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Lana Del Rey : 5 choses à savoir sur "Ultraviolence"
La chanteuse américaine, devenue phénomène avec "Born to Die" sorti il y a deux ans et demi et écoulé depuis à 7 millions d'exemplaires dans le monde, sort un nouvel album, "Ultraviolence". Ni tout à fait la même ni tout à fait une autre, Lana Del Rey explore cette fois une veine plus rock sans renier ses thématiques fétiches. Cinq clés pour mieux comprendre l'album.
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Temps de lecture : 7min
1. De quoi Ultraviolence est-il le nom ?
Une chanson donne son nom à l'album, "Ultraviolence". Un titre terriblement sensuel dans lequel la belle tend à glamouriser la violence. Son personnage féminin y est une beauté empoisonnée ("il m'appelait belladone") mais folle d'amour pour un homme qui la frappe - "Il m'a frappée et c'était comme un baiser", "il m'a fait mal mais c'était comme le véritable amour".
Pourtant, le titre de l'album fait référence à un concept plus large. "Dans Ultraviolence, il y a l'idée du masculin qui rencontre le féminin. Mais avant le sens, j'aime juste le mot. Il est devenu le cadre d'un monde sonore que je voulais créer", expliquait-elle à Libé Next il y a quelques semaines.
Si on balaye ses propos tenus depuis deux ans, il saute aux yeux que Lana Del Rey a subi une violence psychologique depuis son accès à la notoriété. Les critiques, en particulier, l'ont beaucoup affectée. Car si une bonne partie de la presse et des réseaux sociaux se sont vite entichés de sa moue boudeuse, l'autre moitié ne lui a pas fait de cadeau. On lui a reproché d'être une créature fabriquée par une maison de disques, de ne pas savoir chanter, d'avoir les lèvres refaites et de feindre une vie de magnifique looseuse trash pour nourrir sa crédibilité.
Ce faisant, personne n'a évoqué ce pour quoi elle brûle d'être reconnue et respectée : le songwriting et la poésie des textes. Dans un entretien au Guardian, cette star blessée assure n'avoir pas aimé un seul instant de sa vie depuis le single "Video Games" qui l'a fait connaître. "J'aimerais être déjà morte", assène-t-elle, ultraviolente. 2. Un Black Keys aux manettes
L'an passé, Lana Del Rey avait désolé ses fans en déclarant à Vogue qu'elle ne ferait pas d'autre album et voulait quitter la musique. Elle disait avoir perdu "sa muse l'inspiration". Pourtant, en décembre 2013, elle enregistre une première version de l'album avec son guitariste Blake Stranahan et un batteur de session aux studios Electric Lady de New York. "Mon modèle de son, c'était les Eagles!", raconte-t-elle dans les Inrocks.
C'est sur ces entrefaites, en fin d'année, qu'elle a rencontré Dan Auerbach, le guitariste des Black Keys, l'un des groupes de rock les plus respectés actuellement, qui signe la production du disque. "Je l'ai rencontré dans un strip-club du Queens (quartier de New York)", raconte-t-elle dans Libé Next. "Ils ont joué un de mes morceaux, nous avons dansé ensemble. Une semaine après, je suis partie enregistrer chez lui à Nashville".
"Il m'a dit que ce que j'avais fait sonnait trop "classic rock" et du coup, on a tout refait ensemble à Nashville, en six semaines, le plus souvent en live…", précise-t-elle aux Inrocks. Des enregistrements réalisés sur du vieux matériel analogique et avec des micros cheap achetés au supermarché du coin pour un son plus vintage.
3. Un léger virage rock "narcotique"
Très langoureux, doté d'une lenteur moite zébrée d'orages électriques, "Ultraviolence" troque donc les beats hip-hop et les cordes orchestrales pour une tonalité plus rock, qui se sent en particulier dans les déchaînements de guitares saturées, comme à la fin de "Shades of cool".
"La première chanson de l'album, "Cruel World", a tout déterminé", se souvient-elle dans les Inrocks. "Géographiquement, elle pose l'album : la guitare de Dan raconte d'emblée la Californie. Il y a, dans le début du texte, une certaine épure, une simplicité. Et puis arrive le refrain avec sa grosse batterie, son désordre électrique… Cette cohabitation entre la normalité et le chaos est assez symbolique de ce que je venais de traverser dans ma vie."
Elle souligne également que l'album a été "réalisé dans une ambiance très nonchalante". De fait, le rythme est franchement ralenti sur "Ultraviolence" par rapport à son prédécesseur. Si cette idée a affolé sa maison de disques, qui craignait de ne pouvoir placer aucun titre en radio, la chanteuse tenait à un tempo reflètant son état d'esprit troublé d'alors. Pour résumer le son du disque, elle et Dan Auerbach parlent de "swing narcotique". 4. Ses thèmes fétiches fidèles au poste
Là où ce disque ne change pas du précédent, c'est sur le thème des chansons de la belle au regard frangé de faux cils : elle creuse toujours les thématiques sombres et troubles de l'amour et de la mort et même de l'amour à mort.
