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Le dissident chinois Ai Weiwei expose enfin en toute liberté à Londres
Une rétrospective majeure de l'artiste dissident chinois Ai Weiwei, libre de voyager depuis deux mois, ouvre samedi 19 septembre à la Royal Academy of Arts (RA) de Londres, explorant son oeuvre subversive et dénonciatrice des violations des droits de l'Homme en Chine.
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Cette exposition londonienne est tout un symbole pour Ai Weiwei: c'est la première en cinq ans dont il a pu superviser en personne l'installation, ayant récupéré en juillet son passeport confisqué en 2011 par les autorités chinoises. "Il dit que l'émotion de revenir à Londres (...) est extraordinaire", rapporte Tim Marlow, directeur artistique de la RA. "La dernière exposition publique de ses oeuvres à laquelle il a pu assister fut "Sunflower Seeds" à la Tate Modern de Londres, entre octobre 2010 et mai 2011.
La présence du dissident chinois dans la capitale britannique est loin de passer inaperçue: n'importe quel passant jetant un oeil dans la cour de la RA verra son imposante sculpture "Tree", huit arbres reconstitués à partir de morceaux d'arbres morts du sud de la Chine, figurant notamment la diversité ethnique du pays. A l'intérieur, l'exposition occupe onze salles organisées thématiquement autour d'un projet d'Ai Weiwei, d'une période de sa vie ou d'un matériau.
La plus grande et la plus impressionnante de ces pièces est consacrée à son travail autour du tremblement de terre au Sichuan en 2008: au mur, deux énormes panneaux listant le nom de chacun des quelque 5.000 écoliers ayant péri dans la catastrophe à cause d'établissements mal construits; au sol, une gigantesque sculpture appelée "Straight", faite de 90 tonnes de barres d'acier d'armature récupérées clandestinement des bâtiments en ruines et redressées dans leur forme initiale.
C'est ce travail de mémoire, réalisé avec l'aide de dizaines de volontaires sur le terrain, qui lui a tout particulièrement attiré les foudres des autorités chinoises, opaques sur le nombre de morts et les causes du désastre.
"Son travail a presque toujours une référence sociale et politique et même dans les oeuvres qui ne semblent pas en avoir, il y a une connotation politique", explique Tim Marlow. A l’inverse, "même dans les oeuvres les plus explicites, comme « Straight », il y a aussi une dimension de transformation poétique" des matériaux. La plupart des oeuvres présentées à la RA possèdent cette double entrée. Ainsi de "Fragments", qui est à la fois un ré-assemblage de morceaux d'un temple ancien mais aussi, vu d'en haut, une carte de la Chine. Les visiteurs peuvent circuler librement entre les pieds de cette sculpture massive, qui renvoie aux entraves à la liberté de circulation en Chine. Jusqu'aux matériaux servent à dénoncer. Ils ne sont jamais choisis au hasard, explique Adrian Locke, commissaire de l'exposition, soulignant que le marbre blanc utilisé par l'artiste pour plusieurs de ses oeuvres provient de la même carrière que celui ayant servi pour la Cité interdite mais aussi pour le mausolée où repose Mao Tsé-toung sur la place Tiananmen.
C'est dans l'avant-dernière pièce de l'exposition qu'Ai Weiwei relate sa détention de 81 jours dans un lieu inconnu au printemps 2011, via six scènes reproduites dans d'énormes boîtes en métal, que le visiteur peut découvrir par de petites ouvertures. Dans cette œuvre présentée pour la première fois à la biennale de Venise de 2013, "on le voit se doucher, dormir, manger, aller aux toilettes, avec à tout moment un ou deux gardes à moins d'un mètre de lui", décrit Tim Marlow. "Je vois ça comme une sorte de chemin de croix". Aucune des oeuvres d'Ai Weiwei, qui sont exposées à la Royal Academy of Arts de Londres jusqu'au 13 décembre, ne retournera en Chine, a confié le directeur artistique de la RA. « Si vous voulez que vos oeuvres soient exposées, vous devez être très prudent", avait expliqué Ai Weiwei lors d'une conférence de presse à Londres vendredi dernier. "Il y a toujours de la censure et de l'auto-censure là-bas".
Référence politique
La plus grande et la plus impressionnante de ces pièces est consacrée à son travail autour du tremblement de terre au Sichuan en 2008: au mur, deux énormes panneaux listant le nom de chacun des quelque 5.000 écoliers ayant péri dans la catastrophe à cause d'établissements mal construits; au sol, une gigantesque sculpture appelée "Straight", faite de 90 tonnes de barres d'acier d'armature récupérées clandestinement des bâtiments en ruines et redressées dans leur forme initiale.
C'est ce travail de mémoire, réalisé avec l'aide de dizaines de volontaires sur le terrain, qui lui a tout particulièrement attiré les foudres des autorités chinoises, opaques sur le nombre de morts et les causes du désastre."Son travail a presque toujours une référence sociale et politique et même dans les oeuvres qui ne semblent pas en avoir, il y a une connotation politique", explique Tim Marlow. A l’inverse, "même dans les oeuvres les plus explicites, comme « Straight », il y a aussi une dimension de transformation poétique" des matériaux. La plupart des oeuvres présentées à la RA possèdent cette double entrée. Ainsi de "Fragments", qui est à la fois un ré-assemblage de morceaux d'un temple ancien mais aussi, vu d'en haut, une carte de la Chine. Les visiteurs peuvent circuler librement entre les pieds de cette sculpture massive, qui renvoie aux entraves à la liberté de circulation en Chine. Jusqu'aux matériaux servent à dénoncer. Ils ne sont jamais choisis au hasard, explique Adrian Locke, commissaire de l'exposition, soulignant que le marbre blanc utilisé par l'artiste pour plusieurs de ses oeuvres provient de la même carrière que celui ayant servi pour la Cité interdite mais aussi pour le mausolée où repose Mao Tsé-toung sur la place Tiananmen.
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