"Où sont les ogres ?" à Avignon : pour des enfants pas trop tendres !
Une femme (Catherine Vinatier) vit seule avec sa fille qui ne sort plus de sa chambre. Hannah (Julie Lesgages) passe son temps sur internet à échanger avec une inconnue, Angelica, qui la comprend comme une sœur. Mais à tout bout de champ Angelica s’endort et Hannah guette avec anxiété son écran, redoutant que son amie l’ait oubliée. Sa mère consulte alors un médecin…
Après "La fiancée de Barbe Bleue", adaptation libre du conte de Perrault, Pierre-Yves Chapalain creuse la figure de l’ogre, pour lui une métaphore de nos sociétés libérales où il est bon "d’avoir faim", "d’avoir les crocs" ! Mais qui évoque aussi le délicat passage de l’enfance à l’adolescence.
D’emblée, par sa mise en scène ambigüe, Chapalain nous installe dans l’inconfort : d’un côté la mère dans sa cuisine réaliste, de l’autre un grand espace sombre d’où peuvent naître de vrais cauchemars. Car Hannah que l’on ne voit pas au début, semble animée d’étranges envies… Le passage d’un cirque va rompre cet enfermement, d’autant que la fille du directeur n’est autre qu’Angelica (Boutaïna El Fekkak). Hannah va découvrir qu’on peut aussi se faire des amis dans la vraie vie.
Fantastique et préoccupations contemporaines
Peu à peu Chapalain dessine l’identité des personnages dans un univers qui mêle fantastique et préoccupations contemporaines. Il réussit très bien à montrer l’importance de l’intuition d’Hannah sur la transformation de son corps avant de mettre des mots sur cette évolution. Quant au père d’Angelica (Jean-Louis Coulloc'h), il se révèle être un ogre qui par mégarde, un soir de fête, a mangé son fils ! Angelica doit faire avec cette destinée familiale, elle-même croquerait bien le bras de son amie…Se construire un destin
Comment transcender l’héritage familial et résister au monde qui nous est imposé, l’importance de rencontrer quelqu’un qui vit la même chose que soi (on ne saisit pas vraiment qu’Hannah est, elle aussi, une ogresse !), autant de thèmes développés dans ce conte.Avec un message plein d’espoir : le père d’Angelica pour contenir ses pulsions n’est-il pas devenu ce grand chef de cuisine renommé qui donne tant de plaisir aux autres ?
Par son climat inquiétant et parfois déroutant, ses différents niveaux de lectures, "Où sont les ogres" n’est pas conseillé aux enfants de moins de 10 ans (même si Olivier Py dans son guide du jeune spectateur invite "l’adulte qui juge un peu vite que l’enfant est trop petit à ne pas devenir l’ogre qui dévore l’intelligence instinctive du jeune public" !) Reste que dans la fraicheur accueillante de la Chapelle des Pénitents Blancs, ce conte sanguin et philosophique capte résolument l’attention.
A la sortie nous croisons Rodrigue, Lazlo, Gabriel, et leur grand-mère.
Gabriel (à droite) : "J'ai bien aimé, l'ogre surtout". Rodrigue (8 ans à gauche), lui, a eu un peu peur". La grand-mère : "Nous allons souvent au théâtre, là nous allons discuter de l'histoire pour éviter les cauchemars !"
Le guide du jeune spectateur
Procurez-vous ce guide très bien conçu, avec le programme des pièces, un historique du festival, un jeu de piste, des visites commentées et de nombreux rendez-vous !
Autres pièces du "IN" destinées au jeune public :
- "Tristesse et joie dans la vie des girafes" de thomas Quillardet : 14, 15, 16, 18, 19 juillet
- "L'Imparfait" d'Olivier Balazuc : 22, 23, 25, 26 juillet
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