Des filles (Lana au pluriel ?) s'enflamment – "on fire" est l'expression qui revient ici le plus souvent après la "red dress" de "Born to Die" – pour des "bad boys".
Dépendantes à l'amour, elles se donnent corps et âme à ces salauds volages ("Cruel World", "Sad Girl"), en général des rockeurs qui aiment plus la drogue qu'elles ("Shades of Cool") et prennent leur pied à les voir pleurer ("Pretty when you cry", un slow dont la mélodie fait écho à "Hotel California" des Eagles). Le spleen colle décidément à la peau de cette dangereuse sirène, de cette fille fatale mais touchante pas comme les autres.
5. Lana a trouvé sa voix
Certes, l'écriture tourne un peu en rond et ses textes ne seront pas édités à La Pléiade, mais franchement on n'y voit que du feu. Car ce qui frappe en premier à l'écoute de ce disque c'est la voix de Lana. Cherchant moins dans les graves, modulant davantage, minaudant, voire déraillant à dessein ce qui la rend encore plus troublante, elle prend ici une nouvelle ampleur et des libertés qui font toute la force de ces nouvelles chansons.
"Shades of Cool" est à ce titre une merveille où sa voix développe différentes textures et vampe littéralement les tympans. Les craintes de la maison de disques devraient vite se calmer : bien que non formatées pour les radios, la majorité de ces chansons tristes et lentes mais terriblement addictives risquent d'y faire quelques stations prolongées dans les mois qui viennent. Cela rendra-t-il notre princesse moins mélancolique et esseulée ? On en doute. En bonus : Son rendez-vous manqué avec Lou Reed
On s'en voudrait de ne pas vous livrer cette anecdote. Un morceau de l'album, "Brooklyn Baby" a été écrit avec Lou Reed en tête. Il y est même cité ("My boyfriend's in the band/He plays guitar and I sing Lou Reed"). Elle rêvait de la chanter en duo avec lui. Selon le Guardian, le musicien avait exprimé le désir de la rencontrer. Elle s'est aussitôt envolée pour New York. "J'ai pris le vol de nuit, j'ai atterri à 7h du matin ... et deux minutes après, il mourait", se souvient-elle. Qui sait ce que la rencontre du vieux punk new yorkais et de la sulfureuse Lana aurait pu donner ?
Lana Del Rey est en concert le 21 juin (fête de la musique) à l'Olympia, le 4 juillet à Monaco, le 17 juillet à Carcassonne et le 24 août à Rock en Seine (Paris)
Une chanson donne son nom à l'album, "Ultraviolence". Un titre terriblement sensuel dans lequel la belle tend à glamouriser la violence. Son personnage féminin y est une beauté empoisonnée ("il m'appelait belladone") mais folle d'amour pour un homme qui la frappe - "Il m'a frappée et c'était comme un baiser", "il m'a fait mal mais c'était comme le véritable amour".
Pourtant, le titre de l'album fait référence à un concept plus large. "Dans Ultraviolence, il y a l'idée du masculin qui rencontre le féminin. Mais avant le sens, j'aime juste le mot. Il est devenu le cadre d'un monde sonore que je voulais créer", expliquait-elle à Libé Next il y a quelques semaines.
Si on balaye ses propos tenus depuis deux ans, il saute aux yeux que Lana Del Rey a subi une violence psychologique depuis son accès à la notoriété. Les critiques, en particulier, l'ont beaucoup affectée. Car si une bonne partie de la presse et des réseaux sociaux se sont vite entichés de sa moue boudeuse, l'autre moitié ne lui a pas fait de cadeau. On lui a reproché d'être une créature fabriquée par une maison de disques, de ne pas savoir chanter, d'avoir les lèvres refaites et de feindre une vie de magnifique looseuse trash pour nourrir sa crédibilité.
Ce faisant, personne n'a évoqué ce pour quoi elle brûle d'être reconnue et respectée : le songwriting et la poésie des textes. Dans un entretien au Guardian, cette star blessée assure n'avoir pas aimé un seul instant de sa vie depuis le single "Video Games" qui l'a fait connaître. "J'aimerais être déjà morte", assène-t-elle, ultraviolente. 2. Un Black Keys aux manettes
L'an passé, Lana Del Rey avait désolé ses fans en déclarant à Vogue qu'elle ne ferait pas d'autre album et voulait quitter la musique. Elle disait avoir perdu "sa muse l'inspiration". Pourtant, en décembre 2013, elle enregistre une première version de l'album avec son guitariste Blake Stranahan et un batteur de session aux studios Electric Lady de New York. "Mon modèle de son, c'était les Eagles!", raconte-t-elle dans les Inrocks.
