Dans la maison-musée Raymond Devos en vallée de Chevreuse, le rire de l'humoriste résonne encore
C’est à un bol d’air hilarant que nous invite la Fondation Raymond Devos. Une maison du souvenir et de la transmission, à 25 kilomètres de Paris. C'est là que l'humoriste qui aurait aujourd’hui cent ans cette année, a habité pendant 43 ans. Un lieu empli de sa présence, de ses accessoires de scène, et de son art.
Raymond Devos s’est installé à Saint-Rémy-lès-Chevreuse (Yvelines) en 1963 et y a vécu jusqu’à sa mort le 15 juin 2006. Né en 1922, il aurait eu 100 ans le 9 novembre. Artiste de music-hall, humoriste, acteur, c’est sans doute clown qui le définit le mieux. Comme l’atteste ce nez rouge dont il se grimait dans ses spectacles, devenu son logo.
C’est aussi celui de la Fondation Raymond Devos qu’abrite sa maison depuis 2016, dédiée à sa mémoire et à la transmission de son art, au croisement de la langue, du mime et de la musique. Visite guidée.
Le jardin aux lettres
A deux pas du centre de Saint-Rémy-lès-Chevreuse et de la gare, en haut d’une colline surplombant la douce rivière Yvette, s’élève un discret et charmant petit hôtel particulier, entouré d’un parc où poussent des lettres de l’alphabet. C’est là que Devos les récoltait pour en faire le jus de ses spectacles. A l’intérieur, il écrivait ses sketches où les mots s’emmêlent et s’entremêlent dans des bouquets d’humour poétique, jusqu’à l’absurde.
Une première salle rappelle que muni du seul certificat d’étude à 13 ans, Raymond Devos s’est fait tout seul, pour finir Commandeur de la Légion d'honneur et Commandeur de l'ordre des Arts et des Lettres. Ses nombreux trophées artistiques – Académie Charles Cros, Académie française, deux Molières, SACEM… - trônent dans cette pièce où une photo de lui, coiffé d’un gibus, est légendée d'une citation : "J’ai commencé par la faim".
La faim au ventre, la famille vivant dans la pauvreté, Devos aura aussi très tôt faim de connaissance. Il se rattrapera, vu la rondeur qu’il affichait sur scène, et sa culture alimentera ses textes. Après une jeunesse passée dans la galère, la guerre, et les petits boulots, il déboule sur la scène des cabarets parisiens dans les années 1950. La table de maquillage de sa loge où trône une boîte d’œufs remplie de nez rouges, fait le pont entre l’époque des vaches maigres et l’artiste à succès.
Son père, un industriel ruiné, et sa mère au foyer lui ont transmis la fibre artistique, surtout musicale, la famille étant multi-instrumentiste. Lui-même jouera dix-sept instruments, des plus nobles, comme la harpe, aux plus loufoques – la scie musicale ou le kazoo -, sans parler de la clarinette molle qu’il a inventée. Tous ces instruments magiques sont rassemblés dans une magnifique salle : ses guitares (dont la première offerte par Georges Brassens), son trombone à trois coulisses, ses bandonéons, et autres chapeaux à grelots…
Bureaux et grenier
Raymond Devos écrivait et concevait ses spectacles dans trois bureaux qui fourmillent de manuscrits et de dessins préparatoires à ses pantomimes verbales. Le mime (sa formation première avec Marcel Marceau) et le verbe sont les deux mamelles de Raymond Devos. S'y ajoutent la musique et le dessin qui tient une grande place dans ses conceptions scéniques, dont de beaux exemples sont exposés dans plusieurs salles. Une étape peu connue de l'art de Devos.
Des portraits de Moretti et des affiches de cabarets couvrent les murs alors que des sketches de ce magicien des mots résonnent en audio et vidéo. Après un cabinet de curiosités où sont exposés des ustensiles scéniques interactifs, s’ouvre la caverne d’Alibaba de l’artiste : le grenier. Collectionneur, Raymond Devos empilait nombre de livres et d’objets liés aux saltimbanques, au cirque ou aux jouets, avec moult tableaux et figurines. Ainsi ce magnifique théâtre miniature dédié à la commedia dell'arte, souvenir d'enfance, ou un train électrique acheté à 23 ans. Ils trônent parmi un bric-à-brac d’instruments de musique et d’ustensiles de jonglerie, à côté d’un costume de scène, d’une harpe tirée par un tracteur…
Bisbilles
C’est tout un monde qui s’expose à la maison-musée Raymond Devos où siège sa fondation. Dédiée aux arts du music-hall et à l’humour, elle promeut les jeunes artistes à travers des concerts, spectacles et lectures, et prévoit de leur proposer des résidences. Elle est aussi organisatrice du Grand Prix Raymond-Devos de la langue française qui a été remis mercredi 9 novembre à Alex Lutz, alors que Muriel Robin s'est vue honorée du Grand Prix du centième anniversaire de la naissance de Raymond Devos.
Le lieu et ce centenaire sont toutefois un peu assombris par des bisbilles dans la gestion de la fondation qui ont ralenti sa fréquentation depuis quatre ans. La malveillance d’une chasseuse d’héritage n’a rien arrangé. Catherine Dolto, la directrice de la maison, affirme que le lieu ne demande qu'à redémarrer. "Artistes en résidence, expositions, signatures d'auteurs proches de l'esprit Devos, jeune public et transmission de l'œuvre à travers l'Education nationale sont nos priorités", confiait récemment au Figaro (7 nov.) Jacqueline Franjou, membre de la fondation.
Loin de ces vicissitudes, l’endroit est paradisiaque, au cœur d’un vallon verdoyant où coule une rivière. La maison-musée de Raymond Devos vous est grande ouverte pour le plaisir des sens et de l'esprit.
Fondation, maison-musée Raymond Devos
10 rue de Paris, 78470 Saint-Rémy-lès-Chevreuse
Tous les jours 14h-18h, sauf lundis et mardis
Téléphone : 01 30 47 76 71
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.