Le chorégraphe et "archéologue du ballet" Pierre Lacotte est mort à l'âge de 91 ans
Il était connu pour ses reconstitutions de ballets du XIXe siècle pour les plus grandes compagnies du monde. Le chorégraphe Pierre Lacotte est décédé lundi à l'âge de 91 ans, a annoncé à l'AFP son épouse, l'ancienne danseuse étoile Ghislaine Thesmar. "Notre Pierre nous a abandonnés à 4 heures du matin", a-t-elle déclaré, précisant qu'il est décédé dans une clinique à la Seyne-sur-Mer dans le Var (sud de la France) d'une septicémie après l'infection d'une plaie.
"C'est très triste, il était encore bourré de projets et était en train d'écrire un livre", a ajouté celle qui était son épouse depuis 1968. "Il était plein d'énergie et avait des projets pour des compagnies" dont le Ballet de l'Opéra de Rome. Sa dernière création remonte à octobre 2021 (il était alors âgé de près de 90 ans), avec l'adaptation en ballet du roman de Stendhal, Le Rouge et le Noir pour l'Opéra de Paris. "Il adorait l'Opéra, c'était sa seule et unique maison", a assuré Ghislaine Thesmar.
Un extrait de "Le Rouge et le Noir" par Pierre Lacotte avec Hugo Marchand, à l'Opéra de Paris.
Né le 4 avril 1932 à Chatou, en région parisienne, Pierre Lacotte a le coup de foudre très jeune pour les ballets de l'Opéra de Paris que l'emmènent voir ses parents. Il intègre l'Ecole de l'Opéra de Paris en 1942 malgré une santé fragile et entre dans le corps de ballet puis devient premier danseur en 1951. Il a 17 ans lorsque Serge Lifar le choisit pour interpréter sa création Septuor, avec Claude Bessy, la future directrice de l'école de danse.
Il aide Noureev à passer à l'Ouest
Ses premières créations s'ancrent dans son époque. Exode (1953) se déroule pendant la Seconde Guerre mondiale, La nuit est une sorcière (1954) s'appuie sur une musique spécialement composée par le clarinettiste de jazz Sidney Bechet. Il démissionne de l'opéra l'année suivante et fonde la compagnie des Ballets de la tour Eiffel, puis mène à partir de 1959 une carrière de danseur et de chorégraphe indépendant.
Au début des années 60, il est l'un des protagonistes de la retentissante défection du légendaire danseur russe Rudolf Noureev pour rejoindre à l'Ouest. Lors d'une tournée du Kirov (nom du Mariinski au temps de l'URSS), le jeune prodige découvre Paris, avec Pierre Lacotte et d'autres danseurs.
Le 16 juin 1961, à l'aéroport du Bourget, juste avant qu'un Noureev en panique ne monte dans l'avion qui doit le ramener en Russie, Lacotte a l'idée de contacter Clara Saint, ex-fiancée d'un fils d'André Malraux, alors ministre de la Culture. Une fois sur place, elle demande l'aide des policiers français et le danseur fera son grand saut très médiatisé à l'Ouest.
Il devient "archéologue du ballet"
Une blessure à la cheville oblige Pierre Lacotte à ralentir son activité en 1968 et c'est alors qu'il se consacre à la recherche d'archives d'anciens ballets, le poussant à recréer La Sylphide, le premier ballet sur pointes (1832). Ces reconstructions deviendront la passion de celui que l'on surnommera bientôt l'"archéologue du ballet".
Le chorégraphe devient le spécialiste des ballets oubliés de la période romantique, qui le fascinent par leur "indéniable pureté de style". "J'adore fouiller dans les archives de la bibliothèque-musée de l'Opéra, je me sens comme un enfant qui découvre les lettres de ses grands-parents au grenier", confiait-il à La Croix.
Il ressuscite, entre autres, Coppélia (1870), le La Vivandière-Pas de six (1844), La Fille du Pharaon (1862), Paquita (1846) pour les plus grandes scènes du monde, du Bolchoï à l'Opéra de Paris, en passant par le Mariinski de Saint-Pétersbourg et le Staatsoper de Berlin.
Brigitte Lefèvre, alors directrice de l'Opéra de Paris, explique en 2013 avec le ballet La Sylphide, l'importance du travail de Pierre Lacotte.
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