C'est sur ces entrefaites, en fin d'année, qu'elle a rencontré Dan Auerbach, le guitariste des Black Keys, l'un des groupes de rock les plus respectés actuellement, qui signe la production du disque. "Je l'ai rencontré dans un strip-club du Queens (quartier de New York)", raconte-t-elle dans Libé Next. "Ils ont joué un de mes morceaux, nous avons dansé ensemble. Une semaine après, je suis partie enregistrer chez lui à Nashville".
"Il m'a dit que ce que j'avais fait sonnait trop "classic rock" et du coup, on a tout refait ensemble à Nashville, en six semaines, le plus souvent en live…", précise-t-elle aux Inrocks. Des enregistrements réalisés sur du vieux matériel analogique et avec des micros cheap achetés au supermarché du coin pour un son plus vintage.
3. Un léger virage rock "narcotique"
Très langoureux, doté d'une lenteur moite zébrée d'orages électriques, "Ultraviolence" troque donc les beats hip-hop et les cordes orchestrales pour une tonalité plus rock, qui se sent en particulier dans les déchaînements de guitares saturées, comme à la fin de "Shades of cool".
"La première chanson de l'album, "Cruel World", a tout déterminé", se souvient-elle dans les Inrocks. "Géographiquement, elle pose l'album : la guitare de Dan raconte d'emblée la Californie. Il y a, dans le début du texte, une certaine épure, une simplicité. Et puis arrive le refrain avec sa grosse batterie, son désordre électrique… Cette cohabitation entre la normalité et le chaos est assez symbolique de ce que je venais de traverser dans ma vie."
Elle souligne également que l'album a été "réalisé dans une ambiance très nonchalante". De fait, le rythme est franchement ralenti sur "Ultraviolence" par rapport à son prédécesseur. Si cette idée a affolé sa maison de disques, qui craignait de ne pouvoir placer aucun titre en radio, la chanteuse tenait à un tempo reflètant son état d'esprit troublé d'alors. Pour résumer le son du disque, elle et Dan Auerbach parlent de "swing narcotique". 4. Ses thèmes fétiches fidèles au poste
Là où ce disque ne change pas du précédent, c'est sur le thème des chansons de la belle au regard frangé de faux cils : elle creuse toujours les thématiques sombres et troubles de l'amour et de la mort et même de l'amour à mort.
Des filles (Lana au pluriel ?) s'enflamment – "on fire" est l'expression qui revient ici le plus souvent après la "red dress" de "Born to Die" – pour des "bad boys".
Dépendantes à l'amour, elles se donnent corps et âme à ces salauds volages ("Cruel World", "Sad Girl"), en général des rockeurs qui aiment plus la drogue qu'elles ("Shades of Cool") et prennent leur pied à les voir pleurer ("Pretty when you cry", un slow dont la mélodie fait écho à "Hotel California" des Eagles). Le spleen colle décidément à la peau de cette dangereuse sirène, de cette fille fatale mais touchante pas comme les autres.
5. Lana a trouvé sa voix
Certes, l'écriture tourne un peu en rond et ses textes ne seront pas édités à La Pléiade, mais franchement on n'y voit que du feu. Car ce qui frappe en premier à l'écoute de ce disque c'est la voix de Lana. Cherchant moins dans les graves, modulant davantage, minaudant, voire déraillant à dessein ce qui la rend encore plus troublante, elle prend ici une nouvelle ampleur et des libertés qui font toute la force de ces nouvelles chansons.
"Shades of Cool" est à ce titre une merveille où sa voix développe différentes textures et vampe littéralement les tympans. Les craintes de la maison de disques devraient vite se calmer : bien que non formatées pour les radios, la majorité de ces chansons tristes et lentes mais terriblement addictives risquent d'y faire quelques stations prolongées dans les mois qui viennent. Cela rendra-t-il notre princesse moins mélancolique et esseulée ? On en doute. En bonus : Son rendez-vous manqué avec Lou Reed
On s'en voudrait de ne pas vous livrer cette anecdote. Un morceau de l'album, "Brooklyn Baby" a été écrit avec Lou Reed en tête. Il y est même cité ("My boyfriend's in the band/He plays guitar and I sing Lou Reed"). Elle rêvait de la chanter en duo avec lui. Selon le Guardian, le musicien avait exprimé le désir de la rencontrer. Elle s'est aussitôt envolée pour New York. "J'ai pris le vol de nuit, j'ai atterri à 7h du matin ... et deux minutes après, il mourait", se souvient-elle. Qui sait ce que la rencontre du vieux punk new yorkais et de la sulfureuse Lana aurait pu donner ?
Lana Del Rey est en concert le 21 juin (fête de la musique) à l'Olympia, le 4 juillet à Monaco, le 17 juillet à Carcassonne et le 24 août à Rock en Seine (Paris)
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