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Kurt Cobain aurait eu 50 ans lundi. Que ferait-il aujourd'hui ?

Que ferait Kurt Cobain aujourd'hui, à l'heure de fêter ses 50 ans lundi 20 février ? Quel genre d'artiste serait-il en 2017 s'il ne s'était tiré une balle dans la tête le 5 avril 1994 chez lui à Seattle, à l'âge de 27 ans, mettant fin à son calvaire mais tirant aussi un trait sur le groupe Nirvana, porte-voix malgré lui du mouvement grunge ?
Article rédigé par Laure Narlian
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
Kurt Cobain à New York au début des années 90.
 (Kevin Mazur/ WireImage/ Getty Images)

Il aurait sans doute mené une carrière solo

"Déjà, Nirvana n'en aurait plus eu pour très longtemps", parie Stan Cuesta, auteur du livre "Nirvana, une fin de siècle américaine" réédité cette semaine dans une version actualisée. "Il le disait déjà à l'époque", souligne le journaliste dans une interview à l'AFP. "Le succès lui pesait beaucoup. Il aurait mené une carrière solo et musicalement différente."

Fin 1993, quelques mois avant son suicide, Kurt Cobain parlait d'instruments acoustiques pour le prochain album, et l'on comprenait que cet écorché vif prompt à exorciser son malaise dans le bruit comptait peut-être dans le futur aborder des rivages plus dépouillés et plus calmes.

"Ce serait bien de commencer à jouer de la guitare acoustique et d'être considéré comme un chanteur et un songwriter, plutôt que comme un rocker grunge", élaborait cet éternel incompris dans une interview alors diffusée sur M6. "Je pourrais être assis sur une chaise et jouer de la guitare acoustique comme Johnny Cash".

L'album "Unplugged in New York", dernier enregistrement de Nirvana (1994), publié après sa mort, concrétisait en quelque sorte ce virage musical. Sur cet album acoustique, il explorait avec son groupe la musique des héros qui l'avaient inspiré : David Bowie ("The Man Who Sold The World" ci dessous),  le groupe de rock américain The Meat Puppets, le bluesman Leadbelly et le groupe de rock écossais The Vaselines. Et sur "Pennyroyal Tea" il était absolument seul avec sa guitare.

Aurait-il été vers quelque chose de plus doux ou de plus expérimental ?

Il aurait fait quelque chose de plus doux, de plus acoustique", pense aussi Stan Cuesta. "Il avait toujours ce mélange entre pop et punk." On se souvient également que Michael Stipe de R.E.M. avait assuré que lui et Kurt avaient discuté de travailler ensemble quelques semaines avant sa mort.

Mais, curieux de tout et rebelle à tout formatage, "il serait peut-être allé vers de l'expérimental", reconnaît Stan Cuesta. "Une des choses les plus gratifiantes à ses yeux, c'est l'enregistrement qu'il a fait avec William Burroughs", remarque-t-il dans cette même interview à l'AFP. Sur ce disque collector, "The Priest they called him" (1993), l'écrivain culte de la Beat Generation déclame de la poésie sur une musique saturée jouée par Kurt Cobain. Certaines chansons bruitistes jouées sur scène en 1993, comme celle-ci qui ne porte pas de nom, plaident en ce sens.

Et physiquement ?  Kurt Cobain approcherait peut-être ce portrait vieilli de lui élaboré par Sachs Media il y a quelques années (ci-dessous). Légèrement empâté mais parfaitement reconnaissable. Et peut-être enfin débarrassé de son complexe de maigreur qui le poussait à empiler les jean's (souvent deux à la fois), les T-shirts et les chemises (jusqu'à trois de chaque) pour paraître moins gringalet.

Kurt Cobain, mort en 1994 à 27 ans, tel qu'il pourrait être en 2013.
 (SachsMedia)

Et s'il avait tout lâché pour la peinture ?

Nous penchons pour notre part pour une tout autre hypothèse : celle d'un Kurt Cobain tournant le dos au moins un temps à la musique pour se consacrer à la peinture et au dessin, comme il avait menacé de le faire en 1992. Depuis l'enfance, dessin, peinture, collage et vidéos (et du coup cinéma s'il avait vécu ?) avaient toujours été les moyens d'expressions favoris de cet esprit libre.

Il a dessiné de nombreuses pochettes pour Nirvana, notamment la pochette d'"Incecticide" (compilation de singles parue en décembre 1992, ci-dessous) ornée d'une de ses peintures à l'huile et le dos de pochette de "In Utero" ornée d'une photo de ses objets disposés minutieusement. Dans le trois pièces de Los Angeles où il écrivit l'essentiel du dernier album studio de Nirvana "In Utero", il se consacra surtout à ses pinceaux.

"Il peignait en utilisant de la peinture acrylique et de la peinture à l'huile qu'il mélangeait parfois avec son sang, son sperme, de la cendre de cigarette et des matières fécales", écrit Charles R.Cross dans '"Une vie à vif". On y trouvait aussi des cheveux, de la terre, des coupures de journaux. Un de ses amis d'enfance, Jesse Reed, vint lui rendre visite à l'été 1992. Six chevalets, tous occupés par une peinture, trônaient dans la pièce, qui ressemblait à un atelier d'artiste. "Il m'a dit qu'il arrêtait la musique et qu'il se consacrait à la peinture", rapporta-t-il. Kurt lui dit également qu'il comptait ouvrir sa propre galerie.

En juin 2016, l'homme chargé de faire fructifier l'héritage de Kurt Cobain pour le compte de sa veuve Courtney Love et de leur fille Frances Bean Cobain, évoquait d'ailleurs dans le New York Times (via Rolling Stone) une prochaine exposition autour du monde des toiles de Kurt Cobain.

Cette peinture de Kurt Cobain (signée Kurdt) ornait la pochette d' "Incecticide", l'album de B-Sides de Nirvana sorti en décembre 1992. 
 (DR)

Bien sûr, restent deux hypothèses moins réjouissantes sur le devenir de Kurt Cobain. La pire ? Il aurait continué à prendre de l'héroïne et en serait mort à un moment ou à un autre. La meilleure ? ll nous aurait fait un geste à la JD. Salinger ou à la Marlène Dietrich en se retirant prématurément et totalement de la vie publique, de la scène et des projecteurs. Une vie à élever sa petite Frances Bean Cobain. Une vie de reclus durant laquelle il nous aurait manqué, déjà, mais qui l'aurait peut-être sauvé, lui.

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