Les 65 ans de Magnum Photos à Arles : l'agence fait de la résistance
Fondée en 1947 par Robert Capa et Henri Cartier-Bresson entre autres, l'agence est une coopérative détenue par une soixantaine de photographes. Elle est basée à Paris, New York, Londres et Tokyo. Cette année, c'était au tour du bureau de Londres d'organiser l'assemblée générale de ses membres. Mais par crainte d'un renchérissement des coûts avec les Jeux Olympiques, Magnum a jeté son dévolu sur Arles, où démarrent lundi les Rencontres photographiques, dirigées par François Hébel, ancien de Magnum. Depuis vendredi et jusqu'à lundi soir, les photographes de Magnum sont réunis dans le garage d'un des hôtels du centre pour examiner les comptes annuels et décider des projets à venir. Ils sélectionnent également les postulants qui aspirent à entrer dans cette agence mythique restée indépendante.
Elliott Erwitt, Josef Koudelka, Martine Franck, Raymond Depardon, Martin Parr ... Magnum rassemble de grands noms de la photographie, mais aussi des photographes plus jeunes élus ces dernières années. Le processus d'admission se fait par paliers (nommé, associé, membre) sur plusieurs années. Une fois élu membre, le photographe devient actionnaire à part égale de la coopérative, à vie s'il le souhaite. Une sorte de famille très internationale où l'on s'aime et où l'on se dispute mais que l'on quitte rarement. Pourtant, quel peut-être son avenir au XXIe siècle? "Magnum est tellement anachronique que cela devient sa chance", explique Lorenza Bravetta, directrice pour l'Europe continentale chez Magnum Photos. L'originalité de Magnum ne tient pas seulement à sa structure de coopérative, choisie par ses fondateurs pour permettre aux photographes de garder le contrôle sur les droits de leurs photos. Son "approche" est différente dans un monde où l'on consomme un flot d'images instantanées.
Magnum, agence humaniste, documente les archives de demain. "En temps de crise, Magnum résiste car ses photographes partagent une vision commune de leur mission qui est de documenter la société contemporaine pour créer les archives de demain", déclare Lorenza Bravetta. "C'est une agence de photographie humaniste, qui met l'homme et le social au centre de son travail", ajoute-t-elle. Le photographe de Magnum est rarement sur place le jour où survient un événement. Il arrive le lendemain ou quelques mois après pour saisir les incidences sur le pays. Ou bien il anticipe comme le Belge Carl De Keyser qui travaille sur les zones à risque d'inondation en Europe.
Pour survivre, l'agence a vendu près de 200 000 clichés originaux au fonds d'investissement privé de Michael Dell, fondateur du groupe informatique Dell. Magnum a en effet traversé des années difficiles récemment. Les photographes ont également accepté de recruter un président exécutif, Giorgio Psacharopoulos, pour "rentabiliser un peu" la structure. "Le but est d'être à l'équilibre, de ne pas perdre de l'argent tout en permettant aux photographes de continuer à produire", indique Lorenza Bravetta. Le photographe touche en moyenne 50% des revenus générés par son travail, l'autre moitié allant à la coopérative. "Certains travaillent plus que d'autres, mais tous disposent de la même qualité de services", indique Lorenza Bravetta. "Personne n'aime cette règle du 50%. Mais c'est la seule façon de faire tourner le business", déclare le photographe britannique Peter Marlow, chez Magnum depuis 1981. Il apprécie le mélange de générations au sein de l'agence, mais reconnaît que les femmes ne sont pas assez représentées.
L'agence Magnum Photos très présente à Arles cette année : des rencontres avec sept photographes de l'agence, des conférences et des projections de films, et une exposition, "Gitans", photographies de Josef Koudelka prises entre 1962 et 1971.
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