Bêtes de sexe : le Palais de la découverte expose la sexualité animale
Le grand argus mâle, une espèce de faisan équatorial, a une parure extraordinaire : ses plumes composent des motifs somptueux et sa queue est interminable. A tel point que Charles Darwin s’est demandé comment cet oiseau pouvait trouver sa place dans l’évolution. Il ne semble pas des plus aptes à résister à la sélection de la nature. Il « a donné l’idée à Darwin de la sélection sexuelle » : celle qui « sélectionne le plus apte à se reproduire et à transmettre ses gènes », explique Marie Canard, responsable de l’unité Sciences de la vie d’Universcience, qui réunit le Palais de la découverte et la Cité des Sciences.
Un spécimen empaillé du grand argus, ailes déployées, ouvre l’exposition. Il est emblématique du thème central de l’exposition, le rapport entre sexualité et évolution, poursuit la responsable. Comment la façon dont une femelle choisit un mâle, ou encore comment les mâles sont en concurrence pour une femelle permet-elle le maintien et l’évolution des espèces ?
Des parades sexuelles plus élaborées les unes que les autres
Le grand argus reviendra dans un film qui montre d’extraordinaires parades sexuelles, souvent d’oiseaux, qui sont les spécialistes du genre : danses, battements d’ailes et roucoulades diverses…
L’exposition rassemble des supports variés pour raconter les petites histoires sexuelles des animaux, des pucerons aux girafes. Une centaine de spécimens naturalisés sont venus du Natural History Museum de Londres, accompagnés de cartels explicatifs.
Des films montrent divers animaux se faisant la cour, sur la terre ou au fond des mers, s’accouplant ou se combattant pour obtenir les faveurs de leur belle.
La vie sexuelle des mantes religieuses par Isabella Rossellini
"Green Porno": la sexualité animale vue par Isabella Rossellini
A ne pas manquer, la série « Green Porno », de petits films hilarants où Isabella Rossellini, déguisée en mante religieuse, en escargot ou en canard raconte de façon crue et humoristique la sexualité de ces animaux.
La reproduction n’implique pas forcément le sexe : une espèce de lézard se reproduit par parthénogénèse : les femelles ont éliminé les mâles et donnent naissance uniquement à des femelles. Elles ont juste besoin de simuler un accouplement pour stimuler l’ovulation. Chez les pucerons, reproduction sexuée et asexuée coexistent : l’été, les femelles se multiplient par parthénogénèse, avant une reproduction sexuée à l’automne avec des mâles.
Pour les oiseaux mâles, il s’agit de se faire remarquer : c’est au coq qui aura la plus belle crête, signe de bonne santé et donc de meilleure reproduction.
Saviez-vous que certains mâles donnent des cadeaux à la femelle qu’ils courtisent, généralement sous forme de nourriture ? Pour les oiseaux, les plus beaux cadeaux prouvent que le mâle sera capable de nourrir les petits. Chez les araignées, c’est moins idyllique : le mâle, plus petit, arrive sur la pointe des pieds sur la toile de la femelle, qui menace de le croquer tout cru. En lui offrant à manger, il détourne son attention et la féconde vite fait avant de se sauver.
Des animaux hermaphrodites, homosexuels ou qui changent de sexe
Il y a donc les stratégies pour conquérir la belle. Il s’agit ensuite, pour certains, de s’assurer de la paternité de la descendance. Le sperme des hérissons se solidifie dans le vagin de la hérissonne, empêchant toute autre pénétration. Le criquet pèlerin, après la fécondation, ne lâche plus sa femelle. Ca s’appelle le gardiennage. Les phasmes, aussi, sont des « pots de colle ».
On trouve tout dans le règne animal : madame hyène qui tolère le mâle sur son territoire juste pour la fécondation. Monsieur jacana mâle qui couve les œufs pendant que la femelle va s’accoupler avec d’autres. Le crapaud accoucheur mâle qui porte les œufs.
On savait que les escargots sont hermaphrodites. Ce qui est moins connu, ce sont les animaux qui changent de sexe au cours de leur vie.
L’amour libre existe chez certains singes : chez les chimpanzés, tout le monde s’envoie en l'air avec tout le monde. Quant aux bonobos, au vaste répertoire érotique, ils semblent ne penser qu’à ça. La sexualité animale est généralement liée à la reproduction, mais ces singes prouvent que ce n’est pas toujours le cas.
Et l'homme dans tout ça ?
L’homosexualité est beaucoup plus courante qu’on le croit dans le règne animal, fait remarquer Marie Canard : on la trouve dans 450 espèces. Elle concerne 20% des mâles chez les mouettes rieuses, qui peuvent faire un nid et adopter un œuf trouvé. Chez les goélands, 3% des femelles forment des couples. Cette homosexualité est souvent temporaire.
Et l’homme dans tout ça ? L’exposition se termine avec un questionnement du visiteur tout à fait soft : on lui demande s’il croit à « l’amour vrai », s’il pense que l’humain doit être monogame, si « l’amour sans sexe vaut mieux que les sexe sans amour ». Il pourra accrocher sur un mur des petits mots pour partager ses expériences, puisque chez les hommes, « le langage est un élément vital » de l’affaire.
Et si l’être humain est une « bête de sexe », on rappelle que ses choix en matière de sexualité reflètent une quantité de comportements et d’attitudes.
L’exposition, élaborée en collaboration avec des biologistes, des spécialistes du comportement animal et des conservateurs du Natural History Museum de Londres, a déjà été présentée à Londres sous le titre Sexual Nature. Elle est ouverte aux enfants à partir de dix ans « en raison de ses contenus explicites ».
"Bêtes de sexe, la séduction dans le monde animal, exposition temporaire, ludique et décalée", Palais de la Découverte, avenue Franklin D.Roosevelt, 75008 Paris
du 23 octobre 2012 au 25 août 2013
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