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Damon Albarn introspectif sur son premier album solo "Everyday Robots"
Damon Albarn est un musicien curieux et boulimique d'expériences. Leader de Blur et des Gorillaz, il a aussi emmené le projet Mali Music, monté les groupes The Good The Bad & the Queen et Rocket Juice and the Moon, écrit deux opéras et autant de musiques de films. Mais il n'avait encore jamais publié d'album solo. Avec le splendide "Everyday Robots", il se dépouille enfin de tous ses masques.
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Temps de lecture : 4min
Un album autobiographique
Sa sensibilité et sa mélancolie, qui ne s'invitaient jusqu'alors qu'en filigrane, apparaissent ici en pleine lumière. De même que sa voix, instrument majeur de l'album le plus introspectif de sa carrière.
C'est durant son travail en 2012 sur l'album de la renaissance de Bobby Womack "The Bravest man in the universe", que l'idée de ce disque en solo a émergé. Suggéré par son collaborateur et ami Richard Russel (patron du label XL Recordings de Adele, Radiohead et The xx), le défi lui a semblé interessant à relever dès lors qu'il a "accepté d'être le sujet du disque et que tout ce que je chante soit du vécu", dit-il au "Monde".
Un retour sur les lieux de sa prime enfance, à Leytonstone, le quartier du nord-est de Londres où il a vécu jusqu'à ses 9 ans, a été le point de départ du disque. Qu'il parle de "puzzle de souvenirs", de "fouilles archéologiques" de sa propre vie ou de contemplation "des vestiges de moi-même", Damon Albarn a donc commencé par une plongée aux fondements de son identité pour se lancer dans cet album de nature autobiographique. "J'ai vraiment eu envie d'emmener les gens dans mon univers à moi, leur raconter des choses qui me sont arrivées", dit-il à "Libération". Le spleen à l'heure du numérique
Il y évoque donc l'enfance ("Hollow Ponds"), l'amour et ses rapports à la drogue (le métaphorique "You and me"), un jeune éléphant rencontré en Tanzanie ("Mr Tembo"), mais surtout l'aliénation des nouvelles technologies et la solitude qu'elles génèrent ("Everyday Robots", "Lonely Press Play", "Hostile"), bien qu'il soit lui-même très technophile.
S'il ne s'agit pas d'un album bilan au plan musical, on ne peut manquer d'y voir, même s'il s'en défend mollement, l'album d'un quarantenaire – il vient de fêter ses 46 ans - enfin en paix avec lui-même. Damon Albarn semble y déposer les armes, un peu las du cirque et des jeux de rôles, prêt à se livrer sans crainte, à se mettre à nu sans honte, réconcilié avec lui-même. La mélancolie, très présente sur cet album, et que l'on est parfois tenté à tort de confondre avec de la nostalgie, n'est pas vraiment nouvelle dans son œuvre. Mais elle est ici creusée, polie, lustrée, comme s'il osait enfin se permettre de l'exhiber et de se lover dans ses bras réconfortants. Un disque minimaliste où sa voix est reine
Pourtant, la plus grande ambition de ce disque sobre et délicat est ailleurs : "emmener ma voix plus loin qu'elle n'est jamais allée", avoue-t-il aux Inrocks. Cette voix, qu'il reconnaît limitée, et ses fêlures, font tout le sel de ce disque particulièrement dépouillé.
"Je voulais un disque minimaliste et moderne, avec peu d'arrangements", se souvient-il dans Libé. "Le résultat ce sont des chansons folk avec des cordes et du piano". Traversées de chœurs gospels et d'une grâce soul, et soutenues par des rythmiques discrètes mais fourmillantes de détails signées du co-producteur Richard Russel. Et des chansons portées, bien sûr, par les merveilleuses mélodies de ce songwriter accompli.
"Everyday Robots" est au final un disque très réussi à condition de l'aborder comme une oeuvre intime, à écouter dans l'intimité, si possible au casque, seule façon d'apprécier véritablement ce face à face les yeux dans les yeux, de cœur à cœur, avec l'artiste. Damon Albarn est en concert le 5 mai à Paris (Alhambra, complet), le 5 juillet aux Nuits de Fourvière (Lyon), le 6 juillet au festival Beauregard (Calvados) et le 9 juillet à Paris (Salle Pleyel, complet, dans le cadre du festival Days Off)
Damon Albarn est l'invité d'Alcaline le Mag sur France 2 jeudi 1er mai à 23h25 (et en replay sur Culturebox). Il y joue trois morceaux enregistrés au Trianon le 25 mars.
