Trésors archéologiques de Crimée : la justice néerlandaise tranche en faveur de l'Ukraine dans son contentieux avec la Russie
Pour Kiev, c'est "une victoire". La justice néerlandaise a ordonné mardi le retour en Ukraine d'une collection d'une valeur inestimable de trésors archéologiques qui avaient été prêtés par la Crimée à un musée d'Amsterdam peu avant l'annexion par Moscou de cette péninsule ukrainienne.
"La cour d'appel d'Amsterdam a enjoint au musée Allard Pierson de remettre à l'État ukrainien les 'Trésors de Crimée'", a annoncé mardi 26 octobre la justice néerlandaise, à propos d'une collection d'une valeur inestimable de trésors archéologiques. En 2014, ces pièces avaient été prêtées par la Crimée à un musée d'Amsterdam peu avant l'annexion par Moscou de cette péninsule ukrainienne.
Un feuilleton de sept ans
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky s'est aussitôt félicité de cette "décision juste", une "victoire tant attendue", ajoutant que l'Ukraine "récupère toujours ce qui lui appartient" - y compris à l'avenir la Crimée, unilatéralement rattachée à la Russie en mars 2014. La même année, en novembre, quatre musées de Crimée avaient entamé en commun une action en justice pour forcer le musée archéologique de l'Université d'Amsterdam, Allard Pierson, à rendre les œuvres, prêtées pour l'exposition "La Crimée : Or et secrets de la mer Noire". Le musée s'était trouvé bien embarrassé par ce litige aux enjeux politiques et diplomatiques sensibles.
Mais, en 2016, un tribunal néerlandais avait décidé que ces trésors archéologiques devaient être rendus à l'Ukraine, expliquant que la Crimée, un territoire naguère à la croisée d'anciennes routes de commerce, n'était pas considérée comme un État autonome. Les musées de Crimée avaient alors fait appel du jugement, arguant que l'or appartenait à cette région.
En 2019, la Cour d'appel d'Amsterdam avait souligné qu'elle avait besoin de plus de temps pour se prononcer. Quant aux trésors, ils étaient en attendant conservés dans un "endroit sûr" par le musée Allard Pierson. La riche collection d'objets datant du deuxième siècle de notre ère jusqu'au haut Moyen-Âge a été prêtée à ce musée amstellodamois moins d'un mois avant l'annexion de la Crimée, à l'issue d'une intervention militaire suivie d'un référendum de rattachement jugé illégal par Kiev et les Occidentaux.
Un imbroglio juridique et un musée pris "entre le marteau et l'enclume"
Tiraillé entre l'Ukraine et la Crimée, qui demandaient toutes deux la restitution des objets, le musée Allard Pierson a été pris "entre le marteau et l'enclume", a estimé le tribunal néerlandais en 2016. Son jugement avait provoqué la colère de Moscou et la joie de Petro Porochenko, alors président de l'Ukraine. Selon lui, la décision signifiait que "non seulement l'or scythe est ukrainien, mais aussi que la Crimée est ukrainienne". Il appartenait dès lors à la Cour d'appel d'Amsterdam de trancher.
Puisque l'affaire ne semble être couverte ni par les lois néerlandaises, européennes, ni être liée au patrimoine mondial tel que défini par l'Unesco, il s'agissait désormais, selon cette juridiction, de "décider qui a les droits les plus forts". Andreï Malguine, le directeur du musée de Tavrida à Simféropol, l'un des quatre établissements de Crimée à avoir entamé l'action en justice, avait quant à lui accusé la justice néerlandaise de faire "traîner" le procès.
"Cette question est très compliquée. Nous aimerions bien sûr que notre collection soit de retour dans sa maison", avait de son côté déclaré en septembre le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.
"Nous récupérons non seulement des pièces de musée", mais aussi "des reliques témoignant de notre histoire millénaire", a pour sa part commenté mardi dans une vidéo, après le jugement rendu par la cour d'appel d'Amsterdam, le chef de la diplomatie ukrainienne Dmytro Kouleba. Au cours du procès, "toutes les falsifications et les manipulations russes" se sont soldées par un "fiasco", a-t-il conclu.
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