Steve Shehan, percussionniste et prince du hang, en concert à Paris
Des invités de prestige
La rencontre
Installé dans le Loiret, Steve Shehan a fait un aller-retour à Paris, le lundi 25 novembre, pour quelques rendez-vous dont un entretien avec Culturebox. Le temps de défendre son projet titré "Hang with you", un joli jeu de mots combinant le nom de son instrument et une expression anglaise qui parle de passer du temps ensemble, de partager.
- Culturebox : Comment avez-vous découvert le hang ?
- Steve Shehan : L'instrument est né en Suisse en 2000 à Berne. Je l'ai découvert par hasard avec Paul Simon. En 1999, avant sa sortie officielle, on m'a mis un prototype de l'instrument entre les mains. Un prototype d'une gamme un peu Antilles façon Carlos (il chantonne le thème de "Rosalie") que je trouvais sympathique, sans plus... Puis un ami m'a mis en relation avec les inventeurs, on a discuté au téléphone et on s'est vu. Ils m'ont proposé de concevoir d'autres types de gammes. Du coup, on s'est orienté vers des gammes au quart de ton, indonésiennes, iraniennes, hongroises, pentatoniques. Là, il y avait vraiment une ouverture, c'était révolutionnaire. A l'époque, j'ai été - et je le suis aujourd'hui encore - l'un des rares à mettre le hang dans un contexte orchestral. Ce qui est intéressant, c'est d'aller voir ce qu'on peut faire avec, en le forçant un peu, avec ses huit notes. Il suffit de travailler l'harmonie autour et les notes deviennent presque d'autres notes. Cela, ça m'intéresse.
- Qui sont les inventeurs du hang ?
- C'est un couple (Felix Rohner et Sabina Schärer, ndlr) qui vit en Suisse. Lui a longtemps travaillé avec des steeldrums, des tambours de Trinidad. Il y a vingt ou trente ans, il a appris à en faire. C'est tout un art, c'est très difficile. Très vite, il s'est demandé si on ne pourrait pas adapter tout ça. Le steeldrum, c'est gros, coupant, lourd, on joue avec des baguettes... Il a eu une idée géniale qui a nécessité des années de mise au point, c'est pour ça que c'est admirable et qu'on devrait rendre un hommage beaucoup plus conséquent à ces gens qui ont vraiment ouvert un truc. Depuis, tout le monde s'est engouffré dedans, on trouve partout des fabricants qui n'ont rien à faire de ce couple qui a vraiment révolutionné la musique ! Il n'y a pas d'électronique, c'est un instrument portable, en fer, plus léger, plus facile à jouer, ça se joue avec les doigts, il n'y a pas besoin de baguettes. Le truc est magique !
- Pas tout au début. Il y a une part de magie dans le sens où j'ai d'abord commencé à faire l'album, puis les invités se sont proposés d'eux-mêmes, par des hasards, quand je leur faisais écouter des choses. Paul Simon devait être dans cet album, mais comme il a mis une éternité à m'envoyer sa contribution, je lui ai dit qu'il serait dans le prochain disque ! Finalement, pour le morceau qui lui était destiné, "Yaar", c'est Golshifteh Farahani qui intervient à sa place. Mais dans cet album, tout s'est passé comme ça, de façon étrange, au gré des rencontres. Je me souviens du chanteur d'opéra, Ugo Rabec. Il écoute un morceau, il dit : "J'adore ! Je peux essayer un truc ?" Il chante, et là, il m'a scotché ! Puis il prend son violon, je ne savais même pas qu'il en jouait, il propose d'essayer "un autre truc", je l'enregistre... One take ! Une prise. Le chorus (improvisation, ndlr) qu'il a fait, il tue ! Tout est comme ça dans cet album. Des rencontres, de l'humain, des potes qui passent, en voyage, du feeling. C'est comme ça que je fonctionne. - Quelques autres souvenirs marquants dans l'élaboration de ce disque ?
- Pour un morceau... je joue dans les arbres ! Pour ce titre intitulé "Princeps", j'ai réalisé les rythmiques en Mauritanie. Vous jouez l'arbre, et l'arbre répond ! il y a aussi un morceau, "Les Oiseaux ne me dérangent pas" que j'ai intitulé ainsi à la suite d'une remarque inquiète de mon ingé-son. Quand j'enregistre l'été, s'il y a un défaut, je m'en sers. Quand il fait bon, je laisse tout ouvert. Dans mes albums, il y a toujours des grillons, des grenouilles, je les enregistre depuis trente ans, je les adore, je n'y peux rien ! Ce jour-là, il y avait des oiseaux. L'ingé qui était en train d'enregistrer les percussions m'a dit : "Steve, attends, il y a un oiseau qui est passé, il a peut-être fait du bruit dans le truc..." Je lui ai dit : "Tu sais, les oiseaux ne me dérangent pas !" Et c'est resté.
- L’album se termine avec le morceau « Djanet my Home », dans lequel on entend un poème en tamacheq, la langue touareg, récité par votre ami Baly Othmani…
(Propos recueillis par A.Y.)
Steve Shehan (et divers invités) en concert à Paris, à L'Alhambra
Jeudi 12 décembre 2013, 20H30
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