Un artiste transforme des armes en instruments de musique
Pedro Reyes, artiste contemporain de renommée internationale, n’en est pas à son coup d’essai. En 2008, pour dénoncer le niveau alarmant d’homicides au Mexique, son pays natal, il s’était associé à la campagne nationale de remise volontaire des armes par les citoyens contre des bons d’achat. Il avait alors eu l’idée de fondre le métal de 1527 de ces engins au rebut pour en faire autant de pelles pour planter 1527 arbres. Une action symbolique se sensibilisation baptisée « Palas por Pistolas » qui a marqué les esprits. La preuve ?
En avril 2012, raconte-t-il sur son blog, le gouvernement mexicain lui a passé un coup de fil pour l’informer de la destruction publique prochaine de milliers d’armes à feu à Ciudad Juarez. Les autorités souhaitaient savoir s’il était intéressé par la récupération du métal. « J’ai accepté, mais je voulais faire quelque chose de neuf cette fois. 6.700 armes, coupées en morceaux et rendues inutilisables, m’ont été données et j’ai entrepris d’en faire des instruments de musique. »
Mitraillettes transformées en banjos, flûtes ou lyres
Pour ce projet baptisé "Imagine", un groupe de 6 musiciens a travaillé durant deux semaines d’arrache-pied pour sortir de ces bris d’engin de mort - revolvers, mitraillettes, fusils de chasse - des instruments de vie tels que guitare, basse, flûte, banjo, xylophone, lyre et batterie (toutes les photos ici). « C’est difficile à expliquer mais la transformation était plus que physique », se souvient Pedro Reyes, il s’agissait «d’une sorte d’exorcisme», « la musique expulsant les démons » que les armes portaient en elles.
L’orchestre ainsi créé a joué un concert, au sein duquel on reconnaissait le titre symbolique « Bullet in the head » de Rage Against The Machine (vidéo ci-dessous).
Pour l’artiste, ce projet « Imagine » se veut aussi un appel à l’action pour contrer le marché des armes à feu, un « marché de la mort » peu bridé par les Etats et largement encouragé selon lui par l’industrie du divertissement (films, jeux vidéos etc) – « certains acteurs ne fumeraient pour rien au monde à l’écran, mais pas un ne refuserait le rôle d’un excité de la gâchette », relève-t-il.
Par le passé « il y a eu des mouvements de lutte pour les droits des gays, l’égalité des sexes et des races et en faveur de l’environnement, mais nous n’avons toujours pas exprimé notre désir d’un monde sans armes. Vivre dans une communauté exempte d’armes à feu devrait être un droit de l’Homme. Bien des libertés dont nous jouissons aujourd’hui ont été considérées un temps comme utopistes, et la première étape a été d’imaginer » - (d’où le nom du projet, Imagine), conclut-il.
Difficile de ne pas lui donner raison à l'heure où les ventes d'armes connaissent un bond aux Etats-Unis par peur d'une interdiction prochaine des fusils d'assaut et alors que ce Noël, l'un des sports nationaux outre-Atlantique était d'exhiber son nouveau joujou mortel sur les réseaux sociaux.
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