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Décès du pianiste cubain Bebo Valdes, pionnier du Latin Jazz

Géant de la musique cubaine et légende du jazz latino, Bebo Valdes est mort vendredi à l'âge de 94 ans, a annoncé samedi une de ses proches. Le pianiste charismatique, exilé dans les années 60 après la révolution castriste, n'était jamais retourné dans son pays. Ces dernières années, il vivait au sud de l'Espagne, mais il s'est éteint en Suède, où vivent plusieurs de ses enfants.
Article rédigé par Laure Narlian
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Bebo Valdes en Espagne en 2008.
 (Juan Carlos Rojas / AFP)

Atteint de la maladie d'Alzheimer, Bebo Valdes avait connu un succès international majeur et tardif ces dernières années grâce à un documentaire du cinéaste espagnol Fernando Truba "Calle 54", sur les musiciens cubains de Latin Jazz.

Figure du club Tropicana, il s'exile en 1960
Né en 1918 dans la localité de Quivican, Valdès avait rejoint la Havane à 17 ans pour étudier au Conservatoire. Dans les années 50, au faîte de l'époque mambo, il dirige le Tropicana, célèbre club et cabaret de La Havane où font halte les plus grands chanteurs et musiciens internationaux, dont les Américains Nat King Cole et Woody Herman. 

Inspirés par leurs racines et les musiciens de passage à La Havane, les artistes cubains crééent de nouveaux styles. En 1952, le label Verve recrute Bebo Valdès pour enregistrer la première session de jazz afro-cubain à la Havane. Peu après, le label signe un contrat de quatre ans avec le pianiste.

A la tête de son orchestre Sabor de Cuba, Valdes développe un nouveau rythme, le batanga, qui incorpore pour la première fois le bata, le double rythme sacré en usage dans les rituels de la religion africaine Yoruba, dont l'adaptation cubaine et caraïbe a donné la santeria.

Peu après la révolution castriste de 1959, alors qu'il est sommé un jour par des miliciens d'assister au discours d'un responsable sur une place de la ville, il sent que sa place n'est plus à Cuba. Il quitte le pays pour Mexico en octobre 1960, laissant derrière lui ses cinq enfants, dont celui qui deviendra le célèbre pianiste Chucho Valdès.
Un succès international à l'automne de sa vie
En tournée européenne, il rencontre en Suède sa nouvelle femme, Rose Marie Pehrso, avec laquelle il a eu deux enfants. Devenu citoyen suédois, il continue de jouer pour vivre mais perd en notoriété. Jusqu'à sa redécouverte dans le documentaire "Calle 54" signé du cinéaste espagnol Fernando Trueba, qui le sort de l'anonymat. A 76 ans, le musicien va renouer spectaculairement avec le succès.

Il obtient en quelques années plusieurs Grammys Awards avec ses nouveaux enregistrements.  Il commence par un album avec le saxophoniste Paquito D'Rivera, puis il enregistre "El arte del sabor" (2001) avec Cachao et Patato Valdés, album qui recevra un Grammy.

En 2002, Bebo Valdes accompagne le chanteur flamenco Diego el Cigala pour le disque" Lágrimas negras",  succès international également récompensé par un Grammy. En 2010, il compose la bande originale du film d'aninmation de Fernando Trueba et Javier Mariscal, "Chico et Rita", librement inspiré de sa vie, film nominé aux Oscars 2012.
Son dernier disque, il l'avait enregistré avec son fils Chucho Valdès. Ils y reprenaient nombre de classiques de la musique cubaine, y compris certaines de ses propres compositions.

"L'histoire du latin jazz est une très longue histoire", déclarait-il en 2005 dans une interview citée par le Billboard. "Cela a commencé lorsque les Européens sont venus aux Amériques sans leurs femmes blanches; des mulâtres sont nés avec les femmes esclaves. Et la musique européenne s'est combinée elle aussi avec les ryhtmes africains. C'est une fusion des races qui a créé tous les rythmes que nous connaissons aujourd'hui sur le continent américain, du jazz à la musique cubaine - quel groupe n'a pas son conga aujourd'hui sur scène ? Le Latin Jazz est un mélange de tout ça et il continue d'évoluer en empruntant différents chemins." Il vient de perdre avec lui une de ses figures majeures.

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