Mohammad Assaf est accueilli par des milliers de fans en Cisjordanie
De Bethléem (sud) à Jéricho (est), des dizaines de milliers de personnes se pressent à chacun des concerts de Mohammed Assaf depuis le lancement il y a une semaine de sa tournée en Cisjordanie, largement improvisée mais triomphale.
Quand il est rentré chez lui dans la bande de Gaza après sa victoire, il y a deux semaines, il a eu du mal à atteindre la maison familiale de Khan Younes tellement la foule qui l’attendait était dense. Il a été accueilli officiellement au nom du gouvernement du Hamas par le directeur du ministère de la Culture Fikri Jaouda. Au départ, le parti au pouvoir à Gaza ne voyait pas d’un très bon œil ce jeune homme qui pratiquait un art peu religieux et l’idolâtrie qu’il suscitait.
Mais il a été obligé de se rallier à l’engouement populaire.
40.000 fans à Ramallah
La première prestation de Mohammad Assaf, le 1er juillet à Ramallah, devant plus de 40.000 spectateurs déchaînés, sur une place à proximité du mausolée du défunt président palestinien Yasser Arafat, a dû être écourtée pour des raisons de sécurité.
"Nous étions très bien installés, mais nous avons failli mourir écrasés", s'amuse le député français Michel Issindou, qui conduisait une mission du groupe d'amitié France-Palestine à l'Assemblée nationale, saluant un "enthousiasme de foule très sympathique".
La plupart des concerts sont gratuits, mais pour les autres, les tickets coûtent jusqu'à 450 shekels (96 euros) la place, alors que le salaire mensuel moyen avoisine les 1.500 shekels. "Les tickets sont partis en 48 heures", indique l'organisateur, Mounir al-Tarifi, qui avoue avoir été surpris par l'ampleur de l'"Assafmania".
"Les Palestiniens ont besoin de joie"
Le président de la Fédération internationale de football (Fifa) Joseph Blatter, qui a inauguré un stade à Tulkarem, dans le nord de la Cisjordanie, en compagnie de Mohammad Assaf, a lui-même constaté la popularité exceptionnelle de ce chanteur de 23 ans.
"Il était clair que les gens de Tulkarem, en particulier les jeunes, étaient plus intéressés par Assaf que par nous, donc je pense qu'il devrait chanter à l'ouverture de la prochaine Coupe du Monde au Brésil l'année prochaine, avec d'autres chanteurs du monde entier", a déclaré Joseph Blatter.
"Les gens ont abandonné la politique aux politiciens et le fait que Mohammad Assaf ait dominé l'actualité montre que les Palestiniens ont besoin de joie", reconnaît le vice-ministre de l'Information de l'Autorité, Mahmoud Khalifa.
Une ONG israélienne souligne le statut exceptionnel du chanteur
"La symbolique nationale de Mohammad Assaf est plus importante que son talent de chanteur, c'est un réfugié, venant d'un des camps les plus pauvres, il représente tous les Palestiniens", estime le politologue palestinien Abdelmajid Souilem.
Mohammad Assaf l'a emporté en puisant largement dans le répertoire patriotique palestinien. Mais il chante aussi des classiques de la chanson arabe. Et le jury a récompensé une voix exceptionnelle, même s’il a aussi été séduit par son sourire et par son répertoire.
Après son retour à Gaza, Israël a laissé le chanteur passer en Cisjordanie. Et l'ONG israélienne Gisha, qui milite pour la liberté de mouvement des Palestiniens, a souligné que la venue du chanteur était "exceptionnelle non seulement parce que les Palestiniens considèrent Assaf comme un héros national mais aussi parce qu'elle contredit la politique d'Israël consistant à bloquer l'accès entre Gaza et la Cisjordanie".
"Si Assaf était rien moins qu'une superstar, il aurait peu de chances de poser le pied en Cisjordanie, en raison de la politique israélienne limitant ce voyage à des ‘circonstances humanitaires exceptionnelles’", a rappelé Gisha dans un communiqué.
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