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"Golden Boy" : Watermelon Slim, la voix de l’Amérique authentique

Avec son visage buriné et cabossé qui évoque à lui seul toute une vie, Watermelon Slim, de son vrai nom Bill Homans, représente cette Amérique profonde. Celle des motels sur les bords des routes désertes, celle des bars enfumés. Sa voix éraillée continue de redonner vie aux petites gens sur son dernier album enregistré au Canada, "Golden Boy", qui sort chez Dixie Frog le 28 avril.
Article rédigé par Jean-François Convert
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Watermelon Slim dans le clip de son single "Pickup My Guidon"
 (Mike Latschislaw)

Le premier morceau met tout de suite dans l’ambiance : avec "Pick up my guidon" (prends mon étendard comme guide), on est bien de l'autre côté de l'Atlantique et on va voyager à travers l'histoire américano-canadienne que semble connaitre sur le bout des doigts notre poète à l'étrange surnom de "Pastèque mince".

On sent tout de suite le poids du vécu sur son visage. Une vie faite de galères, mais aussi de combats et de convictions.
Un visage marqué qui en dit long
 (Mike Latschislaw)
Engagé volontaire au Vietnam, il y a ressenti une aversion pour la guerre et la hiérarchie militaire. De retour au pays, il est devenu membre à vie de l’organisation Vietnam Veterans against the war (anciens combattants du Vietnam opposés à la guerre) qu’il cite avec fierté dans le livret du CD tout en leur dédiant son album. Cet engagement (il a également été militant socialiste) se ressent dans ses textes qui redonnent de la voix et de la visibilité aux déshérités du rêve américain.
Ainsi dans "Mean streets", il raconte le quotidien des SDF, ou dans "Winners of us all" il n’oublie pas les laissés pour compte de la société de l’oncle Sam.
Une démarche qui n’est pas sans rappeler celle du Springsteen de Nebraska.
L’écriture mêle habilement la revendication sociale à la poésie et une érudition certaine : dans ses mentors il cite aussi bien Muddy Waters et Pete Seeger que William Shakespeare.

Des références dans la pure tradition américaine

Comme il l’écrit dans les remerciements du disque, il adore le Canada où a été enregistré l’album, et auquel il déclare son amour notamment à travers une reprise de "Barett’s privateers", un chant de corsaires devenu l’hymne non-officiel canadien. :
Il vit maintenant à Clarksdale (qui abrite le fameux Crossroads où Robert Johnson aurait passé un pacte avec le diable), et plusieurs de ses morceaux sont imprégnés de ce blues des origines. Ainsi ce "Northern blues" qui semble tout droit inspiré de "I can't be satisfied" de Muddy Waters, ou "You're going to need somebody on your bond", avec ce son caractéristique de guitare à résonnateur métallique.
D'ailleurs, pour les "guitar addicts", Watermelon Slim possède une particularité : on connait les guitaristes qui jouent du slide sur guitare dobro à plat sur les genoux  façon lap-steel, (comme par exemple Ben Harper, John Butler ou même David Gilmour). Il est aussi courant chez certains guitaristes gauchers d'avoir les cordes inversées (c'est le cas par exemple des légendaires Otis Rush Albert King, ou plus récemment Big Daddy Wilson). Et bien Watermelon Slim cumule les deux !
Du lap steel avec cordes inversées
 (Mike Latschislaw)
Au delà du blues, les influences remontent plus loin encore, aux origines mêmes de l’Amérique : que ce soit la mélodie folk de "WBCN" qui semble dater de la Guerre d’Indépendance ou de celle de Sécession, ou encore les tonalités amérindiennes des incantations dans l'intro de "Wolf cry".
Cette épopée à travers l'imaginaire de l'histoire américaine se termine sur un hommage à JFK "Dark genius", comme pour nous raconter qu'il existe une autre Amérique que celle que l'on connait actuellement : l'Amérique de la tolérance, du vivre ensemble, du progès social, celle des "petites gens" qui en font un grand pays.
Watermelon Slim sera en concert le 1er juillet au Sunset à Paris, et les 7 et 8 juillet au festival Cognac Blues Passions

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