"Les Savanturiers", 150 ans d'exploration au Muséum de Toulouse
C'est ce naturaliste, alors maire de Toulouse, qui décide d'installer ses collections de minéraux et de fossiles en 1796 dans un ancien monastère, dédié aux sciences naturelles par décision de Napoléon en 1808. "C'est l'esprit des Lumières, on est juste après l'Encyclopédie, tout est à découvrir", avec le souci, hérité de la Révolution française, d'"en faire profiter le peuple", explique Francis Duranthon, directeur du Muséum et paléonthologue.
Occupé un temps par l'école de médecine, le bâtiment sera réinvesti par les naturalistes et ouvrira au public en 1865, pour accueillir une girafe naturalisée et les collections données à la ville par le navigateur toulousain Gaston De Roquemaurel.
Le "Mythe de l'ailleurs"
Tirées des 2,5 millions d'objets conservés par le musée, ces pièces sont installées dans huit espaces thématiques, jalonnés d'écrans et de jeux interactifs. L'histoire des donateurs de ces objets, scientifiques ou colons, est aussi restituée.
Les premiers cailloux ramassés par l'homme en Antarctique, un lion de l'Atlas, espèce disparue, ou d'imposantes défenses d'éléphants, côtoient une momie péruvienne ou un masque de deuilleur de Nouvelle-Calédonie, chef-d'oeuvre de l'art kanak.
"Toutes les collections du Muséum ont servi la politique coloniale de la France. A une époque où la photographie est balbutiante, où il n'y a pas de cinéma, pas de télévision, tout ce qu'on a ramené à l'époque nourrit l'imaginaire, et incite des gens à s'engager dans la politique coloniale, à devenir militaire, explorateur", estime M. Duranthon."Nos collections ont servi d'une certaine manière à forger le mythe de l'ailleurs, et on essaye de montrer comment le regard sur l'autre a changé", poursuit-il.
Le musée propose de confronter le regard d'un écrivain malgache avec celui du maréchal Galliéni, administrateur colonial, ou encore le témoignage d'une Guinéenne auprès d'un imposant masque d'épaule Nimba originaire de son pays.
Banque de données pour la science
Premier lieu de création d'une galerie consacrée à la préhistoire, le Muséum présente dans cette exposition un calque de peintures rupestres de la grotte d'Altamira, en Espagne, réalisé par Henri Breuil. Le squelette d'une espèce particulière de rhinocéros "aux airs d'hippopotame", trouvé dans le département voisin du Gers, a été reconstitué et est visible en première mondiale.
"Nos objets sont une banque de données exceptionnelle pour la science. Sans les photos prises par Eugène Trutat à la fin du XIXe, par exemple, on n'aurait pas pu mesurer l'évolution des paysages pyrénéens", précise M. Duranthon, qui souligne l'importance de continuer à enrichir la collection avec des objets contemporains.
Le Muséum présente une fluorite prélevée dans une ancienne mine du Tarn mais aussi des vêtements traditionnels égyptiens et une vitrine participative, qui doit être remplie d'objets donnés par le public.
"Notre rôle est de gérer et des transmettre le patrimoine mais aussi de le développer", assure le directeur. Pour impliquer les visiteurs, qui sont en moyenne au nombre de 300.000 par an, l'équipe a fait un travail de recherche généalogique pour retrouver les descendants des donateurs, et a lancé un financement participatif dans le but de naturaliser une nouvelle girafe, clin d'oeil à celle qui trône depuis 150 ans au coeur du musée.
"Les Savanturiers" au Muséum d'Histoire Naturelle de Toulouse
35 Allée Jules Guesde, 31000 Toulouse
05 67 73 84 84
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