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Une loi d'exception pour reconstruire Notre-Dame : "On est dans une société de l'immédiateté", estime un spécialiste d’architecture

Alexandre Gady, professeur d’histoire de l’art à la Sorbonne, signe une tribune dans "Le Figaro" pour dénoncer le délai trop court de la reconstruction annoncée de Notre-Dame. 

Article rédigé par franceinfo - Édité par Thomas Pontillon
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Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
La cathédrale Notre-Dame le 19 avril 2019.  (STEPHANE DE SAKUTIN / AFP)

Le gouvernement va préparer une loi d'exception pour accélérer la reconstruction de Notre-Dame. Le texte permettrait notamment de déroger au code du patrimoine, ce qui inquiète Alexandre Gady, professeur d’histoire de l’art à la Sorbonne, spécialiste d’architecture et président de l’association Sites & Monuments, qui publie une tribune dans Le Figaro mardi 23 avril. "On fait une ordonnance avant même de faire le diagnostic", déplore le professeur mardi sur franceinfo. Il dénonce "une société de la surconsommation de l'immédiateté" et défend "les procédures existantes qui ont servi" depuis le 19e siècle.

franceinfo : Le délai de cinq pour reconstruire Notre-Dame vous paraît trop court ?

Alexandre Gady : On fait une ordonnance avant même de faire le diagnostic. Il faut traiter la cathédrale dans son état actuel. C'est malheureusement un état très endommagé, non seulement par l'incendie que tout le monde a vu mais maintenant par les conséquences invisibles et notamment de l'eau qui est entrée par milliers de litres dans les maçonneries. L'eau est un ennemi mortel de l'architecture. En ce moment, on est dans une phase de confortation de ce qui reste, d'enlèvement des parties qui menacent de tomber, d'analyse des maçonneries gorgées d'eau, des joints qui eux-mêmes vont souffrir. Donc dire deux ans, trois ans, dix ans, ça n'a pas de sens. Il faut vraiment donner du temps à l'expertise et laisser le monument parler. Si on ne l'écoute pas, on est sûr de faire une erreur.


Dire cinq ans, ce n'est pas montrer qu'on a une vraie volonté politique ?

Non. On est dans une société de la surconsommation de l'immédiateté. Ce qu'on attendait du président ce n'est pas on va faire faire ça dans cinq ans mais on va faire ça du mieux possible. Ce n'est pas forcément incompatible mais si on commence par dire "il faut se dépêcher d'aller vite et de changer la loi", alors là, on est sûrs qu'on est mal partie.

Qu'est-ce qui vous inquiète ?

On est en train de tailler sur mesure pour Notre-Dame une loi. L'enfer est pavé de bonnes intentions et ça peut paraître une bonne idée. Mais pourquoi court-circuiter toutes les procédures existantes qui ont servi après les deux guerres mondiales, qui ont servi au 19e siècle quand il y a eu aussi des incendies de cathédrales. Tout ce savoir accumulé, tous les services du ministère de la Culture, ils ont été annulés d'une minute à l'autre par la parole présidentielle. C'est un monument qui a été classé au 19e siècle en 1862. Il dépend de la loi sur les monuments historiques. C'est pour ça qu'il y a un architecte des monuments historiques, c'est pour ça qu'il y a une commission des monuments historiques même si elle a changé de nom, c'est pour ça qu'il y a des autorisations. Le problème c'est l'argent or l'argent on l'a. De mémoire de défenseur du patrimoine, c'est la première fois qu'on fait ça et ça m'inquiète parce que là, on est rattrapés par notre époque. Ce n'est pas la première fois que, dans des dispositions qui peuvent toucher à d'autres domaines que le patrimoine, on a une pensée qui est fondée sur l'exception. Alors pourquoi faire des lois si ensuite on fait des lois d'exception, pourquoi donner des règles à tout le monde si ensuite d'autres s'en affranchissent ? Ça ne me paraît pas un très bon signal sur le plan plus largement politique, qui est envoyé. 

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