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Franck Tortiller revisite une nouvelle fois la musique de Led Zeppelin en version jazz

Plus de 15 ans après son projet "Close To Heaven - A Tribute to Led Zeppelin", l’ancien directeur de l'Orchestre national de jazz Franck Tortiller reprend à nouveau des morceaux du légendaire groupe de hard-rock sur son dernier disque "Back To Heaven", sorti le 11 mars.

Article rédigé par Jean-François Convert
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 5min
Franck Tortiller (DIDIER FERRY)

Le décloisonnement des genres musicaux offre toujours des perspectives intéressantes et permet de redécouvrir des airs connus sous d’autres angles. Si le jazz a de tout temps collaboré avec la chanson traditionnelle ou très souvent flirté avec la pop, ses incursions dans le hard-rock sont plus rares. Led Zeppelin en version jazz ? C’est ce que propose Franck Tortiller dans son dernier album Back To Heaven. Il a répondu à nos questions.

Un premier volume en 2006

Vibraphoniste émérite passé par le conservatoire, musicien et compositeur de jazz reconnu, directeur de l'Orchestre national de jazz de 2005 à 2008, Franck Tortiller n’en reste pas moins un amateur de rock, une musique avec laquelle il a grandi. Alors rien de plus naturel pour lui que d’avoir adapté des morceaux de Led Zeppelin dans le style jazz. En 2006, il sort l’album Close To Heaven - A Tribute to Led Zeppelin.

Une démarche qui surprend l’entourage professionnel de Franck Tortiller. Pourquoi le Directeur de l'Orchestre national de jazz jouerait-il des reprises du groupe le plus emblématique du hard-rock ? La réponse est simple : "C’est parce que j’aime cette musique" réplique l'intéressé, qui déjà à l’époque envisage une suite. "C’est tellement riche comme musique, il y a tellement de possibilités". Mais la vie fait que le projet ne se réalise pas tout de suite, et c’est finalement plus de 15 ans après que Back to heaven – Led Zeppelin Chapter Two voit le jour.

Un nouvel orchestre

"Mis à part le batteur-chanteur Patrick Héral qui est de la même génération que moi, tous les autres musiciens ont autour de la trentaine" explique Franck Tortiller. "Du coup, ils ont un rapport à Led Zeppelin beaucoup moins romantique que le nôtre. Et c’était l’occasion de faire entrer en collision nos ressentis, repenser cette musique avec tout l’apport des influences actuelles, le hip-hop, le rap…"

L'orchestre actuel de Franck Tortiller (JACQUES THAMEE)

Et force est de constater que les hymnes légendaires du groupe sont considérablement modernisés. Tout en s’appropriant la musique de Led Zeppelin avec un respect viscéral, Franck Tortiller a souhaité s’entourer de "jeunes gens qui rentrent dans cet univers et le bousculent beaucoup". Garder l’esprit de l’œuvre originale mais en lui apportant de la fraîcheur, et ne pas s’enfermer dans un hommage académique. 

Je ne voulais surtout pas quelque chose de conservateur

Franck Tortiller

à propos de son album "Back to heaven"

L’influence urbaine est particulièrement présente dans The Crunge, chanson qui, déjà à l’origine, usait du clin d’œil envers le père du funk James Brown, ainsi que le morceau d’ouverture, l'épique Achilles Last Stand.

Et pour résumer sa démarche, Franck Tortiller aime à rappeler cette phrase de Miles Davis : "Le premier pas d’un compositeur de jazz c’est de choisir avec qui on joue". Le précepte a parfaitement fonctionné. L’alchimie entre les membres du groupe a permis une éclosion foisonnante d'idées.

Un jeu de piste musical

Back to heaven ne se résume pas à des adaptations cadrées et indépendantes de chansons rentrées dans la culture populaire. Au contraire, l’album entier puise dans le répertoire zeppelinien par couches successives. On entend ainsi de brèves citations d’autres morceaux qui viennent se glisser sans prévenir.

Par exemple, l’intro originelle de Thank you ouvre et referme Going to California, la rythmique rapide de The song remains the same s’immisce dans le non moins rapide Achilles Last Stand, et Dazed and confused voit figurer le riff de Out on the tiles, tout en se terminant sur Black mountain side.

Franck Tortiller au vibraphone (THIERRY DUBUC)

Un jeu de piste musical jouissif où l’auditeur attentif cherche à reconnaître les moindres phrases aux détours de changements harmoniques ou de ruptures rythmiques. "Dans tous les titres il y a au moins deux citations" précise Franck Tortiller. Avis aux fans...

Au-delà du clin d’œil, l’idée pour moi c’est d’utiliser un matériel et un univers musical dans toute sa forme. C’est comme l’ingrédient d’un plat.

Franck Tortiller

au sujet des citations musicales

Et ce labyrinthe se termine sur une adaptation de Immigrant song qui résonne avec la période actuelle. Si la chanson de Led Zeppelin faisait référence aux légendes scandinaves dont est féru Robert Plant, Franck Tortiller choisit de débuter sa reprise par une ambiance orientale. "Jouer un morceau qui s’appelle 'Immigrant song' aujourd’hui, forcément ça renvoie à beaucoup de choses". Et même si le duo Page-Plant avait déjà lorgné fortement vers la musique nord-africaine, Franck Tortiller inscrit réellement la musique de Led Zeppelin dans notre présent.

"Le jazz est une musique d’appropriation, elle se nourrit de plein de musiques différentes" rappelle-t-il. Une réflexion aux accents humanistes qui ne peut que faire écho dans le monde d’aujourd’hui.

La pochette de l'album "Back to heaven - Led Zeppelin Chapter Two" de Franck Tortiller (MCO - Socadisc)

L'album "Back to heaven - Led Zeppelin Chapter Two" de Franck Tortiller est sorti le 11 mars chez MCO – Socadisc

Franck Tortiller sera en concert au Pan Piper (Paris) ce dimanche 20 mars

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