"Un Contrat" : une pièce sur les tourments d'un tueur à gages, entre polar et psychanalyse
Romancier et scénariste pour Jacques Audiard ou sur "Les Soprano", Tonino Benacquista voit sa seule pièce à ce jour reprise au Studio Marie Bell à Paris.
Créé en 2001 avec Rufus et Jean-Pierre Kalfon, Un Contrat, unique pièce du romancier et scénariste à succès Tonino Benacquista (Saga, Malavita, De battre mon cœur s’est arrêté, Les Soprano) est reprise jusqu’au 21 mars avec Patrick Seminor et Olivier Douau, au Théâtre du Gymnase - Studio Marie Bell, à Paris.
Un contrat : un duel sous tension entre un tueur et un psychanalyste, où le bien et le mal, la filiation, la culpabilité et la rédemption, s’affrontent dans un suspense maintenu jusqu’à la dernière minute.
Progression dramatique
Dans le cabinet d’un psychanalyste (Patrick Seminor), un nouveau patient des plus retords (Olivier Douau) vient consulter. C'est à ses yeux le seul recours possible pour guérir les terribles maux de tête et crises d’angoisse qui le perturbent. Sa conduite peu amène poussent le thérapeute à le congédier, mais le tueur l'oblige à se soumettre à une "proposition qu'il ne pourra pas refuser". En trois séances il se révèle un tueur à gages torturé, confronté à lui-même.
Un canapé, un bureau avec fauteuil, un tabouret et un lampadaire. Sobre et codifié, le décor n’est qu’un cadre, mais il sera aussi l’objet d’une lutte de pouvoir entre le psy et le tueur. Le tueur tombe le masque dès le premier acte, ce qui n'empêche pas une progression dramatique et un suspense croissant.
Car l’angoisse s’installe dès l’arrivée du futur patient, par sa désinvolture assumée qui tourne à la provocation en soufflant le chaud et le froid, alternant la flatterie, le dénigrement ou la bravade. Ignorant du protocole psychanalytique, perturbé par le congé que lui inflige le thérapeute, le malfaiteur n’a plus que l'intimidation et la menace comme options. Car ce sont, face à cet homme qui sait s'exprimer, ses seuls éléments de langage.
Polar, psy et philo
Olivier Douau incarne par sa présence, son ton et son assurance, cette menace permanente dont est victime le thérapeute joué par Patrick Seminor, déstabilisé par ce patient singulier.
Et l'on n'est pas au bout des surprises. Le malfrat s'octroie le fauteuil du praticien, en le projetant sur le canapé destiné à ses patients. Une inversion des rôles de courte durée car la brute va se transformer en agneau sous les arguments du psy qui fait remonter à la surface les indices de son mal-être. L’image du père, l’échec d’une mission, un souvenir refoulé… autant de strates, de paliers, gravis jusqu’à une résolution inattendue.
La psychanalyse ouvre sur la philosophie. Tonino Benacquista, expose un cas d’école, sans jamais être sentencieux ou didactique. Il joue d’une situation ludique (le polar) pour interroger la condition humaine. Beau texte et acteurs talentueux servent cette pièce distrayante, sans négliger des intentions plus profondes. Une alchimie qui créée ce beau moment de théâtre.
Un Contrat
De Tonino Benacquista
Mise en scène : Stanislas Rosemin
Acteurs : Patrick Seminor et Olivier Douau
Jusqu’au 21 mars 2020
Théâtre du Gymnase - Studio Marie Bell, Paris 10e
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