"La dame de chez Maxim" : la folie Feydeau orchestrée par Zabou Breitman
Après le succès du "Système Ribadier", Zabou Breitman retrouve Feydeau dans une de ses pièces les plus mythiques, "La dame de chez Maxim". C’est au théâtre de la Porte Saint-Martin, avec une troupe 5 étoiles emmenée par Micha Lescot et Léa Drucker en Môme Crevette.
Au lendemain d’une soirée bien arrosée chez Maxim, l’honorable Docteur Petypon trouve la Môme Crevette, danseuse au Moulin Rouge dans son lit. Quand son oncle arrive à l’improviste et le surprend en si charmante compagnie, Petypon n’a d’autre choix que de faire passer la Môme pour sa propre femme. Le franc-parler et la vitalité de la jeune femme vont semer la panique chez ces petits bourgeois.
Un chef d'oeuvre d'humour
Zabou Breitman installe ce chef d’oeuvre d‘humour dans un décor suranné aux couleurs éteintes. La chambre à coucher des époux Petypon, elle, est une alcôve protégée par des rideaux, comme une petite chapelle. Seules détonnent dans cet environnement finalement assez classique, les coiffures délirantes des deux époux.
On est d’emblée étourdi par cette machine de guerre à faire rire, où tout est toujours logique et vraisemblable. Une partition qui va crescendo, lorsque Petypon exporte son cauchemar en province, dans le château du Général où la Môme Crevette est bien sûr incontrôlable. Un deuxième acte complétement burlesque avec ses gourdes de provinces imitant les belles manières de la prétendue dame de Paris. "Et allez donc c’est pas mon père", la formule emblématique de la danseuse devenant la maxime favorite de ces rombières toutes incarnées, idées de mise en scène qui en vaut une autre, par des hommes (Eric Prat qui joue aussi le domestique y impose sa carrure avec beaucoup de drôlerie).
La vanité et la fausseté d'un monde
La mise en scène de Zabou Breitman a de belles trouvailles, soulignant la vanité et la fausseté de ce monde qu’elle situe "avant 1914". Elle est moins convaincante quand elle veut jouer le théâtre dans le théâtre en inscrivant sur grand écran une didascalie de Feydeau (autrement dit une indication de l'auteur jointe au texte) concernant le déplacement des acteurs.
Il y a du goût et de la poésie dans ce spectacle, mais parfois des baisses de rythme, qui font qu’on n’est pas emporté dans le tourbillon Feydeau comme on l’avait été dans Le Système Ribadier.
Une troupe homogène
D’une troupe homogène se détache en particulier l’hilarant couple Petypon : ce grand échalas de Micha Lescot joue les ahuris avec une force comique impayable, utilisant sa longue carcasse comme celui d’un pantin maladroit ballotté par la série de quiproquos et de rebondissements qui lui tombent dessus. Chaque mensonge en entrainant évidemment un autre. A ses côtés, une étonnante Anne Rotger dans le rôle de l’épouse Gabrielle, totalement dans la folie Feydeau dès la première minute. Très bien aussi, André Marcon en vieux militaire subjugué par la Môme Crevette. Un rôle emblématique incarné par Léa Drucker avec beaucoup de naturel et sans une once de vulgarité.
C’est ainsi, avec cette troupe joliment servi par leur metteuse en scène, que l’on passe au final un joyeux moment.
"La dame de chez Maxim" de Georges Feydeau
Mise en scène de Zabou Breitman
Théâtre de la Porte Saint-Martin
A partir du 10 septembre 2019
18 Boulevard Saint-Martin, 75010 Paris
01 42 08 00 32
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