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Vidéo Quand un menuisier du XIXe siècle tenait son "blog" sur des chutes de bois cachées sous les planchers de son village

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Durée de la vidéo : 3 min
VIDEO. Quand un menuisier du XIXe siècle tenait son "blog" sur des chutes de bois cachées sous les planchers de son village
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Article rédigé par France 2
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En ce début de Troisième République, le menuisier Joachim Martin notait ses pensées intimes et les secrets de son village sur de petites planchettes de bois. Il les dissimulait ensuite sous les parquets qu’il posait, comme au château de Picomtal (Hautes-Alpes)… Extrait du magazine "13h15 le dimanche" du 18 octobre 2020.

Le menuisier Joachim Martin (1842-1897) a écrit un bref journal intime sur des planchettes de bois volontairement dissimulées par lui sous le parquet qu'il posait dans le château de Picomtal, au cœur des Hautes-Alpes. C’est une chronique également des mœurs d’une petite commune au début de la Troisième République (1870-1940). Ces chutes de bois sur lesquelles l’homme de l’art a inscrit ses messages ont été découvertes, et miraculeusement sauvées, lors de la restauration du bâtiment par les nouveaux propriétaires.

Ces 4 000 mots ont été consignés sur 72 planchettes authentifiées et analysées par l’historien Jacques-Olivier Boudon, professeur à la Sorbonne et auteur du Plancher de Joachim, l'histoire retrouvée d'un village français (éd. Belin). Ce jour-là, aux archives départementales des Hautes-Alpes, il feuillette le carnet de comptes du châtelain Joseph Roman et retrouve les sommes que le notable a versées à Joachim Martin : "Ici, cinq francs… Ce sont de petits travaux de réparation. Cinq francs correspondent à peu près à une journée de travail."

"Ô toi seigneur qui habite le château, ne méprise pas l’ouvrier"

Le maître des lieux est un personnage central des écrits de ce "blogueur" clandestin : "Monsieur Roman va arriver de Briançon et me gronder de voir que je n’ai pas fini le plancher", écrit-il sur une des planchettes. L’universitaire  précise : "Il y a la distance sociale qui sépare le plus grand notable du village et le menuisier qui se plaint de n’être pas assez payé. Joachim écrit par exemple sur une planche : 'Ô toi seigneur qui habite le château, ne méprise pas l’ouvrier.' Il évoque aussi le châtelain dans les relations qu’il peut avoir avec celui qui a un goût pour l’histoire, la culture, les livres..." explique Jacques-Olivier Boudon.

La politique va opposer les deux hommes férus d’histoire. Le châtelain et le menuisier soutiennent des camps adverses. Le premier rédige ainsi un livret titré Conseils à mes enfants  (1890) : "En politique, restez toujours attachés à la saine doctrine de la royauté légitime." Le second est un républicain convaincu : "La République a fait de belles choses en 1881 : elle a diminué d’un tiers les curés, a augmenté les pensions militaires... 4 milliards dépensés pour les écoles publiques… Jamais rien vu de semblable", témoigne-t-il sur une planchette. Ces mots rendent ainsi compte de l’ancrage au cœur des campagnes d’un régime politique : la République.

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