Adèle Haenel sur scène dans "Extra Life", une pièce illisible et ennuyeuse de Gisèle Vienne
"Franchement, c’est n’importe quoi." On ne peut contredire cette réplique lancée par Adèle Haenel dans la pièce Extra Life. Les effets pyrotechniques et la fumée n’auront pas suffi à donner du sens à la nouvelle création de la metteuse en scène Gisèle Vienne. Pour la première du spectacle à la MC93 de Bobigny (Seine-Saint-Denis), mercredi 6 décembre, le public bâille, se frotte les yeux et lutte pour ne pas dormir.
Au bout de presque deux heures, une spectatrice tente de lire dans la pénombre la feuille de salle, probablement en quête de quelques éclaircissements. Une autre quitte le spectacle une demi-heure avant la fin en s’écriant : "C’est trop expérimental, on comprend rien, c’est trop étrange de faire ça !" La pièce est tellement obscure qu’il est quasi impossible d’expliquer ce qu’elle raconte, tant le texte est pauvre et incompréhensible, car mal articulé et dénué de sens.
Brouillon et opaque
Extra Life est présenté comme un "rigoureux travail de déconstruction des cadres perceptifs, des structures narratives et psychiques". Tellement déconstruit qu’on ne sait même pas ce qui se déroule sous nos yeux. Clara, interprétée par Adèle Haenel, retrouve son frère Félix, incarné par Theo Livesey, dans une voiture au milieu de la nuit après une fête. Ils écoutent la radio et multiplient les allusions mal amenées sur les violences sexuelles, au milieu de fous rires. Ces moments parlés, rares dans la pièce, ne font pas réagir le public, impassible face aux blagues d’Adèle Haenel, en short de sport et justaucorps doré.
Ces violences sexuelles ont provoqué un traumatisme qui détruit. Mais le reste de la pièce, constitué de trop longs moments de danse au ralenti, est encore plus brouillon que les dialogues. Le langage que crée Gisèle Vienne est opaque, indéchiffrable. Avec un contexte mal posé et mal pensé au début de la pièce, le spectacle devient illisible pour le spectateur.
Des effets techniques répétitifs
Même le beau travail sur la musique, les sons et surtout la lumière, avec de nombreux lasers et effets pyrotechniques, devient ennuyeux par son caractère répétitif. La fumée à outrance et tous ces effets semblent meubler les passages creux de la pièce. Gisèle Vienne montre les différentes strates de la déchéance d’une santé mentale : la démence, les crises, la folie, la souffrance. Mais une question demeure : pourquoi ? Tout au long de la pièce, on ne comprend pas ce qui se déroule sous nos yeux, ni pourquoi cela se déroule, comme si la compréhension du public n’avait jamais été prise en compte dans le processus de création.
À la fin de la représentation, Adèle Haenel a souhaité prendre la parole pour rappeler sa signature dans une tribune de Mediapart en soutien au peuple palestinien. Elle a évoqué les enjeux de ce texte porté par 7 000 travailleurs de la scène culturelle française, notamment un cessez-le-feu immédiat. Elle a aussi dénoncé les actes antisémites et islamophobes qui apparaissent depuis plusieurs semaines, ainsi que l’annulation du débat sur l’antisémitisme avec Judith Butler au Cirque électrique.
"Extra Life", mis en scène par Gisèle Vienne, avec Adèle Haenel, à la MC93, jusqu'au 17 décembre 2023, avec le Festival d'Automne 2023.
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