"Acharnés" sur Netflix : une série complètement déjantée qui fait du bien
Les gens normaux sont exceptionnels. Acharnés (Beef en version originale) commence avec une scène quotidienne anodine, un incident sur un parking. Sauf que ce jour-là n'était pas un jour à faire un doigt d'honneur à Danny, alors qu'il n'a pas pu se faire rembourser ses barbecues parce qu'il avait égaré son reçu. C'est vrai qu'il a fait une marche arrière avec son pick-up sans regarder dans le rétroviseur. Il a failli emboutir un beau SUV blanc tout rutilant. Sa conductrice enrage et lève son majeur avant de redémarrer en trombe.
Voilà que Danny, interprété par un Steven Yeun au sommet de son art, engage une course-poursuite. De cet accident manqué naît une haine inextinguible, absurde, dévorante entre Danny et la conductrice Amy, incarnée par l'humoriste Ali Wong sombre et lunaire, à contre-emploi. La vie ne sera plus jamais la même pour les deux protagonistes, lancés dans une irrationnelle vendetta.
Le vernis s'écaille, craquèle de toutes parts. La haine tourne à l'obsession. Elle fait sortir le pire et … le pire. Danny et Amy rivalisent de coups tordus pour faire de la vie de l'autre un enfer. De blagues potaches à des plans élaborés beaucoup plus cyniques, la lente dégringolade affecte non seulement Danny et Amy mais aussi tous leurs proches.
Danny, entrepreneur qui vivote de petits jobs chichement rémunérés, vit avec son frère dans une chambre de motel. Amy évolue, en apparence, dans un monde idéal, avec une grande maison confortable, un mari tolérant et stoïque, et leur adorable fillette, et elle enchaîne les succès professionnels. Tout cela en apparence seulement, car la vie d'Amy explose. Les faux-semblants ne suffisent plus. Et si cette colère qu'elle nourrit quotidiennement contre Danny n'était qu'une échappatoire pour ne pas affronter ses frustrations ?
Toute la série (dix épisodes de 30 minutes chacun) se déroule en Californie, au sein de la communauté asiatique. Chaque épisode porte un titre original, tiré d'une référence littéraire. Les titres des épisodes 8 et 9, Le drame du choix originel et Le fabricateur d'illusions, sont tirés de l'œuvre de Simone de Beauvoir et Simone Weil.
Deux acteurs exceptionnels
Argent, sexe, religion, famille, ascension sociale : Acharnés aborde tous les sujets sur un ton décalé et avec un humour noir, très noir. Le jeu des deux acteurs est exceptionnel, avec une note spéciale pour Steven Yeun qui, jusque dans ses silences, est bouleversant d'authenticité. Loin de ses rôles habituels, Ali Wong, aussi, est habitée par son rôle d'épouse en mal de sensations fortes. La scène où elle découvre une arme dans un coffre-fort est inoubliable.
Tous deux interprètent des personnages fort peu sympathiques qu'on adore détester, et auxquels au final on s'attache sans le vouloir. Acharnés, peut-être plus adapté comme titre que l'original Beef, est une pépite addictive, à regarder sans modération.
Fiche technique
Titre : Acharnés, (Beef, titre original)
Réalisation : Lee Sung-Jin
Diffuseur : Netflix
Genre : Comédie dramatique
Distribution : Steven Yeun, Ali Wong, Joseph Lee, Young Mazino, David Choe, Patti Yasutake
Synopsis : Un accès de violence entre deux conducteurs frustrés par leurs professions respectives déclenche une vendetta qui libère leurs instincts les plus sombres.
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