The Strokes au Lollapalooza Paris : une dose de rock à l'état pur
Les Strokes se sont produits au festival Lollapalooza Paris pour une unique date en France, alors qu'ils n'y avaient pas joué depuis 2011.
“I wanna be forgotten, I don’t want to be reminded” ("je veux être oublié, je ne veux pas qu’on se rappelle de moi") chantait Julian Casablancas en ouverture du deuxième album des Strokes, Room on fire, sorti en 2003.
Plus de quinze ans plus tard, ce sont des centaines de fans qui hurlent son nom, trépignant d’impatience de voir le brun ténébreux et sa bande enfin débarquer sur scène.
Après 20ans d’attente pour les voir enfin sur scène... reste plus que 2h50mn de patience!!
— ecolocomotion (@ecolocomotion) 21 juillet 2019
-> The Strokes ! — participe à Lollapalooza Paris 2019
Des fans impatients
Et pour certains, l’attente a été longue. Cela fait plus de dix ans que Sébastien, qui arbore fièrement un t-shirt à l’effigie du groupe, est fan des Strokes. Ce soir, c’est la première fois qu’il a l’occasion de les voir sur scène. Plus d’une heure avant l’horaire annoncé, les fans comme lui se bousculent pour être au plus près de la scène.
Un peu derrière Sébastien, Arthur ne tient plus en place. Il a déjà pu voir ses idoles sur scène, une fois il y a huit ans. “Je n’ai pas beaucoup de souvenirs, on s’est fait écraser sur les barrières et on a vite été évacués” sourit le jeune homme avec nostalgie. “Avec les Strokes, j’ai découvert que la bonne musique existait”, poursuit Arthur, une bière à la main et un t-shirt du groupe sur le dos.
The Strokes fait partie de la petite catégorie des grands groupes qui ont laissé une marque indélébile sur l’histoire de la musique, et bouleversé toute une génération.
"Je me sens comme une groupie de 14 ans"
Alors que les représentants de cette génération trépignent devant la Main Stage 1 du festival, le son hip-hop des américains Migos fait sauter les foules à quelques dizaines de mètres de là.
“Je me sens comme une groupie de 14 ans”, lance un homme âgé d’une trentaine d’années à ses voisins de concert. A force d’être collés les uns contre les autres, les langues se délient, et les liens se créent. On discute de l’album préféré, de la chanson que l'on espère entendre. L’attente, qui semble sur le moment insupportable, fait finalement partie intégrante du show.
Le groupe arrive enfin sur scène avec quelques minutes de retard, sous les hurlements des fans en délire. Derrière les premiers rangs surchauffés, des milliers de festivaliers, amateurs ou curieux, se sont amassés pour profiter du show.
Lunettes rétro sur le nez et coupe de cheveux surprenante (mi-coupe au bol mi-mulet, qui serait ridicule sur n’importe qui d’autre), Julian Casablancas s’empare fermement du micro, et sur les guitares saturées de ses deux acolytes (Albert Hammond Jr. et Nick Valensi), il entame Heart in a Cage, issu de l’album First Impression of Earth, sorti en 2005. A droite de la scène, un écran affiche les décibels A qui montent, jusqu’à dépasser les 100.
Des problèmes de son
Le groupe enchaîne avec le classique You Only Live Once, toujours du même album. Malgré les problèmes de balance - la voix si singulière de Julian est voilée et trop faible par rapport aux instruments -, le public est déchaîné.
Les plus excités commencent à se bousculer jusqu’à former de délicieux pogos. Des sourires immenses se dessinent sur des milliers de visages, plus ou moins jeunes, qui dans l’odeur de poussière remuée et de transpiration, partagent ensemble ce moment de communion.
“Paris is beautiful”, lance Julian entre deux titres, avec cette nonchalance élégante qui lui colle à la peau. A sa gauche, Albert Hammond Jr, costume trois pièces bandé, joue avec le public comme un enfant taquin. A sa droite, Nick Valensi, en chemise à fleurs et coupe à la Ronnie Wood, se fait plus discret, mais pas moins efficace.
The Modern Age, New York City Cops, Reptilia, Razorblade, On the Other Side… Le groupe enchaîne les tubes, pour le plus grand plaisir du public qui chante (ou crie) religieusement les paroles sombres écrites par Julian.
"Allez les bleus"
Entre les titres s’imposent des réglages techniques qui cassent le rythme. Julian comble les blancs comme il peut : quelques mots de français (il a étudié au lycée français de New-York), des blagues lunaires. “Tu as essayé d’éteindre et de rallumer ta guitare ?”, demande-t-il à Nick Valensi. Il tend le micro au batteur Fabrizio Moretti qui lâche un “Allez les bleus”. Il n’en fallait pas plus pour que la foule chante son amour pour l’équipe de France, pendant que les techniciens s’affairent.
Sans que les problèmes de son ne soient vraiment réglés, le show reprend, toujours aussi survolté. La complicité naturelle de cette bande de potes new-yorkais, qui jouent ensemble depuis plus de vingt ans, crève les yeux, et les oreilles. Les riffs de guitare des années 2000 n’ont pas pris une ride, ni perdu en précision.
Fuckin amazing pic.twitter.com/P6uMXKZ9Wt
— GoldyB (@Goldybordeaux) 21 juillet 2019
Un concert trop court
Le concert atteint son point d’orgue avec Is This It et Last Nite, qui viennent clore en beauté cet épisode musical intense. Deux titres phares de leur répertoire, issus de leur premier album, Is This It, sorti en 2001, qui marque un tournant dans l'histoire du rock moderne.
Immense ovation à la fin du concert, les festivaliers en veulent encore et le font entendre. Une heure et quinze minutes de concert, c’est court pour un groupe aussi rare. La dernière représentation des Strokes dans l'Hexagone remonte à 2011.
Malheureusement, la voix de Nekfeu résonne déjà du côté de la Main Stage 2, et les Strokes ne reviendront pas. Pas de frustration majeure quant à la setlist, une bande originale de l'adolescence de beaucoup de fans, pleine de nostalgie, avec un petit regret pour l'énergique The End has no End passée à la trappe. Alors que le groupe n’a rien sorti depuis le très bon Comedown Machine en 2013, certains espéraient entendre des inédits, qui auraient annoncé le grand retour tant attendu de ceux qu'on a longtemps surnommés les “sauveurs du rock”.
En attendant un possible come-back fantasmé, le groupe a offert à Lollapalooza Paris un vrai concert de rock à l’état pur, teinté d’une douce nostalgie et porté par un public fidèle et exalté. C’est un fan des premiers rangs qui résume le mieux l’état d’esprit général à la fin du concert : “Julian est une putain de rock star."
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