"Passeport" : la nouvelle pièce d’Alexis Michalik suit un jeune Érythréen sans-papiers dans une mise en scène épique

Les réfugiés et l’immigration clandestine sont devenus des sujets dramatiques majeurs au théâtre comme au cinéma. Alexis Michalik s’en empare avec souffle.
Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 2 min
"Passeport" d'Alexis Michalik au théâtre de la Renaissance, à Paris (2024). (ALEJANDRO GUERREO)

Alexis Michalik donne une ampleur scénique inattendue à Passeport qu’il a écrit, et met en scène au théâtre de la Renaissance, à Paris, jusqu’au 30 juin.

Passeport retrace le récit d’Issa, Érythréen au sortir de l’adolescence, prenant la route pour l’Angleterre. La pièce allie le grandiose à la misère dans une mise en scène aux dimensions cinématographique, sans images animées, mais un sens du groupe, de l’espace et du visuel qui portent le sujet.

Picaresque contemporain

Trouvé dans la "jungle" de Calais, et donné pour mort, Issa est amnésique, avec pour seule mémoire, son passeport. Sorti de l’hôpital, il se retrouve à la rue, et entame avec d’autres sans-papiers la quête d’un titre de séjour. Il est alors amené à se remémorer devant l’administration le parcours qui l’a mené jusqu’en Europe.

Sept comédiens et comédiennes dans des rôles multiples, des décors changeants, dont beaucoup d’extérieurs, exotiques et urbains, se succèdent dans un récit picaresque contemporain. On passe de l’hôpital au bord de l’autoroute, d’un conteneur habité au commissariat, et de la rue aux administrations... Mais l’on traverse aussi le désert et la mer dans Passeport. Aux antipodes d’un drame intime au cœur d’un deux-pièces cuisine à Paris, Passeport voit grand et Alexis Michalik pense large.

Damnés de la Terre

L’auteur-metteur en scène n’a pas fait appel à des têtes d’affiche pour ses acteurs. Normal pour incarner des anonymes. Les sept comédiens et comédiennes sur scène n’en forment pas moins un groupe, sans de réels premiers rôles, même si Issa (Jean-Louis Garçon) et Arun (Kevin Razy) sont un peu en avant. Un courant passe entre eux pour faire corps d’un groupe hétéroclite. Salutation au passage aux divers accents et langues qui traversent les dialogues, reflet d'une belle performance des comédiens. Ils sont des damnés de la terre, apatrides, pleins de vie, mais en quête d’identité.

Le dispositif scénique n’écrase pas le récit et la documentation sur le sujet nourrit la dramaturgie. Le hasard de la programmation voit la pièce représentée un mois après la sortie du film de Matteo Garrone, Moi Capitaine, sur un sujet similaire. Tous deux se rejoignent dans une approche épique, parfois au détriment de l’émotion. Mais le jeu de toute la troupe réchauffe les sentiments, jusqu'aux gendarmes dans leur bureau. L’écriture et la mise en scène d’Alexis Michalik remettent les pendules à l’heure de certaines convictions et nourrissent le débat, après le vote récent à l’Assemblée sur l’immigration. À l’heure d’une globalisation qui se cherche, Passeport convainc dans sa dramaturgie, reflet d'une réalité géopolitique majeure, pour laquelle l’auteur-metteur en scène créé une pièce originale et universelle.

"Passeport" d’Alexis Michalik
Mise en scène : Alexis Michalik
Avec : Christopher Bayemi, Patrick Blandin, Jean-Louis Garçon, Kevin Razy, Fayçal Safi, Manda Touré, Ysmahane Yaqini
Du mardi au samedi 21h, samedi 16h30, dimanche 17h
Théâtre de la Renaissance
20 boulevard Saint-Martin, 75010 Paris
Tél : 01 42 08 18 50

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