"Pourvu qu’il soit heureux" : Laurent Ruquier brise les tabous tenaces sur l’homosexualité
En vacances à Concarneau, les parents de Camille découvrent, à la Une de la presse people, la liaison de leur fils avec un acteur de série d’âge mûr. Si la mère (Fanny Cottençon) se montre tolérante et tendre, le père joué par Francis Huster, choqué, blessé dans sa virilité, exprime sa colère en un chapelet de clichés homophobes.
Reportage : M. Berrurier / J-C. Duclos / J. Michaan / O. Pergament
Réactions contrastées des parents
Laurent Ruquier construit sa pièce de manière astucieuse en faisant rejouer la même scène, mais en inversant les points de vue. Cette fois le père est plutôt fataliste et la mère, elle, culpabilise, s’interrogeant "sur ce qu’elle a pu faire de mal".Ruquier aborde de front la question de la révélation de l’homosexualité d’un jeune, jouant avec les clichés, qui selon lui perdurent : "Oui bien sûr hélas, plus que jamais !", lance Laurent Ruquier que nous avons interviewé. "Il suffit d’écouter les conversations, les manifestations, les débat entre opposants, les agressions homophobes". Et d’ajouter : "Quand le père dit ‘s’il faut l’aider on l’aidera’ (sous-entendu à le soigner), j’avais écrit ça avant que le pape dise à peu près la même chose à bord d’un avion…"
Selon Ruquier, les deux premiers actes correspondent aux deux hypothèses de réaction des parents imaginées par le fils. Cette intention de l’auteur ne nous a pas paru, à vrai dire, très claire.
En revanche la fin, amère, de ce qui demeure une comédie surprend : ce n’est pas forcément ce que le public attend de l’"amuseur" Ruquier. Mais c’est comme s’il fallait un événement dramatique pour sceller la réconciliation familiale.
Une pièce très personnelle
Ruquier dit avoir mis beaucoup de lui dans "Pourvu qu’il soit heureux" : "Beaucoup de moi et des gens que j’ai pu connaître. De moi surtout dans le dernier acte, dans tout ce que raconte le fils, là je me suis servi de mon propre vécu, de mon enfance. C’est ce que j’aurai pu raconter à mes parents si on avait abordé le sujet. Le fait notamment que je ne savais même pas ce qu’était un homosexuel, on ne m’en avait jamais parlé"."L’idée de la pièce c’est de dire qu’au fond il n’y a pas de stéréotypes chez les homosexuels comme chez les hétérosexuels, il y a toutes sortes de genre d’homos comme il y a toutes sortes de genre d’hétéros, c’est la vie et il faut accepter que chacun la vive comme il l’entend", dit l'auteur.
Un trio juste et émouvant
Steve Suissa signe une mise en scène élégante et efficace servie par un trio de comédiens parfaitement crédibles. Fanny Cottençon est une mère pleine de tact et d’humanité, Francis Huster excelle dans la mauvaise foi et la fureur. Il est très drôle dans le premier acte. Jeune débutant solaire, Louis Le Barazer tient bien sa partie face à des acteurs chevronnés.Au final on a ri, on a été touché, et même ému, et si l’on est parent on se demandera forcément comment on réagirait si notre fils nous apprenait qu’il est homo… Ruquier a réussi son pari : amuser en faisant passer des messages.
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