Autodérision et humour trash, Doully fait le plein à L’Européen et en tournée avec "Hier, j’arrête !"
En matière de drogues, elle en connaît un rayon, et même plusieurs. Elle a tout essayé. Et à haute dose. "Tant qu’à être droguée, autant être championne". Elle a frôlé la mort, qui l’a déçue d’ailleurs, avec trois overdoses (un bête "souci de dosage", selon elle). Mais ça, c’était avant. Aujourd’hui, elle est sobre, promis juré, et elle ne boit plus que du thé.
Une vie cabossée
Doully, qui a débuté dans la troupe du Jamel Comedy Club, est une sacré belle blonde au corps de liane, qui pratique un stand-up sans retenue, sourire jusqu'aux oreilles, en longue robe dos-nu de gitane et le pied nu. A son public, qu’elle appelle familièrement "mes p’tits culs", elle raconte ses addictions passées et sa vie cabossée avec un humour ravageur.
Gogo-danseuse, dame pipi, barmaid, actrice (bon, dans le rôle "d’une pute morte", hein), elle a tout fait. Et elle en a bavé. Atteinte de la maladie dégénérative de Charcot-Marie-Tooth, qui atrophie les muscles de ses pieds et de ses mains et la fait souffrir du dos, elle prend discrètement appui sur un tabouret haut pour tenir la distance du show. Mais qui pourrait croire que cette ravissante trentenaire copieusement tatouée est handicapée ? Personne, même quand elle brandit sa carte de handicapée. Par contre, si vous la croyez sur parole, elle se vexe.
Hippies, hipsters et cocaïnomanes en prennent pour leur grade
Dans ce seul en scène hilarant co-écrit avec Blanche Gardin et Paco Perez, l’ironie le dispute à l’humour noir. Doully convoque des images bien trash ou cochonnes ("cigarettes au goût bite ou fion fraise ?"), évoque tous les fluides corporels, mais aussi l’haleine et les couilles, tape sur les hippies, les hipsters, les vegans et les magasins bio (et ceux qui les fréquentent), mais aussi sur les cocaïnomanes et les dealers. Surtout, elle se moque beaucoup d’elle-même, à commencer par sa grosse voix rauque, une improbable "voix de clodo" qui lui joue bien des tours, mais aussi de son handicap. Et les punchlines pleuvent.
"Du côté du métro Stalingrad, j’ai tout pris sauf le métro"
"Le dernier moustique qui m’a piqué il est sous Subutex"
"Mes doigts de pied ressemblent à des racines de gingembre."
"Nan, je ne suis pas bourrée, je suis née avec cette voix d’ivrogne. Ça comporte aussi des avantages, cette voix m’a évité une bonne dizaine de viols."
Une vitalité joyeuse qui conjure la douleur
Les junkies sont rarement de joyeux drilles et les anciens toxicos encore moins. Doully si. Elle a pris le parti de rire de tout, de son passé comme de son futur incertain. Pas le genre à se lamenter. Si son humour est cash, parfois grotesque, parfois cynique, on sent aussi chez elle une immense tendresse – sa façon d’interpeller les spectateurs notamment - et une vitalité joyeuse qui font tout passer.
Si elle parvient à passer le cap des quatre-vingt ans, elle sera, promet-elle, une mamie aux vices sans entraves. Le genre à beugler en pleine rue les paroles de Vivre libre ou mourir des Bérurier noir, réglé à fond les ballons après sa sortie de scène. "Quelle société pour les têtes brûlées, pour les agités ? Quelle société pour les défoncés, pour les détraqués ?". On en ressort avec les zygomatiques en vrac et "de belles images plein la tête", comme elle dit. Merci Doully.
"Hier j’arrête !" de Doully à L’Européen à Paris jusqu’au samedi 20 mai puis en tournée jusqu’en 2024, et notamment le 2 juin à Montpellier, le 3 août à Anduze, le 20 septembre à Morlaix, le 1 er novembre au Trianon à Paris ... Toutes les dates par ici
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