Argentine-France : une finale historique à plus d'un titre
De ce mois à Doha, on ne retiendra pas l’attrait touristique de la capitale du Qatar. La Coupe du monde, le football et ces 64 matchs à travers ces huit stades disséminés dans un rayon de 60 kilomètres auront en revanche marqué l’histoire. Tout comme le fera la finale entre l’Argentine et la France, dimanche 19 décembre au stade Lusail, coup de sifflet final de cette immense fête du ballon rond.
"Il n’y a jamais deux sans trois", glissait un Emmanuel Macron fier de sa formule après la demi-finale entre la France et le Maroc, confiant de voir les Bleus décrocher une troisième étoile. Mais le président de la République, qui sera une nouvelle fois présent à Doha pour la finale, va peut-être devoir se replonger dans les bouquins d’histoire du foot : l’adage s’applique aussi à l’Argentine, qui peut remporter un troisième titre dans la compétition, après 1978 et 1986, et se placer sur le podium des nations les plus sacrées derrière le Brésil (5 titres), l’Italie et l’Allemagne (4 titres).
Qui de Lionel Messi ou de Hugo Lloris aura la joie soulever le trophée à l’issue de la finale ? Dans les deux cas, l'histoire sera belle. Et elle sera grande. Non pas que la victoire de la France face à la Croatie il y a quatre ans n’avait rien de grand, mais un deuxième titre consécutif signifierait encore autre chose. Elle dessinerait, dans un contexte parfois difficile ces dernières semaines pour les Bleus, pour ne pas dire malchanceux avec des blessés et des malades, un authentique exploit du football moderne.
La France comme l'Italie et le Brésil ?
Par le passé, seuls l’Italie fasciste dans les années 1930 (1934, 1938) et le Brésil de Pelé au tournant des années 1960 (1958, 1962) ont réussi à enchaîner deux titres mondiaux. À chaque fois, deux capitaines différents ont soulevé le trophée. Hugo Lloris pourrait être le premier à le faire. Plutôt réservé de nature, le capitaine a évité d’y penser samedi, lors de la toute dernière conférence de presse de veille de match de la compétition.
Passé après lui, Didier Deschamps n’a pas eu le droit à une question sur le sujet, mais seul un sélectionneur a remporté la compétition deux fois : Vittorio Pozzo avec l’Italie. L’avenir de Deschamps est pour l’heure encore incertain et on le comprend : comment ne pas avoir les yeux et la tête rivés sur ce rendez-vous qui pourrait lui donner raison sur toute la ligne ?
Malgré tous les obstacles, le sélectionneur a su tenir la barre et forger, comme il sait le faire, un groupe de joueurs qui ne cesse de louer la bonne ambiance au sein du camp de base d’Al-Messila depuis un mois. Paradoxalement, on se demande pour le moment à quoi ressembleraient les célébrations de ces vieux briscards déjà vainqueurs en 2018 et de ces jeunes joueurs imperturbables et pas déstabilisés par l’enjeu malgré leur première participation à une Coupe du monde.
Messi le guide
"Il y avait plus de fous en 2018", a concédé Ousmane Dembélé, l’un de ces fous, vendredi. Se dégage de cette équipe une sérénité, et l’impression que les joueurs ne mesurent pas encore l’exploit qu’ils pourraient réaliser. Kylian Mbappé, qui pourrait devenir l’égal de Pelé - deux Coupes du monde à 23 ans -, en est le symbole. Discret dans les médias, absent sur les maillots des supporters dans les rues de Doha, le prodige de Bondy ne s’est pas éparpillé et est resté concentré pour tenter de remporter le Mondial, son "obsession".
Lionel Messi en a aussi fait une obsession. Si les Bleus viennent à perdre la finale, les supporters français pourront se consoler en observant avec tendresse la joie ultime de la Pulga. Sa carrière n’est pas terminée, l’Argentin est déjà une légende du football, mais cela ne lui suffit pas : la Coupe du monde est la seule compétition qui manque à son palmarès et cela se ressent depuis plusieurs semaines.
Le guide emmène avec lui une bande de gamins capables de s’adapter à n’importe quel adversaire. Des chiens fous à l’agressivité de tous les instants, enragés depuis le premier jour du Mondial et cette défaite d’entrée contre l’Arabie saoudite. Dans les tribunes, les hinchas ont déferlé sur Doha tout le mois, et espèrent y célébrer une nouvelle victoire. Comme en 1978 à domicile. Le stade Lusail, la "Bombonera de Doha", fera du bruit à 16 heures, mais pas pour soutenir les Français.
La finale idéale pour l'émirat
Cette finale marquera également la fin d’une aventure pour le Qatar, critiqué depuis de longues années pour l’organisation de cette Coupe du monde. Une nouvelle histoire débutera ensuite pour l’émirat, et il ne faudra pas oublier ces petites mains, ces travailleurs migrants croisés dans les rues de Doha. Ces invisibles qui espèrent que le Mondial aura changé leur vie d’une certaine manière. Pour l’émirat, le scénario est pour l’heure parfait : Messi et Mbappé, deux joueurs du Paris Saint-Germain, club détenu par le Qatar, vont s’affronter en finale de la plus grande compétition sportive de la planète le jour de la fête nationale.
Tellement parfait qu’il a eu raison des convictions de certains supporters, sortis de leur boycott pour suivre le parcours d’une équipe de France proche d’un exploit. La moindre des choses, pour eux, serait que les Bleus l’emportent. Mais un petit bonhomme, marqué du numéro 10 dans le dos, a d’autres plans pour son destin et celui de l’Argentine. Lui aussi veut se faire une place au panthéon.
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