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Le site de Medina Azahara (Andalousie) raconté par l’archéologue espagnol Alberto Montejo

Le site sera ouvert pendant les Journées nationales de l’archéologie (JNA), du 14 au 16 juin 2019.

Article rédigé par franceinfo Culture - Laurent Ribadeau Dumas
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 3 min
Vue de Medina Azahara, capitale du calife Abd al-Rahman III, installée près de Cordoue (Andalousie) au Xe siècle  (RAFA ALCAIDE/EFE/SIPA / EFE)

Medina Azahara (près de Cordoue), site ouvert pendant les Journées nationales de l’archéologie (14-16 juin 2019), est l’un des lieux majeurs de la présence arabe dans la péninsule ibérique. Interview de son directeur, Alberto Javier Montejo.

Franceinfo Culture:
Que signifie le nom "Medina Azahara" et à quoi se réfère-t-il?

Alberto Javier Montejo: Medina Azahara est le nom espagnol. Madinat al-Zahra est le nom arabe. La traduction exacte est (la ville) "la plus brillante" ou "resplendissante". Le terme "al-Zahra" est un superlatif féminin.

Selon la légende, son fondateur, Abd al-Rahman III (891-961) serait tombé amoureux d’une esclave de son harem appelée Azahara. Cette légende a-t-elle un début de réalité?

La légende est effectivement celle que vous venez de résumer. C’est une légende, une histoire. Le mythe a pris corps au XIIe siècle avec Ibn Arabi et a été repris au XVIIe par al-Maqqari dans son ouvrage Naft al-Tib.

La raison réelle de la construction de Medina Azahara est liée à la proclamation d’Abd al-Rahman III comme calife. Parmi ses attributs, il avait le pouvoir de fonder des villes, suivant en cela une très ancienne tradition orientale.

Le site de Medina Azahara est-il effectivement le plus important complexe archéologique d’Espagne ?

Medina Azahara est une ville de 115 ha dont seulement 10 % ont été fouillés. Les ruines n’étant pas recouvertes aujourd’hui par une ville moderne, on peut les aborder dans leur intégralité. 2000 ha de la zone sont protégés. On y trouve des routes, des ponts, des carrières et d’autres traces plus ou moins étendues. Pour cette raison, l’on peut dire que sa taille, son niveau de conservation et son importance historique en font l’un des grands sites archéologiques européens. C’est aussi la raison pour laquelle il a été inscrit à la liste du Patrimoine mondial de l’Unesco.

Ruines du palais du calife Abd al-Rahman III (Xe siècle) à Medina Azahara, près de Cordoue en Andalousie (sud de l'Espagne) (MANUEL COHEN / MANUEL COHEN)

Qu’a-t-on découvert récemment sur le site ? Et que vous attendez-vous à découvrir dans les prochaines années ?

Actuellement, nous travaillons à un projet général de recherche sur la place d’armes, un grand espace de 18.000 mètres carrés situés à l’est de la zone fouillée. Participent à ce projet l’Institut archéologique allemand et le Conjunto (complexe) Arqueológico Madinat Al-Zahra (dont Alberto Javier Montejo est le responsable, NDLR), avec la collaboration de l’Université autonome de Madrid.

A Medina Azahara, il y a encore beaucoup de choses à découvrir à côté des fouilles. Par exemple, il faut étudier les éléments mis au jour. Des études auxquelles participe le CNRS français. Il y a également les relevés géophysiques avec la participation d’universités britanniques.

Pourquoi Medina Azahara est-il un lieu si important ? Quel était son rôle au moment de sa fondation ?

Medina Azahara était la capitale du caliphat omeyyade d’al-Andalus. C’était une ville fondée pour représenter le pouvoir d’Abd al-Rahman III et de ses successeurs. Où les différents organes de l’État étaient installés et où les sciences et les arts étaient cultivés d’une manière tout à fait remarquable. Tant et si bien que leurs productions culturelles ont permis l’apparition de la Renaissance en Europe.

Ce site est-il un symbole pour la redécouverte du passé arabe de l’Espagne ?
Aujourd’hui, le passé arabe de l’Espagne est déjà découvert, il est connu de tous. Ce que permet Medina Azahara, c’est de mieux connaître ce moment remarquable de notre histoire. Je ne parle pas uniquement de l’histoire espagnole, mais aussi de l’histoire européenne.

Détail de chapiteau de colonne, site de Medina Azahara près de Cordoue en Andalousie (sud de l'Espagne) (MANUEL COHEN / MANUEL COHEN)

Séville, Grenade, Cordoue, Medina Azahara sont les villes les plus prestigieuses d’al-Andalus. Y a-t-il en Espagne d’autres monuments arabes moins connus que les étrangers devraient visiter ?

Ils sont nombreux ! On peut ainsi parler de Tolède, Jaen, Niebla, Ronda, Carmona, des alcazabas (forteresses) de Malaga et Almeria, du palais Aljafería à Saragosse, du château de Gormaz (une forteresse qui serait l’une des plus importantes d’Europe, NDLR). L’Espagne est remplie de monuments arabes ou influencée par eux, tel le monastère de Suso (à San Millán de la Cogolla, inscrit au Patrimoine mondial de l’Unesco, NDLR) ou les bains arabes de Gérone.

A ce propos, je vous recommande de regarder le film que nous projetons dans le musée de Medina Azahara. Il est accessible sur Youtube.

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