"Godounov c'est Poutine", Olivier Py monte l'opéra de Moussorgski en résonance avec l'actualité au Capitole de Toulouse
Le théâtre du Capitole de Toulouse présente jusqu'au 3 décembre 2023 l'un des chefs-d'œuvre de l'art lyrique russe, Boris Godounov. Aux manettes de ce monument signé Modeste Moussorgski (1839-1881), le metteur en scène Olivier Py (directeur du théâtre du Châtelet de Paris) nous plonge dans les heures tourmentées de l'empire russe et de son rapport au pouvoir.
Critique du pouvoir russe
Sur la grande scène du Capitole, le noir est de mise. Dès les premières notes, le décor est planté. Des militaires menacent le peuple. Le Z symbole de l’armée Russe s’affiche en scène d’ouverture. L’opéra Boris Godounov parle de la Russie, de la dictature et de la violence du pouvoir. "Ça fait un écho assourdissant à ce qui se passe aujourd'hui en Russie, car l'œuvre parle principalement des violences du politique dans toute l'histoire de la Russie. C’est une analyse incroyable de la façon dont ce grand peuple n'a jamais été capable de faire une démocratie", assure le metteur en scène.
Dans sa mise en scène, Olivier Py rien n’a été laissé au hasard. Les décors, les costumes et l'interprétation des chanteurs mettent en lumière la dimension baroque et grandiose de l'œuvre de Moussorgski. "Olivier Py a construit son spectacle sur une belle scénographie qui respecte la dramaturgie, la tension des personnages, tous les enjeux de cette histoire politique de malade", rapporte Bruno Vincent, chanteur dans les chœurs.
Profondément attaché à la culture russe, Olivier Py n'hésite pas à critiquer les différents pouvoirs tyranniques en place à travers les époques y compris celui de la Russie contemporaine.
Aujourd'hui on a vraiment l'impression que Boris Godounov c'est Vladimir Poutine et inversement
Olivier PyMetteur en scène
Une œuvre révolutionnaire pour l'époque
Librement adaptée de la tragédie historique éponyme d'Alexandre Pouchkine et de L'Histoire de l'État russe de Nikolaï Karamzine, l'intrigue de Boris Godounov est inspirée d’un véritable fait historique : l’accès controversé au trône du tsar Godounov à la fin du XVIe siècle. Olivier Py a choisi de mettre en scène la version originale de Moussorgski écrite en 1869. Une pièce en sept tableaux qui a été maintes fois révisée et même interdite sous le règne de Staline. "C'est un opéra révolutionnaire qui n'a pas été compris par les gens de l'époque. Ce drame musical montre précisément la relation entre le tsar et le peuple", explique Mikhail Timoshenko, baryton-basse interprète Andreï Chtchelkalov.
L'histoire de l'opéra : Boris Godounov devient tsar après avoir fait assassiner Dimitri, l'héritier légitime d'Ivan le Terrible. Bien qu'il gouverne humainement, le pays sombre dans le chaos et la pauvreté. Un jeune moine vagabond, Gregori, se fait passer pour Dimitri et réussit à épouser Marina, une femme noble originaire de Pologne qui déguise sa volonté de puissance en amour passionné. Après avoir convaincu le roi de Pologne de sa légitimité, le faux Dimitri convainc les Polonais d'envahir la Russie. Boris, rongé par la culpabilité et le remords et hanté par des hallucinations, sombre dans la folie et meurt en implorant la grâce divine.
Créé au Capitole de Toulouse pour cinq représentations, "Boris Godounov", mis en scène d'Olivier Py et orchestré par le directeur musical Andris Poga est joué jusqu'au 3 décembre 2023.
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