Cet article date de plus d'un an.

"Gabriel" d’après George Sand au Théâtre du Vieux-Colombier ou l’histoire d’une femme en quête de liberté

Au Théâtre du Vieux-Colombier est donné à voir plus qu'une rareté réputée injouable, un manifeste féministe de George Sand qui touche l’âme, un vrai mélodrame : "Gabriel".

Article rédigé par Sophie Jouve
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Claire de La Ruë du Can et Yoann Gasiorowski dans "Gabriel" (VINCENT PONTET)

Laurent Delvert et Aurélien Hamard-Padis adaptent un roman dialogué de George Sand jamais porté sur scène en raison de sa longueur et la multiplicité des personnages. Resserré autour de sept figures, ce plaidoyer romanesque pour l’égalité des sexes, écrit en 1839, est encore d’une terrible actualité par bien des aspects.

Dans l’Italie de la Renaissance, le Prince de Bramante a trouvé un subterfuge pour déshériter Astolphe, fils de son cadet qu’il n’aime pas, et contourner le droit de succession qui exclut les femmes en élevant comme un garçon, la fille de son fils aîné bien-aimé.

Alexandre Pavloff et Claire de La Ruë du Can dans "Gabriel" (VINCENT PONTET)

Travestissement

On est d’abord saisi par la façon dont Gabriel, élevé par un précepteur et un serviteur fidèle, décrypte la société de son temps avec le regard d’un homme, "pénétré de la grandeur du genre masculin et la faiblesse d’un sexe". Jusqu’à la révélation, à sa majorité, de sa véritable identité par son grand-père. Le choix qu’il lui impose : accepter son destin d’homme ou redevenir une femme et entrer au couvent…  

Dans le rôle-titre, Claire de La Ruë du Can est bouleversante de pureté et d’ingénuité. La jeune femme, s’opposant au diktat de son grand-père, tombera follement amoureuse de son cousin en cherchant à le rétablir dans ses droits, découvrant du même coup, les préjugés et les interdits liés au genre féminin.

"Gabriel" d'après Georges sand (VINCENT PONTET)

Une simple structure en acier, pas toujours très heureuse, construite et déconstruite à vue par les comédiens, rythme la folle destinée de Gabriel(le) et sa quête difficile d’émancipation.
Claire de La Ruë du Can dans "Gabriel" (VINCENT PONTET)
Le couple qu’elle forme avec Yoann Gasiorowski séduit et convainc. Ils sont bien entourés notamment par Anne Kessler, remarquable en belle-mère vénéneuse et pétrie de conventions ou Alexandre Pavloff, très juste en abbé-précepteur qui comprend les tourments de la jeune femme. La comédienne et chanteuse, Elisa Erka, artiste auxiliaire de la troupe de la Comédie-Française, montre une belle personnalité dans le rôle de la courtisane mise au ban d’une société incroyablement hiérarchisée.

Yoann GASIOROWSKI (Astolphe de Bramante), Elisa ERKA (Faustina), Claire DE LA RUE DU CAN (Gabriel)  (VINCENT PONTET)

Cette pièce, vraiment féministe en un temps qui ne l’était pas du tout, est aussi l’histoire de la tragédie d’une femme qui veut choisir son destin malgré les égoïsmes et les conventions de l’époque. Malgré des raccourcis dans l’intrigue un peu brutaux et une fin trop elliptique, ce plaidoyer pour la cause des femmes mérite amplement d’être (re)découvert.

"Gabriel" d'après George Sand, mise en scène de Laurent Delvert
Avec la troupe de la Comédie-Française : Anne Kessler, Alain Lenglet, Alexandre Pavloff, Christian Gonon, Claire de La Ruë du Can, Yoann Gasiorowski, Birane Ba, Elisa Erka
Comédie-Française-Théâtre du Vieux-Colombier
21 rue du Vieux-Colombier, Paris 6e
01 44 58 15 15

Du 21 septembre au 30 octobre 2022
19h les mardis, 20h30 du mercredi au samedi, 15h le dimanche

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.