"2147, et si l'Afrique disparaissait ?", manifeste dansé de Touré et Gallotta sur la musique de Rokia Traoré
Un chiffre brut et cynique. 2147. Une date issue de la statistique, ridicule par sa précision administrative. En réaction à cette prophétie brutale de l'ONU basée sur des prévisions de croissance, le metteur en scène Moïse Touré décide de réagir par un premier spectacle créé à Bamako en 2005 avec le chorégraphe Jean-Claude Gallotta. "2147, l’Afrique " donnait la parole aux premiers concernés : les Africains.
Reportage France 3 Alpes D. Borrelly / F. Ceroni / H. Cadet-Petit / S. Villatte
2147 était pour moi insupportable parce que ça ne parle pas de l'humain. Ça parle de la fin de l'humain quasiiment, parce qu'on ne sera pas là. Ça convoque quelque chose qui nie notre humanité.
Moïse Touré, metteur en scèneTreize ans plus tard, le metteur en scène grenoblois redonne la parole à des artistes africains, nouvelle réponse poétique à cette échéance fatidique. "Dans le premier volet créé en 2005, j’évoquais en quelque sorte le très lent développement de l’Afrique. Ce qui vient me hanter aujourd’hui, c’est le spectre de sa disparition" explique-t-il.Un spectacle grave et joyeux
Originaire de Côte d'Ivoire, Moïse Touré est arrivé enfant, sous la neige, à Grenoble. Eveillé au théâtre par sa famille d'adoption, il crée en 1984 la Compagnie "Les Inachevés". Il interroge depuis 30 ans notre rapport à l'humanité. Cette fois, le metteur en scène a convoqué des philosophes, des poètes, des danseurs et des musiciens africains, parmi lesquels la chanteuse malienne Rokia Traoré. Comme le précédent, le spectacle mêle paroles, danse et chants.
La direction que j’ai donnée aux artistes qui m’entourent pour ce projet est la question de l’humanité. Comment on regarde notre humanité, comment on la sauve ? Je leur ai demandé de répondre à cette question.
Moïse Touré, metteur en scène
Face à la mondialisation et au déséquilibre nord-sud, le metteur en scène estime que les douleurs de l'Afrique nous concernent tous. "C'est un spectacle grave parce que ça fait l'état des lieux de nos sentiments. Ça nous pose la question de savoir qui on est dans le monde mondialisé d'aujourd'hui. Quel est notre point de vue ? Comment on s'engage ? Mais en même temps c'est joyeux, parce qu'on peut encore en parler, on peut encore discuter. On peut encore faire du théâtre."
Après un an d'une tournée saluée par le public et la critique "2147, et si l'Afrique disparaissait ?" sera programmé en 2020 à Paris et Perpignan.
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