Le concert du 5 mai à l'Alhambra est retransmis en streaming sur France Inter
"Everyday Robots" de Damon Albarn (Parlophone/Warner) est sorti le 28 avril 2014
Sa sensibilité et sa mélancolie, qui ne s'invitaient jusqu'alors qu'en filigrane, apparaissent ici en pleine lumière. De même que sa voix, instrument majeur de l'album le plus introspectif de sa carrière.
C'est durant son travail en 2012 sur l'album de la renaissance de Bobby Womack "The Bravest man in the universe", que l'idée de ce disque en solo a émergé. Suggéré par son collaborateur et ami Richard Russel (patron du label XL Recordings de Adele, Radiohead et The xx), le défi lui a semblé interessant à relever dès lors qu'il a "accepté d'être le sujet du disque et que tout ce que je chante soit du vécu", dit-il au "Monde".
Un retour sur les lieux de sa prime enfance, à Leytonstone, le quartier du nord-est de Londres où il a vécu jusqu'à ses 9 ans, a été le point de départ du disque. Qu'il parle de "puzzle de souvenirs", de "fouilles archéologiques" de sa propre vie ou de contemplation "des vestiges de moi-même", Damon Albarn a donc commencé par une plongée aux fondements de son identité pour se lancer dans cet album de nature autobiographique. "J'ai vraiment eu envie d'emmener les gens dans mon univers à moi, leur raconter des choses qui me sont arrivées", dit-il à "Libération". Le spleen à l'heure du numérique
Il y évoque donc l'enfance ("Hollow Ponds"), l'amour et ses rapports à la drogue (le métaphorique "You and me"), un jeune éléphant rencontré en Tanzanie ("Mr Tembo"), mais surtout l'aliénation des nouvelles technologies et la solitude qu'elles génèrent ("Everyday Robots", "Lonely Press Play", "Hostile"), bien qu'il soit lui-même très technophile.
S'il ne s'agit pas d'un album bilan au plan musical, on ne peut manquer d'y voir, même s'il s'en défend mollement, l'album d'un quarantenaire – il vient de fêter ses 46 ans - enfin en paix avec lui-même. Damon Albarn semble y déposer les armes, un peu las du cirque et des jeux de rôles, prêt à se livrer sans crainte, à se mettre à nu sans honte, réconcilié avec lui-même. La mélancolie, très présente sur cet album, et que l'on est parfois tenté à tort de confondre avec de la nostalgie, n'est pas vraiment nouvelle dans son œuvre. Mais elle est ici creusée, polie, lustrée, comme s'il osait enfin se permettre de l'exhiber et de se lover dans ses bras réconfortants. Un disque minimaliste où sa voix est reine
Pourtant, la plus grande ambition de ce disque sobre et délicat est ailleurs : "emmener ma voix plus loin qu'elle n'est jamais allée", avoue-t-il aux Inrocks. Cette voix, qu'il reconnaît limitée, et ses fêlures, font tout le sel de ce disque particulièrement dépouillé.
"Je voulais un disque minimaliste et moderne, avec peu d'arrangements", se souvient-il dans Libé. "Le résultat ce sont des chansons folk avec des cordes et du piano". Traversées de chœurs gospels et d'une grâce soul, et soutenues par des rythmiques discrètes mais fourmillantes de détails signées du co-producteur Richard Russel. Et des chansons portées, bien sûr, par les merveilleuses mélodies de ce songwriter accompli.
"Everyday Robots" est au final un disque très réussi à condition de l'aborder comme une oeuvre intime, à écouter dans l'intimité, si possible au casque, seule façon d'apprécier véritablement ce face à face les yeux dans les yeux, de cœur à cœur, avec l'artiste. Damon Albarn est en concert le 5 mai à Paris (Alhambra, complet), le 5 juillet aux Nuits de Fourvière (Lyon), le 6 juillet au festival Beauregard (Calvados) et le 9 juillet à Paris (Salle Pleyel, complet, dans le cadre du festival Days Off)
Damon Albarn est l'invité d'Alcaline le Mag sur France 2 jeudi 1er mai à 23h25 (et en replay sur Culturebox). Il y joue trois morceaux enregistrés au Trianon le 25 mars.
Le concert du 5 mai à l'Alhambra est retransmis en streaming sur France Inter
"Everyday Robots" de Damon Albarn (Parlophone/Warner) est sorti le 28 avril 2014
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