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Didier Long : "Mon Avignon à moi"

C'est l'Avignon de toutes les premières pour Didier Long, metteur en scène et directeur du théâtre de l'Atelier à Paris. Pour la premiere fois il joue à Avignon (le rôle de Verlaine dans ses amours avec Rimbaud), pour la première fois il y met en scène cette pièce dans laquelle il joue, mais il met en scène aussi une autre pièce dans laquelle il ne joue pas !
Article rédigé par Sophie Jouve
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Didier Long 
 (Sophie Jouve/Culturebox)
Qu'est-ce qui attire au Off d'Avignon, un metteur en scène aussi reconnu que vous, qui est aussi le directeur d'un très grand théâtre parisien ?

C'est l'artisanat d'Avignon qui m'attire, mais c'est exactement le même métier, exercé avec la même passion. Avignon c'est une espèce de centrifugeuse aux projets, aux rencontres. On retrouve l'esprit des premières compagnies où on faisait tout. Je trouve ça fascinant, il y a une énergie particulière.

C'est la première fois que je viens à Avignon avec une création. C'est la première fois aussi, depuis 22 ans, que je redeviens acteur et cela j'avais envie de le vivre ici.

Il faut mouiller sa chemise ?

Ça c'est certain, de toute façon, même à l'Atelier ou dans n'importe quel théâtre si renommé soit-il (éclats de rire). Surtout si on veut défendre une certaine idée du théâtre, pas seulement sur la programmation, sur la manière de faire, sur la relation au public. Et d'essayer de lutter contre cet individualisme rampant, partout, qui est dû aussi au contexte économique, politique, où chacun est dans l'urgence de ses problèmes.

A Avignon même s'il y a cette urgence, même si chacun tracte pour sa compagnie, il y a cette facilité à la rencontre. Il ne faut surtout pas perdre ça, y compris à Paris, dans nos théâtres. Il ne faut surtout pas rester dans sa tour d'ivoire, mais ouvrir des portes sur les autres.

C'est vous qui avez porté tout ce projet ?

Il y a 6 ans j'ai monté "Paroles et guérison" de Christopher Hampton. J'avais fait l'adaptation et la rencontre avait été artistique et amicale. J'avais entendu parlé de ce Rimbaud/Verlaine qu'il avait écrit, qui avait donné un film avec Di Caprio et Romane Bohringer. Mais Il ne voulait pas donner les droits, il trouvait que l'œuvre était mal construite. Je lui ai proposé de travailler dessus. J'ai adapté, restructuré, enlevé des personnages et cela a pris un an, mais le résultat lui a plu.

Par ailleurs je devais mettre en scène ici "Un homme à distance", de Catherine Pancol avec Nicolas Vaude. Ça c'était déjà prévu et c'était tout. Et puis le co-directeur de la Condition des soies, chez qui nous devions jouer, m'a proposé aussi de faire le Rimbaud/Verlaine, ça l'intéressait. Mais moi évidemment je voulais incarner Verlaine et monter sur scène. Il m'a rappelé à une heure du matin, en me disant qu'il était assez vieux pour m'avoir vu jouer, et ça c'est fait.

La distribution ?

J'avais besoin de m'entourer de gens dont je suis proche. Alluguette je l'ai fait débuter dans "Equus" et on a continué à collaborer depuis. Jeanne Ruff, je l'ai dirigée dans "Chère Elena" au Poche-Montparnasse. 

 

Et comment ça se passe ?
 
Je suis ravi. C'est le début et cette année c'est assez difficile pour les créations… Tout ceux qui ont déjà joué remplissent beaucoup plus vite, évidemment, mais ça monte et l'enthousiasme est là (grand sourire).  
Didier Long met en scène et joue "Eclipse totale" à Avignon
 (Sophie Jouve/Culturebox)

Vous tractez ?
 
Oui je tracte, et puis l'information court peut être plus vite, d'abord parce que je joue et ça peut étonner certains et puis les nouvelles vont vite !  
 
Est-ce qu'on regrette pardois de s'être lancé dans une aventure qui n'est pas évidente dans le contexte avignonnais ?
 
Jamais ! C'est pas un état d'esprit que j'ai, jamais (rires). Je suis ravi du résultat, je suis très heureux de cette aventure, de jouer. On va reprendre ce spectacle à Paris. Le théâtre c'est d'abord la nécessité, le désir artitique qu'on en a. C'est vrai qu'après une saison d'installation à l'Atelier (il en a pris la direction il y a 18 mois), ça parait un peu fou, parce que j'enquille directement, mais plus on en fait plus ça galvanise.
 
Qu'elle image aviez-vous d'Avignon ?
 
J'y suis venu deux fois en tant que metteur en scène avec des spectacles déjà créés. En tant que spectateur, c'est fabuleux. Il y a tout. On agit par intuition. Quand on connait du monde, on va voir les copains jouer. Et puis il y a beaucoup de sollicitations quand on est metteur en scène et directeur de théâtre en plus. Pour l'instant je n'ai pas encore eu le temps de voir des spectacles. Deux pièces à installer, deux créations. Celle que je joue est forte à incarner. Il fallait que je me pose. Je serai partout, d'ici trois ou quatre jours.

Comment se déroule votre journée ?
 

Tractage et beaucoup de rendez vous. Des tables rondes avec les directeurs de théâtres privés, des colloques, des rendez-vous avec des directeurs de centres et de théâtres municipaux de province. Je monte beaucoup de co-productions. Les deux autres comédiens (Julien Alluguette et Jeanne Ruff) tractent beaucoup plus que moi !
 
Vous vous sentez attendu au tournant ?
 
Franchement je m'en fiche. Si on commence à se préoccuper de ça, c'est un piège. Sans doute certains… Mais pour l'instant je ne le sens pas, j'ai appris à lire dans les regards (sourires) et ce projet répond de ma part à un vrai engagement, sans parti pris, sans posture. Aimer ce métier c'est aimer la mise en danger, la remise en question constante. C'est extrêmement important le danger…   


"Eclipse totale", Rimbaud/Verlaine de Christopher Hampton, mise en scène de Didier Long
Avec Didier Long; Julien Alluguette, Jeanne Ruff 
Théâtre de la Condition des soies à 21H45
13 rue de la Croix, Avignon 
04 90 22 48 43


"Un homme à distance" de Katherine Pancol, mise en scène de Didier Long
Avec Christelle Reboul, Nicolas Vaude, Marie-Laurence Tartas
Théâtre de la Condition des soies à 17H20
13 rue de la Croix, Avignon 
04 90 22 48 43

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