SIGNAC, LES COULEURS DE L'EAU
Découvrez l'exposition à travers une Visite Virtuelle réalisée par Stéphanie Berlu et Jean-Luc Grzeskowiak :
Et sur France Info dans "Sortir, écouter, voir",
Arnaud Racapé parle de l'actualité artistique et culturelle, le jeudi à
8h25, 10h25, 15h25, 21h20 et 23h55. Et le vendredi à 10h25, 15h25, 21h20
et 23h55. (Ré)écoutez la chronique consacrée à l'exposition Signac :
À l'occasion du 150è anniversaire de la naissance du peintre.
Depuis les premières marines peintes
sur le littoral normand avec une vigueur et une liberté impressionnistes
jusqu'aux amples architectures portuaires aux couleurs quasi fluorescentes
d'après-guerre, la description de l'eau et du ciel offrirent à Paul Signac
(1863-1935) un inépuisable prétexte à multiplier les variations chromatiques.
Comme Monet, Signac a en effet trouvé une source d'inspiration constante dans
l'évocation de l'eau et de ses couleurs. La réflexion de la lumière à la
surface du fleuve et de la mer y fragmente le réel et l'artiste, ardent
défenseur de la couleur pure, trouva dans ce motif une illustration naturelle
de la théorie néo-impressionniste de la division des tons. Épris de plein air,
Signac fut aussi un marin averti. Il sut conférer au genre de la marine une
rigoureuse modernité formelle sans renoncer à sa force d'évocation. Car,
au-delà de l'exigeante technique de la division des couleurs qui tend
naturellement à l'abstraction, son œuvre véhicule une puissante poétique du
voyage et de l'évasion.
L'exposition compte une centaine
d'œuvres, peintures, aquarelles et dessins, sélectionnées dans les plus grandes
collections publiques et privées. Elle est complétée par une riche section
documentaire présentée avec le concours des Archives Signac et consacrée aux
recherches sur la perception de la couleur. Enfin, une section pédagogique
permet aux visiteurs de mettre en pratique les principes de la division des
tons et du contraste des couleurs.
Le parcours de
l'exposition
1. Signac impressionniste : 1882-1885
C'est la visite de
l'exposition présentée par Claude Monet en juin 1880 dans les locaux de La Vie moderne qui
décida de la vocation de peintre du jeune Signac. D'emblée, il choisit d'évoquer
les bords de Seine et c'est en Normandie, à Port-en-Bessin qu'il peignit ses
premières marines.
Cette section mettra en
valeur l'impact de l'œuvre de Monet sur le jeune artiste autodidacte qui
témoigne d'emblée d'une sensibilité impressionniste, avec un goût marqué pour
l'usage des couleurs vives et les compositions frontales. Marin averti, Signac
aime le contact des éléments et la description du fleuve, de la mer et du ciel
le passionne. Quand la pratique de la division des tons exigera de sa part un
patient travail en atelier, son tempérament énergique et son goût du plein-air
ne se démentiront pas et s'exprimeront dans les études peintes sur le motif.
Bientôt, la pratique de l'aquarelle lui offrira un espace de liberté supplémentaire.
2. Théories de la couleur autour de 1885
En 1884, Signac fait la
rencontre déterminante de Georges Seurat auquel il fait découvrir
l'impressionnisme. Il participe à ses recherches sur l'harmonie des lignes et
la perception des couleurs et, ensemble, ils s'intéressent aux théories de Charles
Blanc, d'Eugène Chevreul, d'Ogden Rood et de Charles Henry. La présence de
cercles chromatiques, de gammes colorées et d'ouvrages scientifiques
rappelleront au visiteur l'importance et la modernité des recherches consacrées
alors à la perception des couleurs. Les travaux corollaires de Signac et de
Louis Hayet témoigneront de l'impact immédiat de ces théories sur la création
artistique. Au cours de l'hiver 1885-1886, Seurat reprend entièrement Un Dimanche après-midi sur l'île de la Grande Jatte (1884-1886, Chicago, The Art Institute) en appliquant pour la
première fois la théorie du mélange optique selon laquelle c'est l'œil du spectateur
qui, à une certaine distance, recompose les tons. Il retravaille l'ensemble de
la surface du tableau à partir de petites touches de couleur pure posées côte à
côte sur la toile : le néo-impressionnisme est né.
