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"Thomas joue ses perruques", une galerie de portraits drôles et grinçants au Théâtre du Rond-Point

Auteur et comédien, Thomas Poitevin porte sur scène des personnages cocasses, insupportables et attachants. Un défilé de névrosés et de râleurs inspiré de ses vidéos publiées sur Instagram.
Article rédigé par Ariane Combes-Savary
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 5min
Thomas joue ses preruques (GIOVANNI CITTADINI CESI)

Il y a les carrés plongeants, les boucles rousses désordonnées, les cheveux synthétiques ou en poil véritable, les franges fournies et les cheveux gris que les années ont décolorés. Ce sont les perruques de Thomas Poitevin, délicatement exposées sur leur tuteur, éclairées par une discrète lumière qui suggère plus qu'elle ne dévoile. Une quinzaine de tignasses comme autant de personnages. Voilà le décor de ce seul en scène drôle et inspiré qui fait salle comble au Théâtre du Rond-Point à Paris et tourne jusqu'au mois d'avril.

Des antihéros magnifiques et pathétiques

Les personnages incarnés par Thomas Poitevin dans Thomas joue ses perruques ont beau avoir chacun son style capillaire, ils ont en commun d'être des antihéros magnifiques et pathétiques. Des traits aussi attachants qu'agaçants et des névroses qui ressemblent beaucoup aux nôtres. On jurerait avoir déjà croisé Caroline, la trentenaire paumée, un brin ésotérique, Pascal le stagiaire en "revalorisation virile", Jordan, le schizophrène affectif amateur d'écureuils, Guislaine l'épouse esseulée qui n'ose la sincérité qu'une fois la nuit tombée et son mari endormi ou encore Aimé, le frère du marié, dont l'humour est si lourd qu'on aurait presque envie de lui couper le micro. C'est contemporain, acide et terriblement drôle, à l'image de cette courte apparition d'Elisabeth Borne flanquée d'un foulard et de lunettes noires, en mode incognito. 

Thomas Poitevin s'est inspiré de ses rencontres ou de petites phrases entendues ici ou là pour imaginer ses personnages. Des portraits pensés d'abord comme des caricatures pour provoquer le rire, auxquels il redonne toujours une touche d'humanité. L'art du contrepoint. L'humour, la cruauté et la tendresse mélangés.

Thomas joue ses perruques (GIOVANNI CITTADINI CESI)

Des sketchs d'abord testés sur Instagram

Créé en 2021, Thomas joue ses perruques est né en partie sur les réseaux sociaux. L'auteur et comédien Thomas Poitevin a lancé sa page instagram Les perruques de Thomas peu avant le confinement. De courtes vidéos de 3 minutes publiées régulièrement. "A l'époque, je n'avais pas de spectacle devant moi et je me suis dit que c'était bien de tester mes sketchs avec une petite communauté", confie le comédien.

C'était pour moi comme un laboratoire pour proposer certains types de personnages. Je m'étais mis comme objectif un millier de followers, l'équivalent d'une joile petite salle.

Thomas Poitevin

auteur et comédien

Le confinement change la donne et offre à l'humoriste un succès inattendu, il compte aujourd'hui 93 000 followers. "Ça m'a permis d'échanger avec des followers. Pendant le confinement c'était assez chouette, les gens se parlaient sur les réseaux sociaux", se souvient-il. Cette popularité soudaine lui a ouvert les portes d'une nouvelle production avec le Théâtre Sénart, scène nationale de Seine-et-Marne, et d'une tournée dans les scènes publiques. "Pour être franc, je ne m'attendais pas à refaire un spectacle. Instagram a été pour moi un tremplin. C'est vraiment un conte de fée", avoue-t-il presque gêné d'utiliser ce lieu commun.

La mise en scène de Thomas joue ses perruques est signée Hélène François, une camarade de promotion du Conservatoire du Xe arrondissement de Paris où Thomas Poitevin a étudié l'art dramatique au début des années 2000. C'est d'ailleurs elle qui a eu l'idée des perruques quand Thomas esquissait sa première galerie de portraits sur Instagram.

"Je cherchais un fil rouge qui me permette de créer une collection, raconte l'auteur. Hélène m'a suggéré cette idée. Je trouve que c'est un accessoire joyeux, très théâtral qui permet vraiment de changer une tête. J'aime beaucoup l'artifice au théâtre, j'aime beaucoup les gens apprêtés, déguisés. Quand je suis spectateur, plus les comédiens ont d'artifices, plus j'ai l'impression de voir la vraie personne qui est derrière."

D'une perruque à l'autre, Thomas Poitevin signe une épopée humaniste et réjouissante qui séduit bien au-delà des adeptes des réseaux sociaux. Et comme il a peur de s'ennuyer, le spectacle n'est jamais figé. Il n'est pas rare de voir débarquer sur scène une nouvelle création capillaire. En matière de chevelure, la variété est infinie.

"Thomas joue ses perruques", au Théâtre du Rond-Point à Paris jusqu'au 18 février, puis en tournée à travers la France et à Bruxelles

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