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"Juste la fin du monde" à Avignon : qu’on en finisse

Jean-Charles Mouveaux avait déjà mis en scène "Juste la fin du monde" de Jean-Luc Lagarce en 2005. Cette nouvelle création en Off d’Avignon, veut "revenir au texte, en donner une lecture nouvelle". C’était "une nécessité", ajoute-t-il. Une relecture à la lumière de toute l’œuvre de l’auteur, considéré comme un des plus grands dramaturges de la fin du XXe siècle.
Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2min
Jea-Charles Mouveaux, Vanessa Caulhol, Philippe Calvario, Chantal trichet dans "Juste la fin du monde" mis en scène par Jean-Charles Mouveaux
 (L'Equipe de nuit/Comme en 14 !)

Retour vinaigre

Devant une telle unanimité, allant jusqu’à inscrire Jean-Luc Lagarce au programme du Bac Théâtre de 2008 à 2010, il est délicat de jouer les Cassandre. Surtout quand on ne s’attaque pas à la nouvelle version qu’en donne Jean-Charles Mouveaux, mais au texte.

Théâtre de la difficulté à dire les choses, de l’incommunicabilité, et dans le cas de "Juste la fin du monde", au sein de la famille, l’expérience autobiographique terrible que confie Lagarce inspire le respect. Si le sujet n’est pas nouveau, c’est le traitement qui l’est, dans l’écriture. L’adaptation de Jean-Charles Mouveaux, au plus proche du texte originel, enchaîne soliloques, monologues comme un collier de perles égrainant chaque personnage : ce fils revenu de nulle part, face à son frère, sa sœur, sa belle-sœur et sa mère. Les retrouvailles vont tourner vinaigre.

Pyramide désarticulée

Les mots se précipitent, les hésitations se répètent, les redondances abondent, pour laisser place à de rares dialogues qui virent au pugilat. L’ordre, minuté, suit un crescendo auquel se prête successivement chaque protagoniste. Le surplein devient vacuité, comme l'excessif est insignifiant. Ce tissu de malaise recoupe une scène grise, où sont empilées des tables les unes sur les autres, à la renverse, de biais, assemblant une pyramide désarticulée. A l'Image de cette famille sens-dessus-dessous. L’amoncellement mobilier en reflète son langage, la diction bancale et les conflits. Beau décor d’Antony Sarradin, au diapason du sens.
"Juste la fin du monde" (Avignon 2017) : l'affiche
 (DR)
Mais bientôt le malaise gagne la salle. Une torpeur s’installe devant un théâtre qui a vieilli. Le propos sur l'incommunicabité tourne en rond. et finit par perdre son impact. Le sujet et son sous-texte seraient-ils obsolètes ? Sans doute pas, et leur pertinence n’est pas prête de s’éteindre. D’autres y sont passés avant et après Jean-Luc Lagarce, en accord avec leur temps : on écrit toujours sur de l’écrit.

Jean-Paul Mouveaux dans le rôle de Louis, alter ego de Lagarce, en est le sosie. Il est impressionnant de ressemblance avec son visage émacié, écho de la maladie fatale qu’il est venue annoncer. Les mots ne lui sortiront jamais de la bouche. Ils nous manquent aussi pour traduire cette impression grise, à la couleur d'un spectacle qui pourrait être celui de trop.

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