Le Prix Pulitzer à un photographe de l'AFP
L'enfant "n'arrêtait pas de hurler"
Massoud Hossaini, 30 ans, photographe du bureau de l'AFP dans la capitale afghane, couvrait une procession chiite le 6 décembre dernier lorsqu'un kamikaze s'est fait exploser.
"Immédiatement, j'ai vu de nombreux corps par terre, beaucoup de gens en pleurs, d'autres prenaient des photos ou des films avec leurs téléphones portables, des gens criaient +A mort Al-Qaïda!+, +A mort les talibans!+", raconte le photographe. L'attentat avait fait près de 70 morts, le plus meurtrier en Afghanistan depuis juillet 2008.
"Je me suis tourné et j'ai vu la petite fille. Quand Tarana s'est rendue compte de ce qui venait d'arriver à son frère, ses cousins, ses oncles, sa mère, sa grand-mère, les gens autour d'elle, elle ne s'arrêtait pas de hurler. Elle a fait d'autres choses mais sur mes photos, elle ne fait que hurler. Cette réaction de choc, c'est ce que je voulais montrer." C'est elle qui figure sur la photo qui a valu le Pulitzer à Massoud Hossaini.
La petite afghane du cliché va mieux
Mardi, un journaliste de l'AFP est venu prendre des nouvelles de "la petite afghane à la robe verte". Elle dont la photo a fait le tour du monde vit dans le deux pièces d'une maison branlante du vieux Kaboul. Elle s'appelle Tarana Akbari et est âgée de 11 ans.
La peur continue de l'assaillir régulièrement, ce souvenir du jour maudit revient la hanter comme un fantôme de jour comme de nuit, mais elle dit aller mieux.
Elle s'occupe de ses deux petites soeurs, blessées dans l'attentat. La bombe a également laissé des cicatrices sur ses bras et ses jambes. Tarana boîte depuis ce jour là. Elle ne va plus à l'école, car sa jambe lui fait trop mal. Mais elle espère bientôt "aller mieux et y retourner". Son rêve ? Enseigner un jour sa langue, le dari.
Le lauréat est lui aussi un enfant de la guerre
Massoud Hossaini, déjà distingué pour ce même cliché en février au World Press Photo Award 2011, est un enfant de la guerre qui n'a connu que l'exil et le fracas des armes. "Je suis né au mauvais endroit, l'Afghanistan, j'ai grandi au mauvais endroit, l'Iran, (et) je vis au mauvais endroit, Kaboul. J'attends de voir ce que l'avenir me réserve", dit-il.
La photo, "je ne la regarde plus parce que mon coeur bat plus vite et me ramène à mes émotions ce jour-là", dit-il. Le Pulitzer, "cela représente plus qu'une récompense, parce que je sais que je suis devenu le porte-voix des Afghans, de ceux qui ont perdu la vie dans cet attentat suicide et pour toutes les victimes de la guerre".
"Avant, j'étais juste un photographe et eux des gens, des sujets (...). Désormais, tout ce qui les affecte m'affecte aussi".
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