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"Apollinaire Corps Accords" : une performance théâtrale jazz tissée d'un noir nocturne envoûtant

Cette tragédie jazz interprétée par un trio d’instrumentistes et un comédien distille un son, une tonalité et une présence. Un accord swinguant de notes bleues.
Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 3min
François Moutin, Philippe Bérodot, Axelle du Rouret et Louis Moutin, le quartet à la tête de "Apollinaire Corps et Accords", performance théâtrale jazz (2023) (JEAN-BAPTISTE HUGO)

Le jazz et la ville vont de pair. Le spectacle Apollinaire Corps Accords de François et Louis Moutin et Axelle du Rouret, interprété au chant, batterie, contrebasse et jouée par les instrumentistes et un comédien, traverse Londres, Paris et la Somme de 1916, où Apollinaire a été blessé. Une histoire d’amour, de ville et de guerre, dans une pièce jazz, illuminée de poésie, au-delà de la simple comédie musicale. Apollinaire Corps Accords se joue jusqu’au samedi 30 septembre au 100ecs, à Paris.

Hôtel particulier


Un blessé de guerre erre dans les brumes de Londres où il rencontre le fantôme d’un amour qui le transporte à Paris. Dans une chambre d’hôtel, l’amour se transforme en guerre des sentiments, où les baisers sont des bombes. Mais bientôt, la guerre devient champ de bataille, où les balles tuent, blessent, bousculent les amours ébauchés. 

Le récit d’Apollinaire Corps Accords, dont l’enchevêtrement prendrait une forme cubiste, est syncopé à l'image de sa musique. Une introduction aux accents de Melody Nelson, de Gainsbourg, tout comme l'épisode de l'hôtel (rérefence à la chanson L’Hôtel particulier), sont teintés d’un swing expérimental, harmonieux et rempli d’atmosphères. La dramaturgie que se partage le quartet - contrebasse, batterie, chant, comédie – est rythmée de chansons qui emportent les amants dans des bacchanales sensuelles et érotiques, qui vont jusqu’à la souffrance.

Souffrir et faire souffrir


Le Monde rapportait en 1980 qu’une femme avait dit qu'Apollinaire "avait tous les dons, y compris celui de souffrir et de faire souffrir". Cette quête d’amour avec son lot d’émotions, entre extase et déception, don de soi et jalousie, voire vengeance, nourrissent des textes cristallins, parfois cruels. L’archet et les doigts de François Moulin glissent sur les cordes d’une contrebasse caverneuse et sensuelle, soutenue par la rythmique d’une batterie à trois temps, parfois jouée à mains nues sur les tomes, et illuminée de cymbales vibrantes.

Axelle du Rouret, qui tient le devant de la scène, l’occupe d’une présence dramatique et vocale séduisante, envoûtante et gracieuse, entre Marisa Berenson et Anouk Aimée. Elle est accompagnée d’un Apollinaire (Philippe Bérodot) très physique et lunaire, "perdu" dans le labyrinthe des passions, des villes et de la guerre. Le jazz, qui n’existait pas du vivant d’Apollinaire, lui va à merveille. Syncopé comme un tableau cubiste, dont le poète était amateur, Apollinaire Corps Accords déverse une pluie de notes bleues et de rythmes swinguants aux atmosphères nocturnes envoûtantes.

Apollinaire Corps Accords
De François et Louis Moutin
Mise en scène : David Géry
Avec Philippe Bérodot, Axelle du Rouret, François Moutin, Louis Moutin
Les 25.09 – 26.09 – 27.09 – 28.09 – 29.09 – 30.09.2023 à 20h00 et le 27.09 à 14h30
100ecs
100, rue de Charonne 75011 Paris
Tél : +33(0)1 46 28 80 94

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