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Festival d’Avignon 2022 : "One song", la performance musicale et sportive ahurissante d'une troupe flamande fait le buzz

Quatrième artiste à participer au feuilleton Histoire(s) du théâtre initié par Milo Rau et le Théâtre royal de Gand (NTGent), Miet Warlop propose une performance en forme de coup de poing

Article rédigé par Sophie Jouve
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
"One song" de Miet Warlop (RAYNAUD DE LAGE)

A l’entrée du Lycée Saint Joseph, haut lieu du Festival d'Avignon, un distributeur de bouchons d’oreilles. Dans la cour, alors que le public s’installe, des sportifs en maillots numérotés s’échauffent. En fond de scène, juchés sur une tribune, des supporters arborent des écharpes comme pour un match de foot. A leur côté une juge arbitre présente les participants de ce qui s’annonce comme un match ou un concours, mais son micro grésille et ses commentaires sont volontairement incompréhensibles (effet comique garanti).

Sur le plateau des instruments de musique sont couplés à des machines sportives : tapis roulant, poutre, barre de tractions… C’est sur ce terrain de jeu que cinq performers vont improviser un concert d’une heure, hyper physique, en jouant une seule chanson répétée en boucle, au rythme d’un métronome qui s’affole.

"One song" de Miet Warlop (RAYNAUD DE LAGE)

Exploit


Nous serons ainsi, nous, spectateurs-voyeurs, face à un chanteur qui ne quitte pratiquement jamais son tapis de course, tout en assurant sa prestation musicale (en anglais). Mais aussi : un pianiste sautant sur une planche d’appel pour atteindre son clavier, un contrebassiste allongé et casqué enchaînant les abdos pour jouer de son instrument, une violoniste en équilibre sur une poutre tout au long du concert. Quant au batteur, il se propulse comme un marsupilami entre les différents éléments de sa batterie. Bien entendu chacun d’eux, dans ces positions très inconfortables, se comporte comme un maître de son instrument, boosté par les supporters qui constamment le galvanisent. Sans oublier le pom-pom boy, transformé peu à peu en derviche tourneur, et dont l’exploit sportif n’est pas en reste.

"One song" de Miet Warlop (RAYNAUDDELAGE)


"La connection, c'est ça le théâtre"


Ce spectacle, Miet Warlop l’a conçu comme une réminiscence d’une création de 2005, The Sportband, qui a suivi la mort de son frère. Un requiem de l’extrême qui lui a permis de poursuivre sa route et qui a confirmé sa vocation théâtrale. Mais Miet Warlop tient à préciser en conférence de presse : "One song n’est pas une pièce sur l’épuisement des performers, ce serait un contresens, mais sur la douleur et l’énergie qui nous réunit tous. La connection, c’est ça le théâtre".

"One song" de Miet Warlop (RAYNAUDDELAGE)

A la sortie, les discussions sont animées. "C’est sa vision de comment elle a rencontré le théâtre, c’est ça qui est beau, et ce que ça dit de sa propre histoire. Il faut être acharné, il ne faut rien lâcher, il faut affiner", sourit Céline. A ses côtés Pierre est enthousiaste : "ça raconte qu’on répète sans cesse les mêmes choses, qu’on fait des variations sur un même thème, la vie c’est comme ça, et moi ça me parle". Un peu plus loin Anne a vu "un sens politique de la mise à l’épreuve des corps, une transe jusqu’à la perte de soi". Virginie a adoré : "il y a un endroit de liberté absolue qui fait du bien. On a quelque chose de très artistique, très beau au niveau visuel et en même temps cette explosion de musique et de vie qui fait vraiment du bien". Brigitte, elle, n’a pas aimé : "je n’ai pas été du tout émue, pour moi c’est juste une performance sportive".
"One song" de Miet Warlop (RAYNAUDDELAGE)

Remontant la rue des Lices j’interroge Gilles, intarissable : "c’est une performance physique et ce qui m’a étonné, c’est qu’on s’habitue, ça aurait pu durer une heure de plus. Le théâtre, ce sont des avancées comme celles-là. J’ai beaucoup aimé. Et ce qui est extraordinaire, c’est de voir que lorsque les supporters abandonnent, les performers se relâchent. Au fond, pourquoi s’exténuer s’il n’y a pas de public… C’est intéressant. Il faut être Belge pour inventer un spectacle comme celui-là !".  

"One song", histoire du Théâtre IV de Miet Warlop
8, 9, 11, 12, 13, 14 juillet 2022 (1h)
Cour du Lycée Saint-Joseph 
Avec Simon Beeckaert, Elisabeth Klinck, Willem Lenaerts, Milan Schudel, Melvin Slabbink, Joppe Tanghe, Karin Tanghe, Wietse Tanghe
Festival d'Avignon  

En tournée
Les 20 et 21 sept. 2022 au Festival actoral, Marseille
Les 28 et 29 sept. 2022 au Tandem Douai-Arras
Puis en Belgique, aux Pays-Bas, en France, en Espagne…

A découvrir aussi
"After All Springville" de Miet Warlop (création 2021), sera présenté les 23 et 24 juillet dans le cadre du Festival Paris l’été au Théâtre Paris-Villette.  

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