Eurovision 2024 : le groupe lillois Ladaniva, choix "surréaliste" pour représenter l'Arménie

La formation musicale est composée de la chanteuse Jaklin Baghdasaryan, Arménienne de naissance, et de Louis Thomas, multi-instrumentiste lillois. Ladaniva interprètera "Jako" en Suède, où se tiendra le concours de chant.
Article rédigé par franceinfo Culture avec AFP
France Télévisions - Rédaction Culture
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La chanteuse arménienne Jaklin Baghdasaryan (à gauche) et le musicien français Louis Thomas forment le groupe Ladaniva. Le duo, qui représentera l'Arménie à l'Eurovision 2024, pose lors d'une séance photo à Paris, le 17 avril 2024. (JOEL SAGET / AFP)

Quelques années après un premier succès aussi foudroyant qu'inattendu, porté par la diaspora arménienne, le duo lillois Ladaniva va représenter l'Arménie lors de l'Eurovision en mai. Pour les artistes, participer n'avait pourtant rien d'une évidence.

Né à Lille en 2019, le groupe est composé de la chanteuse Jaklin Baghdasaryan, Arménienne de naissance mais élevée en Biélorussie, et de Louis Thomas, multi-instrumentiste lillois. Ils étaient loin de s'imaginer qu'ils se trouveraient un jour à porter les couleurs de l'Arménie.

Jaklin Baghdasaryan, 26 ans, est arrivée à l'âge de 20 ans à Tourcoing (Nord), "à la recherche de liberté et d'une vie meilleure, sans parler un mot de français", raconte-t-elle lors d'un entretien avec l'AFP. "Je ne parle même pas si bien arménien que ça !", ajoute la chanteuse.

Repéré par la diaspora arménienne

Pendant une séance d'improvisation, elle fait la connaissance de Louis Thomas, qui est touché par sa voix. Suivent des voyages, notamment à la Réunion ou en Amérique du Sud, sur la trace des "musiques du monde" (chant traditionnel arménien, maloya, reggae...) qui fusionnent dans leur répertoire.

En 2019, ils enregistrent une reprise d'une "vieille chanson arménienne" et la mettent en ligne sur YouTube "à l'arrache, sans préméditation". Grâce au bouche-à-oreille, le nombre de vues décolle. Les diasporas arméniennes de tous les pays se donnent rendez-vous dans la section des commentaires pour les encourager.

"Alors, on a un peu bidouillé. J'ai écrit mon premier texte, on a mis une composition en ligne", se souvient Jaklin Baghdasaryan. Rapidement, le clip cumule des millions de visionnages, passe à la télévision arménienne, se retrouve décliné à toutes les sauces sur TikTok en France, en Russie, en Arménie. "C'était totalement surréaliste", souffle Louis Thomas, 36 ans. "Dès la fin du confinement, on s'est retrouvés signés sur un label [le label indépendant PIAS], à jouer aux Trans Musicales (à Rennes) et au Printemps de Bourges".

"Les chevaux noirs"

En 2022, l'opérateur national arménien de télévision AMPTV leur propose de représenter le pays à l'Eurovision. Mais la proposition fait long feu : "on n'arrivait pas à se mettre d'accord au sujet de la chanson. On était d'accord pour que ce soit plus pop que d'habitude mais on voulait que ça reste notre morceau", rembobine-t-elle. Il faudra s'y reprendre à trois fois pour que l'idée aboutisse, en 2024. Il est vrai que le répertoire du groupe tombe assez loin de l'esthétique du concours organisé cette année en Suède, à Malmö, où ils interpréteront leur titre Jako.

"En ligne, beaucoup de gens nous appellent 'les chevaux noirs' [les outsiders] de la compétition", s'esclaffe la chanteuse, alors que le duo est classé 17e par les bookmakers, selon le site eurovisionworld.com, derrière le favori suisse Nemo et le Français Slimane (6e). Fidèle à la spontanéité et à la joie de vivre de leurs débuts, Ladaniva aborde sereinement le concours."Les Arméniens adorent l'Eurovision", poursuit Jalkin Baghdasaryan. "Quand ils viennent nous encourager à la fin des concerts, on sent qu'ils ont plus envie que nous qu'on gagne !"

Dans une compétition traditionnellement chargée d'un poids politique – comme en témoignent les polémiques sur la participation de la Russie après l'invasion de l'Ukraine en 2022 ou d'Israël, en guerre contre le Hamas à Gaza, en 2024 – et alors que l'Arménie et l'Azerbaïdjan sont opposées dans un conflit territorial au Haut-Karabakh, ils refusent toutefois de se voir comme des "représentants". "Être là, chanter dans ma langue natale, c'est déjà une façon de prendre la parole", dit Jalkin Baghdasaryan. Quant à Louis Thomas, il décrit le moment comme "surréaliste" mais aussi "un honneur".

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