Il faut aller voir "Votre maman"... au Petit Louvre
5 juillet, 18h35. Premier jour de Off et première représentation en Avignon pour "Votre maman". La (très belle) salle de la Chapelle des Templiers au Petit Louvre est remplie pour moitié. Pour un début, c'est énorme. Le signe que la pièce devrait bien marcher, voire jouer à guichets fermés comme ce fut le cas en Picardie où elle a déjà été présentée plus d'une vingtaine de fois.
Une histoire simple et universelle
L'histoire se déroule en cinq séquences qui commencent toutes par ces mots, "Votre maman" . C'est ainsi que le directeur de la maison de retraite (Gérard Chaillou) interpelle systématiquement le fils (Laurent d'Olce) qui vient rendre visite à sa mère.
Plus la pièce se déroule, plus le spectateur attend, voire redoute les mots qui vont suivre ce "Votre maman". Que va annoncer le directeur ? Un problème de santé, de comportement, et qui sait, une disparition ? Un simple problème de fauteuil peut donner lieu à de savoureux échanges avec une maman qui n'a pas la langue dans sa poche !
La qualité de cette pièce tient d'abord au texte de Jean-Claude Grumberg, "Votre maman" est l'un de ses plus récents. Un texte simple, sans fioritures mais qui sait jouer avec les mots, toujours justes, très souvent drôles. Et pourtant, il gratte là où ça fait mal, mais avec une qualité d'humour qui nous soulage.
L'humour pour parler de la mémoire indivuelle et collective
Vincent Ecrepont, le metteur en scène et directeur de la Compagnie A vrai dire, a respecté ce texte "à la virgule près". Il en a tiré une pièce d'une heure, où tout est dit avec une simplicité de moyens et d'effets qui mettent en valeur le texte et surtout l'émotion qui s'en dégage, qu'elle aille vers le rire ou les larmes.
Le spectateur vit la pièce au rythme des émotions du fils qui affronte des montages russes émotionnelles, joyeux comme un petit enfant quand sa mère le reconnaît, abattu et désemparé quand elle l'ignore ou sombre dans des souvenirs qui la coupe du monde des vivants. Elle qui oublie ce qu'elle a dit quelques minutes auparavant se souvient avec une étonnante acuité des détails d'une enfance marquée la déportation.
Françoise Bertin, une perle
La réussite de la pièce tient aussi beaucoup à son personnage principal, la maman, interprétée par Françoise Bertin. A 89 ans, elle est stupéfiante de justesse et de générosité sur scène. Celle qui a commencé sa carrière après-guerre avec Jean Dasté, a joué pour les plus grands : Lesage, Guillaumat, Serreau, Wilson et Terzieff. Avec ce dernier, elle a décroché en 1993 le Molière de la Meilleure comédienne dans un second rôle pour son interprétation dans "Temps contre temps", une pièce de Ronald Harwood.
"Un rôle totalement jouissif"
Vincent Ecrepont voulait elle, et personne d'autre pour ce rôle. Il a eu bien raison. Dans "Votre maman", Françoise Bertin sait se faire tour à tour fragile et forte, mère consolatrice ou à consoler, parfois d'une odieuse mais (pour le spectateur) réjouissante franchise. Un rôle en or que la comédienne savoure intensément.
Pour Vincent Ecrepont, "dans cette pièce, il n'y a aucun message, aucun jugement moral" et c'est bien ce qui fait son intérêt. Elle nous touche sans nous faire culpabiliser, elle raconte ce à quoi nous serons tous, un jour ou l'autre, confrontés. Elle va à l'essentiel, et c'est aussi comme ça qu'on aime le théâtre.
"Votre maman" de J-C. Grumberg, mise en scène de Vincent Ecrepont, avec Francçoise Bertin, Laurent d'Olce, Gérard Chaillou - Au Petit Louvre (Chapelle des Templiers) à Avignon - Tous les jours jusqu'au 27 juillet (relâche le 16 juillet) - 18h35 - Durée : 1h - Réservations : 04 32 76 02 79
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