Ange ou démon ? Voyage dans l'univers torturé de l'écrivain Joris-Karl Huysmans au Musée d'art moderne de Strasbourg
Le Musée d'art moderne et contemporain de Strasbourg met en lumière l'un des écrivains les plus complexes de la fin du XIXe siècle. Entre ombre et lumière, Joris-Karl Huysmans a surtout été un grand témoin de son époque.
Il est le reflet d'une époque à la frontière entre deux siècles. Tiraillé entre l'attrait du progrès et le charme mystérieux de l'occulte, Joris-Karl Huysmans illustre parfaitement ce XIXe siècle crépusculaire qui s'interroge sur la nature de l'Homme, entre ombre et lumière. Tour à tour écrivain naturaliste puis décadent, l'artiste a été le témoin éclairé des grands mouvements littéraires et picturaux de son temps.
L'exposition imaginée en partenariat avec le Musée d'Orsay se présente un peu comme un cabinet de curiosités, concept très à la mode à la fin du XIXe siècle. Répartis sur dix salles aux ambiances très différentes au Musée d'art moderne et contemporain de Strasbourg (MAMCS), des objets précieux ou de pacotille, des oeuvres d'art, mais aussi des photos et des livres bien sûr, retracent le parcours torturé de Joris-Karl Huysmans. Descendant d'une famille de peintres flamands (dont le plus illustre est Cornelius Huysmans), Charles Marie Georges Huysmans de son vrai nom fait ses débuts littéraires en tant que romancier naturaliste avant de se tourner vers le symbolisme et la décadence. Ami de Maupassant et de Zola dont il fréquente le salon, l'écrivain, également critique d'art, jette un regard acerbe sur ses contemporains.
À travers des oeuvres de Degas, Manet ou Moreau (prêts des musées d'Orsay et de l'Orangerie), le visiteur découvre la peinture de l'époque à travers les yeux d'Huysmans qui recherche avant tout le réalisme. "Lui, il veut voir la vie", explique la conservatrice du MAMCS, Estelle PIetrzyk, "y compris dans ses travers. Il n'y a pas que des scènes réjouissantes, mais il veut la voir telle qu'elle est." Une quête de vérité qui n'empêche pas Huysmans de se tourner, comme beaucoup à l'époque, vers l'occultisme voire le satanisme. Une salle est consacrée à cet aspect plus sombre de l'artiste.
L'exposition, à la fois chronologique et thématique, se referme logiquement sur le dernier chapitre de la vie de Joris-Karl Huysmans, celui de la rédemption. Atteint d'un cancer à la mâchoire (auquel il succombera en 1907 à l'âge de 59 ans) l'artiste se tourne vers la religion avec notamment une passion presque obsessionnelle pour le célèbre retable d'Issenheim. La légende veut d'ailleurs qu'il soit mort avec entre les mains une photo de l'oeuvre.
"L'oeil de Huysmans, Degas Manet, Moreau" au Musée d'art moderne et contemporain de Strasbourg, jusqu'au 17 janvier 2021.
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