement incriminée. "On peint la nature, des animaux, des portraits, mais on ne touche pas à toutes les questions liées à la morale", dit-il.
 
"Avant, il n'y avait sur les murs d'Amman que des noms de clubs (de football), des numéros de téléphone ou des messages personnels de jeunes garçons à leurs amies. Aujourd'hui on essaie de vulgariser notre art", affirme Wissam, occupé à réaliser le visage d'une femme.
 
Ainsi, petit à petit, le street art fait son chemin dans la capitale. "Il rajoute des couleurs à cette ville dont les immeubles se ressemblent tous d'une certaine façon", se félicite Phoebe Carter, une Américaine qui fait des études d'arabe dans le royaume.
 
"Quand je passe le matin près d'un mur avec de beaux graffitis, cela me remplit d'énergie positive pour le restant de la journée", affirme de son côté Karim Saqr, un Jordanien de 22 ans.
 

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