*3. Des Andelys à Concarneau, les premières séries
néo-impressionnistes : 1886-1891*
Signac adopte d'emblée cette technique
à laquelle il sera définitivement fidèle. Au printemps 1886, c'est aux Andelys,
non loin de Giverny, qu'il peint sa première série de paysages
néo-impressionnistes. Il peint dès lors des toiles au chromatisme mesuré qui
s'inspirent souvent des bords de Seine, notamment à Herblay où il séjourne en
-
Mais très vite c'est la mer qu'il privilégie : la Méditerranée à
Collioure en 1887 ou à Cassis en 1889, la Manche à Portrieux et Saint-Briac en
1889-1890 ainsi qu'à Concarneau en 1891.Paul Signac, Saint-Briac. La Garde Guérin Opus 211,1890 Huile sur toile , 65 x 81,5 cm, Remagen, Arp Museum Bahnhof, Rolandseck, Collection Rau pour UNICEF, inv. GR 1.520 © Collection Rau pour UNICEF
Les paysages d'eau peints au cours des
premières années néo-impressionnistes sont de véritables poèmes de lumière où
l'artiste décline les couleurs du paysage selon le climat et l'heure du jour.
Les visiteurs de l'exposition auront le privilège d'en voir certaines, réunies
pour la première fois telles que l'artiste lui-même les accrochait au Salon des
Artistes Indépendants. C'est le cas de l'admirable série composée de Saint-Cast
Opus 209 (Boston, The Museum of Fine Arts), Saint-Briac.
Les balises Opus 210 (collection particulière), Saint-
Briac. La Garde Guérin Opus 211 (Remagen,
Musée Arp, dépôt de la Fondation Raü) et Saint-Briac. Le
Port Hue Opus 212 (Moscou, musée Pouchkine).
4. Saint-Tropez 1892-1900 : de la lumière à la couleur
En 1892, l'année qui suit la mort de
Seurat, Signac découvre Saint-Tropez où il loue puis achète une villa, La Hune.
Jusqu'en 1900, il peint quasi exclusivement les paysages de Saint-Tropez et
progressivement, sans renoncer à la division des tons, il en use plus
librement. Il élabore une touche plus large, vivement colorée, et rédige le
traité " D'Eugène Delacroix au néo-impressionnisme "
publié en 1899. Président de la Société des Artistes Indépendants, il devient
une des figures majeures de la scène artistique et reçoit à La Hune les jeunes
peintres qui, comme lui, passionnés par l'expression de la couleur, feront l'art
du XXe siècle.
5. L'appel du large 1895-1935
Dès 1897, Signac retrouve les sites
qui ont inspiré ses premières œuvres : la Manche au Mont Saint-Michel et la
Seine aux abords de Paris. Il visite les grands ports européens : Gênes, puis
Venise (1904-1908), Marseille et Rotterdam en 1906, Istanbul en 1907, sans
oublier les ports de France, notamment Saint-Malo où l'attirent les
terre-neuvas. Au cours de ces voyages, il note ses impressions dans ses carnets
d'aquarelliste avant d'élaborer ses œuvres à l'atelier. À partir de 1900, les
tableaux expriment le goût croissant de l'artiste pour les compositions
extrêmement mesurées, rythmées par d'amples arabesques décoratives. Quant à la
couleur, elle s'éloigne de plus en plus ostensiblement de la réalité observée.
Pierre Bonnard a très justement parlé à son propos du " grand réalisateur des
architectures colorées et des magnifiques ordonnances en réaction contre le bas
réalisme et aussi le réalisme inconscient des impressionnistes ".
6. Aquarelles et dessins
Signac prépare ses tableaux par un
ensemble de dessins, d'études peintes sur le motif et de cartons préparatoires
qui constituent une part importante de son œuvre. Ici aussi, l'ampleur
décorative très mesurée des grands lavis s'oppose à la liberté des aquarelles
où l'artiste exprime la permanence d'un tempérament foncièrement
impressionniste. Progressivement, il privilégie l'aquarelle qu'il pratique avec
passion depuis la découverte de Saint-Tropez en 1892 ; elle prend
définitivement le pas sur sa production peinte à l'huile à partir de 1910.
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